Beatrice Cenci: liens d’amour et de sang

Un texte signé Frédéric Pizzoferrato

Italie - 1969 - Lucio Fulci
Titres alternatifs : Beatrice Cenci
Interprètes : Tomas Milian, Adrienne Larussa, Georges Wilson

Née en 1577 à Rome, Beatrice Cenci sera au centre d’un procès qui aboutira à sa condamnation à mort en 1599. Fille d’un aristocrate violent et peut-être incestueux, la jeune fille héritera du surnom de la « belle parricide » après l’avoir assassiné avec l’aide de sa mère et ses frères. En raison des circonstances, le peuple de Rome demanda qu’elle soit graciée mais le pape Clément VII le refusa, ce qui permit à l’Eglise de s’emparer des biens des condamnés.
L’histoire de Beatrice inspira rapidement les artistes : un poème de Shelley, une nouvelle de Stendhal, une autre d’Alexandre Dumas, plusieurs pièces de théâtre. Le cinéma s’empare du récit au temps du muet puis en 1941 sous la caméra de Guido Brignone. La version la plus célèbre reste probablement celle de Ricardo Freda, LE CHÂTEAU DES AMANTS MAUDITS, sorti en 1956. Lucio Fulci en offre sa version en 1969 avant que Bertrand Tavernier ne reprenne les grandes lignes de l’histoire dans sa PASSION BEATRICE de 1987.
Lucio Fulci affirma souvent en interviews que BEATRICE CENCI était son meilleur film. Longtemps introuvable, le cinéaste offrait même, dans les années ’80, une récompense à qui lui fournirait une copie. Fulci utilise logiquement, en cette fin des années ’60, le contexte historique comme parabole pour développer un point de vue féministe et fustiger les institutions, s’attaquant ainsi à la politique et au clergé. Loin du cinéma d’exploitation et du gore qui deviendra sa marque de fabrique à partir du milieu des seventies, BEATRICE CENCI reste une œuvre sérieuse, au ton posé, parfois même guindé. Fulci se permet cependant quelques scènes de tortures dans la lignée des œuvres de l’époque consacrée à l’Inquisition (LE GRAND INQUISITEUR, LA MARQUE DU DIABLE, LA TORTURE,…) mais élude le côté Grand-Guignol pour se concentrer sur la charge anticléricale.
Echec critique (à sa sortie) et public, BEATRICE CENCI n’est pas facile d’accès : c’est une œuvre quelque peu théâtrale, peu spectaculaire, fort sombre, qui se refuse au happy-end. Un film personnel pour un Fulci bien servi par une poignée d’acteurs convaincants qui déclament leurs dialogues avec force et conviction. Il s’agit toutefois d’un drame historique « sérieux » et non pas d’un film d’exploitation et le spectateur devra aborder ce titre rare avec la bonne grille de lecture sous peine d’en ressortir légèrement désorienté. En tout cas, BEATRICE CENCI demeure une curiosité à découvrir pour les admirateurs de Fulci…et aussi les autres !


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- Article rédigé par : Frédéric Pizzoferrato

- Ses films préférés : Edward aux Mains d’Argent, Rocky Horror Picture Show, Le Seigneur des Anneaux, Evil Dead, The Killer


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