Capture Kill Release

Un texte signé Sophie Schweitzer

Canada - 2022 - Nick McAnultyBrian Allan Stewart
Interprètes : Jennifer Fraser, Jon Gates, Farhang Ghajar

Jennifer et Farhang s’achètent une caméra afin de documenter le meurtre qu’ils planifient. L’heureux couple s’imagine en tueur en série sans scrupules, mais lorsqu’il s’agit de passer à l’action, les doutes viennent accabler Farhang. D’autant plus qu’il sent que Jennifer est prête à tout pour assouvir ses envies de meurtre.

Un couple heureux dans le crime ?

Le found foutage est un genre des plus éculés. Pourtant, chaque année, les festivals de cinéma d’horreur proposent un à deux longs-métrages de ce type. Le fait que les sagas V.H.S. et Paranormal Activy enchaînent encore les suites prouve qu’en dépit des critiques faites à ce genre de film, celui-ci fonctionne encore sur le public en recherche de sensations fortes. Mais plus que de chercher à effrayer, le found foutage, avec son principe de caméra toujours active portée par les personnages, est censé offrir au spectateur une meilleure immersion dans l’histoire.

L’omniprésence de la caméra fait du spectateur le complice du couple.

C’était le parti pris par LE PROJET BLAIR WITCH en 1999, renouvelé par REC en 2007, et c’est exactement ce que cherche à faire CAPTURE KILL RELEASE. Ce jeune couple est excité par l’idée de tuer, partage ses émois face caméra, donnant à vivre au spectateur toute leur intimité, comme en témoignent leurs nombreux instants où ils passent de la planification de meurtre à la copulation. Ils témoignent aussi, et surtout, de leur maladresse, de leurs doutes et de leurs paradoxes. Le meilleur exemple étant une scène en voiture où ils cherchent la victime parfaite. Lui ne veut pas passer pour un pervers ou un raciste pas plus qu’un homophobe, elle, nourrie de ses recherches et d’une fascination pour les tueurs en série, récite une série de clichés tirés de films d’horreur comme le ferait un fan du genre.

Toutes les étapes de la préparation nous sont montrées, délicieusement mises en scène.

Ce qui par conséquent, amène le spectateur dans une sorte de mise en abyme. Car lui aussi a été nourri aux films d’horreur et de tueurs en série, lui aussi connaît les clichés du genre, et comment, en fiction, on s’occupe d’un cadavre. Peut-être même en connaît-il plus que le couple qui, bien évidemment, pressé de passer à l’action et du fait de ses doutes, va forcément commettre une bonne quantité d’erreurs qui poussera le spectateur à songer qu’il aurait sans doute fait mieux.

L’héroïne pressée de passer à l’acte

La réussite du film est de rester crédible tout du long. S’il y a un moment où Jennifer, passant à l’action seule, paraît dotée d’une grande ingéniosité ou force, les ellipses permettent de rendre ces ruptures de la suspension de crédulité moins dérangeantes. Pour le reste, les instants de doute, les discussions absurdes sur qui il faudrait tuer ou ne pas tuer, le choix d’armes à la quincaillerie, ou encore les essais pour découper le corps, sont non seulement des instants savoureux, mais permettent de donner de la crédibilité à l’histoire et à ce couple.

Le héros en proie aux doutes

Plus encore, cela les rend attachants. Farhang s’est manifestement impliqué dans tout cela par amour pour sa douce, en dépit de toutes ses inquiétudes. Il est maladroit, ce qui le rend touchant. À l’inverse, Jennifer paraît complètement tarée, mais son genre de folie meurtrière tranche avec son apparence d’adorable jeune femme, et, même si elle est parfois un peu trop attachée à son image, notamment face à la caméra, il y a un vrai sentiment amoureux entre les deux personnages.

Alors, heureux.se ?

Pour ne rien gâcher à l’affaire, l’image est soignée, le casting plutôt bon même si les deux acteurs n’ont pas une très longue filmographie derrière eux, le scénario tient la route et la fin est surprenante. On espère que ce film ajouter une virgule qui débute sa carrière dans les festivals ajouter une virgule parviendra à toucher son public comme il nous a touchés touché.


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- Article rédigé par : Sophie Schweitzer

- Ses films préférés : Le bon, La brute et le Truand, Suspiria, Mulholland Drive, Les yeux sans visage, L'au-delà - Ses auteurs préférés - Oscar Wilde, Sheridan LeFanu, Richard Mattheson, Stephen King et Poppy Z Brite

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