Bullhead

Un texte signé Yannik Vanesse

Belgique - 2011 - Michaël R. Roskam
Titres alternatifs : Rundskop
Interprètes : Matthias Schoenaerts, Jeroen Perceval, Jeanne Dandoy

En Belgique, en Flandre pour être exact, une famille de paysans trafique des hormones de croissance pour ses vaches. Plus qu’un simple goût pour l’illégalité, il s’agit d’une véritable criminalité, quand des familles quasi-mafieuses se croient au-dessus des lois et usent de violence pour vendre leurs substances et leurs animaux. Dans cette ambiance de brutalité démesurée, deux anciens amis d’enfance essaient de survivre, ce qui est loin de s’avérer facile. Jackie, blessé et diminué il y a longtemps, est obligé de s’injecter dans le corps des produits illégaux proches de ceux qu’il réserve aux bovins, ce qui le rend aussi musclé qu’agressif, le faisant parfois agir de manière terrifiante, véritable bombe risquant d’exploser à tout moment. Diederick, de son côté, s’en veut de ne pas avoir été là pour Jackie quand il en a eu vraiment besoin et, tout en étant indic pour la police, essaie de le protéger tant bien que mal.

Michael R. Roskam est réalisateur et scénariste de ce BULLHEAD. Il s’agit de son premier long-métrage, sorti en Belgique en 2011. Hélas, il ne s’est pas exporté en France, sans doute en partie à cause de l’impossibilité d’une version française, les langues parlées étant le néerlandais et le français, ce qui obligerait, pour apprécier tout le sel de ce film, d’en regarder une version sous-titrée. En effet, les soucis de communication entre la Flandre et la Wallonie, de même que l’incompréhensible volonté de se détester entre Flamands et Francophones, sont au centre de ce métrage, rappelant ainsi que la Belgique est un pays artificiel, qui force deux cultures complètement différentes à cohabiter. Pour incarner le rôle difficile et borderline de Jackie, le réalisateur a opté pour Matthias Schoenaerts, un acteur peu connu en France, mais qui a une longue carrière derrière lui. Il parvient à la perfection à jouer ce rôle d’écorché vif, flirtant toujours entre la souffrance renfermée et quasi-autiste, et la violence qui manque de jaillir de lui à tout instant, son physique le rendant impressionnant.

Le cinéma belge en général, et flamand en particulier, ne parvient que difficilement jusqu’en France, et c’est bien dommage, BULLHEAD étant un exemple frappant qui mérite le détour. Bien sûr, il est loin d’être parfait. La réalisation est calme, posée, classique, montrant que Michael R. Roskam n’est pas encore quelqu’un d’expérimenté, mais le résultat prouve qu’il peut devenir un réalisateur à suivre. Le choix des lieux est intéressant. Le réalisateur pose son action dans une campagne triste et déprimante, où la violence est toujours proche, y faisant vivre des personnages désespérés. La direction d’acteur est excellente. Les protagonistes sont des gens simples, sans avenir, avec très peu d’espoir, et sont superbement joués. L’histoire s’appuie sur les personnages plus que sur une véritable intrigue, posant ainsi surtout une ambiance, ce qui est autant le point fort que le point faible de BULLHEAD.
En effet, difficile de ne pas s’ennuyer par moment, les longueurs étant hélas nombreuses, malgré la quête des policiers pour attraper certains gangsters. Michael R. Roskam aurait peut-être dû se focaliser un peu plus sur eux, pour que l’intrigue criminelle ne soit pas qu’un filigrane mais ait un peu plus d’importance.
En l’état, ce métrage reste cependant attrayant. La caméra s’attache à Jackie, héros superbe et ambigu, que ce soit dans son enfance, avec des flash-back tout simplement parfaits, et tétanisants quand on découvre la blessure qu’il a subi, ou dans le présent, où il essaie de faire plus que survivre, redécouvrant la fille qui l’a attiré alors qu’il était adolescent, cause de sa souffrance, et qui est devenue une très belle femme.
BULLHEAD manque ainsi d’un peu de rigueur dans le scénario pour être vraiment inoubliable, mais constitue une intéressante plongée dans la criminalité paysanne flamande, à la découverte de personnages très crédibles dans leur triste réalité.


Votre soif de lecture n'est pas rassasiée ?
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides


Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.

- Article rédigé par : Yannik Vanesse

- Ses films préférés :


=> Pour prolonger votre lecture, nous vous proposons ce lien.
Share via
Copy link