BIFFF 2012 : L’Asie et l’Amérique

Un texte signé Philippe Delvaux

- 2012 - Shinya Tsukamoto, Sono Sion, Takashi Shimizu, Takashi Miike, Tsui Hark, Lucky McKee, William Friedkin
Titres alternatifs : Kotoko, Himizu, Tormented, Ace attorney, Zombie Ass, Flying sword of dragon gate, Mural, Shuffle, The Woman, Killer Joe, The incident, Charlie zone, Father 's day, Pig, Poongsan, Zombie 108, The road

Un festival ne reflète pas nécessairement la substantifique moelle de la production mondiale. Toujours est-il que la visibilité qu’il donne aux œuvres programmées nous donne un aperçu tant de la vitalité des différents continents que de la médiatisation de leurs productions.

Examinons donc les programmations asiatiques et américaines présentes au BIFFF 2012.

Dans cet autre article, retrouvez notre avis sur la programmation européenne du BIFFF 2012.

L’Asie

A ce titre, comme les années précédentes, l’Asie reste une place incontournable dans la production du cinéma de genre. Elle est traditionnellement plus précisément tirée par trois locomotives : Le Japon, Hong-Kong (dorénavant étendu à la Chine) et la Corée du Sud.

Japon

Le Japon tout d’abord. C’est lui qui se taille la part du lion, tant par le nombre d’œuvres présentées que par la qualité de celles-ci, deux prix étant décernés à des productions nippones.

-KOTOKO témoigne d’une forte baisse de régime de Shinya Tsukamoto. L’auteur des Tetsuo, Bullet Ballet, Gemini, Vital, Snake of June, etc., recycle ses obsessions sous un format profondément ennuyeux. Le public du BIFFF se paiera la fiole du film le reste du festival durant
-HIMIZU est au contraire un nouveau chef d’œuvre pour Sono Sion qui les enquille les uns après les autres : Strange Circus, Cold Fish, Guilty of romance. Il obtient cette fois le prix du 7e parallèle
-TORMENTED est sans conteste le meilleur Takashi Shimizu et obtient le Corbeau d’Argent. L’auteur a enfin fini de recycler à l’infini ses Ju-On – deux films TV, deux métrages ciné et deux remakes américain quand même. Avec Tormented, il livre un superbe film d’horreur au scénario parfaitement calibré et pertinent. Tout juste peut-on lui reprocher l’inutile twist final qui affaiblit un peu le reste du métrage. Tormented est en outre une leçon de mise en scène pour les réalisateurs attirés par la 3D
-DEAD BALL est le Sushi Typhoon du moment. Les gouts et les couleurs…
-ACE ATTORNEY adaptation du jeu vidéo homonyme de Capcom, ressort de la veine foutraque, quoique jouissive, de Takashi Miike. C’est d’autant plus étonnant que le stakhanoviste de la caméra signait peu avant les très maitrisés 13 assassins et Hara-Kiri : mort d’un samouraï. Et à peine sort-on du BIFFF qu’on apprend que son film suivant, The Legend of Love & Sincerity (Ai to Makoto, adaptation d’un manga) sera présenté en séance de minuit au festival de Cannes
-Le pays du manga a pu en placer trois dans la programmation. Si Naruto et Fullmetal alchemist ne s’offrent qu’en produits dérivés des OAV, nous étions plus curieux de CHILDREN WHO CHASES LOST VOICES , signé par l’auteur de 5cm per second. Hélas tant le fond que la forme relèvent du quasi plagiat des productions du studio Ghibli : thème humaniste, background semi-rural, irruption du fantastique, franchissement des mondes par un tunnel, personnage féminin fort… tout y est.
-Last but not least, ZOMBIE ASS : TOILET OF THE DEAD est LE film improbable du festival, celui qui laisse sans voix par l’énormité du concept – même si ce dernier n’est pas poussé dans ses ultimes retranchements. Présenté en séance de minuit en toute fin de festival, ZOMBIE ASS a fait sensation.

Hong-Kong

Hong Kong reste toujours dans la course avec 4 productions, mais sans arriver à vraiment convaincre:
-MR & MRS INCREDIBLES est une sympathique comédie, ce qui n’était pas gagné tant l’humour cantonais est éloigné de nos standards, mais reste très superficiel
-THE SORCERER AND THE WHITE SNAKE est un échec pour Ching Siu Tung. Cette nouvelle adaptation de la légende du serpent blanc s’empêtre dans une direction artistique abominable et des effets numériques d’une rare laideur
-MURAL est au contraire plastiquement réussi. Encore heureux pour un film qui nous fait pénétrer une peinture représentant le paradis. Cependant, ce film sur le désir amoureux reste aussi plat que ledit mur. Dommage
-FLYING SWORD OF DRAGON GATE voit Tsui Hark remaker en 3D son Auberge du Dragon de 1992, elle-même remake de celle de King Hu de 1967. Mais à mettre trop d’ingrédients dans son potage, Tsui Hark nous égare : c’est beau mais on ne comprend rien.

Corée

La présence Coréenne déçoit elle aussi un peu.
-INVASION OF ALIEN BIKINI et HINDSIGHT sont insignifiants
-POONGSAN, gros succès au box office coréen scénarisé par Kim Ki-Duk, évoque moins le douloureux problème de la frontière nord-sud que l’obstination idéologique des services d’espionnages de part et d’autre. Le résultat vaut surtout par son final.
-PECHE DE NUIT, le court métrage coréalisé par Park Chan-Wook avec… un iphone retient notre attention … et celle de ARTE qui l’avait programmé en mars dernier.

Les autres pays asiatiques se partagent les restes et ne suscitent pas grand intérêt : Taïwan avec ZOMBIE 108, les Philippines pour THE ROAD

Etats-Unis et Canada

-PIG et SHUFFLE jouent tous deux d’une narration éclatée, mais le second s’en sort mieux, même si PIG ne démérite pas. Le jury du 7e parallèle décernera d’ailleurs une mention à SHUFFLE.
THE WOMAN signe un retour à la fois gagnant et violemment hardcore pour Lucky McKee, découvert à un précédent BIFFF avec MAY
-A l’instar du belgo-français THE INCIDENT, BLOODWORK est un petit budget qui tente avec succès de justifier l’agressivité de ses protagoniste, ici des infectés. L’ensemble porte par ailleurs une réflexion intéressante sur notre finitude comme condition de notre humanité
-Du Canada, CHARLIE ZONE s’est révélé un des rares films de minuit méritant le déplacement. Un boxeur est engagé pour libérer une jeune droguée.
-Au rang des petits budgets, FATHER’S DAY est une production tout ce qu’il y a de plus Troma. Originalité, les victimes sont des hommes… qui se font systématiquement violer.
-KILLER JOE signe un retour gagnant pour William Friedkin. Cette histoire de meurtre sur fond d’arnaque à l’assurance-vie est ponctuée de passages comiques qui en font mieux passer l’âpreté.

Retrouvez nos chroniques du BIFFF 2012.

Lire notre news sur le palmarès


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- Article rédigé par : Philippe Delvaux

- Ses films préférés : Marquis, C’est Arrivé Près De Chez Vous, Princesse Mononoke, Sacré Graal, Conan le Barbare

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