Cinq Survivants

Un texte signé Jocelyn Manchec

USA - 1951 - Arch Oboler
Titres alternatifs : Five
Interprètes : William Phiips, Susan Douglas Rubes, James Anderson, Charles Lampkin, Earl Lee

Fort de préfigurer les plus fameux titres du genre (LE MONDE, LA CHAIR ET LE DIABLE (MacDougall, 1959), PANIQUE ANNEE ZERO (Milland, 1962), LE DERNIER SURVIVANT (Murphy, 1985) ou même ceux signés de ce prompt dégaineur de Roger Corman (tel THE DAY WORLD ENDED, 1955)), le FIVE de Arch Oboler a très vite gagné un culte certain – culte alimenté par sa rareté de diffusion et tout le bien que Joe Dante (PANIQUE SUR FLORIDA BEACH) a pu en dire ici et là.

Alors qu’une bombe nucléaire a frappé le monde, la Terre n’est plus peuplée que par cinq survivants: une femme enceinte, un guide de l’Empire State Building primitiviste, un homme de couleur, un banquier et un explorateur. En tant que derniers êtres humains, ils doivent tout faire pour vivre harmonieusement et “constructivement”. Mais la réalité est toute autre et leurs visions opposées du futur sont en passe de les mener à leur perte. Et celle de la race humaine.

Sans une once d’effet (un squelette de classe d’anatomie et ce sera bien tout !) mais force oralité (l’origine du film semble être radiophonique, univers familier à Oboler, pour lequel il rédigea nombre de dramatiques), cette première réflexion sur le “jour d’après”, tourne à la joute philosophique entre partisans aux éthiques “survivalistes” diamétralement opposées plutôt qu’à l’exploitation d’images choc. Deux principales thèses s’affronteront alors, l’une prônant un humble retour à la terre (tout en vivant dans une villa désignée par Frank Lloyd Wright, le père de l’Architecture Démocratique, quand même !), tandis que l’autre se vautrera dans un cynisme opportuniste reposant sur le pillage et l’irresponsabilité nihiliste. Débat d’idées sous l’oeil effarouché de l’unique femme, enceinte de surcroît, et enjeu central parmi les enjeux de civilisation future.

Il faudra donc dépasser les considérations émise et patienter une bonne heure et quart pour s’échapper enfin des côtes amènes du littoral (où l’on s’interroge sur l’avenir agricole et se berce avec nostalgie de la vie qu’on aurait pu avoir si…), et découvrir un peu d’urbanisme fantômisé (on est ainsi loin du renversant New York arpenté par Harry Belafonte !) !

Malgré ce parti-pris économe, peu démonstratif, voire authentiquement hiératique quoique passablement bavard, le titre ne manque pas toutefois de distiller un malaise certain (en deux trois articulations dramatiques bien menées).

A la manière de futurs épisodes de la TWILIGHT ZONE, le film (dont l’ouverture n’est pas non plus, forte de sa caméra aérienne plongeant sur une hagarde jeune femme errant dans une “lande” désertique, sans évoquer un peu celle de THEM !), on en manquera pas de noter que FIVE vise avant tout une certaine efficacité narrative (forte de coups de théâtre et autres trucs scénaristiques) et philosophique. Et qu’en négligeant ainsi la teneur en magnétique pourtant naturellement induite par le sujet (l’atmosphère n’y est pas aussi travaillée que, dans des registres certes différents, chez Herk Harvey (CARNIVAL OF SOULS) ou Francis Coppola (DEMENTIA 13)), la production tire vers le drame psychologique – un brin théâtral – plutôt que vers la SF angoissée et paranoïaque ayant alors cours sur les écrans américains.
Que la volonté de cet état soit délibérée ou sagement contrainte par un défaut de budget n’y changera rien: FIVE défriche certes, mais à force de seuls discours, finit par flancher.


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- Article rédigé par : Jocelyn Manchec

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