Bandh Darwaza

Un texte signé Patryck Ficini

Inde - 1990 - Tulsi et Shyam Ramsay
Interprètes : Hashmat Khan, Manjeet Kular, Kunika

Pour parvenir enfin à donner le jour à un enfant, une femme pactise avec un vampire. Mais s’il s’agit d’une fille, celle-ci appartiendra à la créature de la nuit… Lollywood avait DRACULA AU PAKISTAN ; en 1990, Bollywood aura BANDH DARWAZA !
Après avoir déjà traité le thème du vampire dans un film comme PURANA MANDIR, les Ramsay (encore ne fois très nombreux au générique !) décident de réaliser leur version du mythe de Dracula. Rien d’étonnant à cela quand on voit combien la ” famille de l’horreur ” a été influencée par les classiques du genre, notamment de la Hammer. Tout en ajoutant nombre d’éléments maison, BANDH DARWAZA adapte en effet librement, et sans le dire comme l’illustre NOSFERATU en son temps, le roman de Bram Stoker. Des idées et des scènes sont reprises, même la structure scénaristique s’en inspire largement, le tout dans une ambiance profondément néo-gothique comme savait si bien le faire les Ramsay. En effet, comme pour PURANA MANDIR, bien peu de choses rattachent ce beau film à une horreur contemporaine, ancrée dans son époque. Le Dracula de service, à la bestialité impressionnante, est une version indienne de la composition de Christopher Lee. Nombre d’éléments du mythe sont repris : cape, cercueils, emprise très chargée sexuellement sur de belles jeunes femmes, peur de la lumière du jour et des symboles religieux (crucifix mais aussi le coran et un aum, symbole hindou utilisé comme le trident de Shiva de PURANA MANDIR). Fidèles à leur volonté d’en donner un maximum au spectateur ébahi, les frères Ramsay ajoutent une secte d’adorateurs du vampire et un nouveau moyen de détruire celui-ci en brûlant l’idole chauve-souris qui le représente. La scène finale où le vampire prend feu est magnifique. Regrettons juste un livre de magie noire aussi rouge ( !) que ridicule, à l’iconographie issue du satanisme européen. Comme on le voit, l’occulte est ici très occidental dans sa conception (ce qui est sans doute exotique pour des Indiens, ne l’oublions pas !), davantage que dans PURANA où il était nettement plus adapté au pays.
Au rayon couleur locale, on trouve cependant une intéressante approche, disons sociologique, du couple indien confronté à la stérilité. Un thème que l’on trouve aussi dans le charmant PRETTY WOMAN-like CHORI CHORI CHUPKE CHUPKE (avec la craquante Preity (!) Zinta et Salman Khan, le sosie indien de Rocco Siffredi – même si on ignore jusqu’à quel point !) Le moyen choisi pour obtenir enfin un enfant s’avérait-là nettement moins dangereux !
Nous sommes à Bollywood, et le spectacle est total : n peu de comédie (très peu cependant comparé à URANA MANDIR : le ton est ici très sombre), des chansons (la première plutôt tardive, après 50 minutes de film) et des scènes de bagarres (moins spectaculaires que dans PURANA). Les acteurs jouent bien, notamment celui qui incarne le père de la jeune disciple du vampire, d’une classe incontestable. Les filles ont des formes voluptueuses et, sans être vraiment jolies, elles plairont au mâle avide de beautés typées. La réalisation est très efficace dans ses gros effets. Les Ramsay cherchent avant tout à en mettre plein la vue au public et ne ménagent pas leur peine pour y parvenir. Le rythme de certaines scènes mouvementées est rendu trépidant par un montage survolté…
Le vampire est ici encore d’une grande férocité. Les scènes où il traque les filles sont très prenantes, tout comme la poursuite endiablée (jeep contre fiacre !) qui vise à sa destruction. En fait, ses nombreuses pparitions sont un régal, même lorsqu’il porte une victime endormie comme le Dracula de la Hammer. Comme lui aussi et comme dans PURANA MANDIR, c’est encore le sang versé qui le ramène à la vie. La musique est très moderne quant à elle. On a même droit aux très efficaces ” Tchi tchi aha ” du Harry Manfredini des VENDREDI 13… quand on n’assiste pas à une séance d’aérobic !
BANDH DARWAZA est un entousiasmant film de vampires. Ce DRACULA pirate est sans doute moins fou et délirant que PURANA MANDIR mais tellement plus que les illustrations occidentales du mythe ! Le DRACULA de Coppola, deux ans plus tard, c’était une autre paire de manches.


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà


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