PIFFF 2017review

A ghost story

Un couple vit paisiblement dans une petite maison de banlieue lorsque l’homme se fait tuer laissant la femme seule face à son deuil. Enfin seule, pas exactement. L’homme revient sous la forme d’un fantôme. Incapable de communiquer avec sa bien-aimée ou même les vivants, il reste coincé dans la maison où ils se sont aimés assistant aux chamboulements de la vie des vivants.

À GHOST STORY est le quatrième long métrage de David Lowery qui s’est fait connaître avec LES AMANTS DU TEXAS sorti en 2013 qui était porté à l’écran par le même duo d’acteur que celui-ci. À savoir Casey Affleck et Rooney Mara. À l’opposé de son dernier film, une grosse production de Disney, A GHOST STORY est un film indépendant américain qui reprend tous les codes du film indépendant tout en s’éloignant de ce dernier.

Chaque plan est porté par une idée de mise en scène fait de A GHOST STORY un film très intéressant sur le plan filmique, mais aussi une véritable expérience cinématographique un peu comme l’était UNDER THE SKIN de Jonathan Glazer. On y retrouve une même recherche de déconstruire le film de genre pour en revenir à son essence. Ce que faisait Jonathan Glazer avec l’extraterrestre incarnée par Scarlett Johansson se retrouve un peu dans le traitement du fantôme incarné par Casey Affleck camouflé sous un long drap blanc percé de deux trous sombres où l’on ne voit jamais briller l’éclat des prunelles du comédien.

Le parti pris du film est de proposer une image d’un fantôme silencieux, quasi impassible, pour qui le temps s’écoule différemment. Ainsi l’on peut avoir des bonds dans le temps radicaux (de quasi plusieurs années voire décades) dans un même plan et d’autres fois où le temps s’écoule très lentement, laissant un plan s’écouler fixement avec un geste répété. Ingénieuse, la mise en scène trouve une manière d’aborder le fantastique sans s’embarrasser d’aucun effet spécieux.

Tout l’aspect fantastique est apporté par des idées très visuelles et cinématographiques qui immédiatement font appel à l’iconographie du fantôme appartenant à la conscience collective. C’est finalement l’image classique du fantôme qu’on retrouve et le questionnement que pose le film s’inscrit dans un questionnement perpétuel que se pose l’humanité depuis quasi la nuit des temps.

Cette expérimentation et cette recherche dans la mise en scène accompagnée d’une image très stylisée en recherche de retrouver l’image de vieilles photos prises en pellicule et d’une bande sonore très immersive et émotive écrite par Daniel Hart laisse l’émotion de charger chez le spectateur, lentement mais sûrement pour donner lieu à des élancées lyriques pleines de mélancolie et portée par une puissante réflexion sur l’humanité et ce qui nous définit, mais aussi sur ce qu’on appelle l’immortalité, ce qu’on laisse après notre mort.

À GHOST STORY est l’un des meilleurs films sur la définition du fantôme, l’un des plus beaux, mais pas des plus accessibles. Par ses choix radicaux de mise en scène et sa recherche constante de trouver la meilleure manière de porter ses idées à l’écran, le film laisse sur son chemin le spectateur qui ne parviendra pas à accepter sa mise scène très spécifique. Ce qui est dommage, mais permet à la fois d’embrasser totalement une iconographie et une mise en scène très ingénue.


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- Article rédigé par : Sophie Schweitzer

- Ses films préférés : Le bon, La brute et le Truand, Suspiria, Mulholland Drive, Les yeux sans visage, L'au-delà


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