Couples en chaleur

Un texte signé Philippe Chouvel

Lino et ses deux amis ont créé un groupe, le Lino Jazz Band qui, comme son nom ne l’indique pas, est tourné vers une musique pop/rock à tendance psychédélique. Accompagnés de leurs copines respectives, ils partent se mettre au vert dans la maison de campagne où réside la mère de Lino, une veuve esseulée en mal d’amour. Les jours se suivent et se ressemblent pour les trois couples pratiquant l’amour libre à un rythme intensif. Et quand les hommes répètent, les femmes savent parfaitement s’occuper entre elles…
Tandis qu’un promoteur immobilier tente de convaincre la mère de Lino de vendre la propriété, l’une des filles ne peine pas à le faire changer d’idée… et de boulot. Devenu impresario, il prend le groupe sous son aile et l’envoie à Paris dans un studio d’enregistrement.
La loi française instaurant le classement X à la fin de l’année 1975 condamna le genre pornographique quelques mois à peine après son apparition. Les films classés X furent taxés plus lourdement que les autres, et toute subvention fut interdite pour favoriser leur mise en chantier et leur diffusion dans les salles de cinéma.
Malgré cet handicap de taille, le cinéma X français connaîtra encore de belles heures jusqu’à la fin des années 70, avant de sombrer dans la médiocrité la plus totale.
COUPLES EN CHALEUR fait partie de cette génération de films X réalisés dans un esprit d’insouciance, une ambiance « bon enfant », avec des acteurs complices devant et en dehors de la caméra. Evidemment, le scénario est réduit au strict minimum, et l’on se rend compte que les protagonistes sont complètement livrés à eux-mêmes, improvisant quasiment leurs dialogues.
De ce casting, on retiendra quelques « pointures » de l’époque, à savoir Cyril Val et Charlie Schreiner chez les hommes, Elisabeth Buré et Helen Coupey chez les femmes. Cyril Val, de son vrai nom Alain Plumey, a créé en 1997 le Musée de l’érotisme dans le 18ème arrondissement de Paris. Une reconversion réussie, tout comme Brigitte Lahaie qui faisait ici ses débuts dans le hard. L’actrice n’apparaît que dans le dernier tiers du métrage, jouant la vendeuse dans un magasin d’instruments de musique. Encore brune et timorée, elle n’était pas encore l’actrice emblématique du X qu’elle deviendra quelque temps plus tard. Brigitte Lahaie a poursuivi sa carrière de la meilleure des façons, animant notamment quotidiennement une émission de radio sur RMC Info.
La présence de Catherine Castel, ajoutée à celle de Cyril Val et de Jean-Jacques Renon comme responsable de la photographie donne à cette œuvre un cachet proche de celui des films pornographiques de Jean Rollin réalisés à cette période (Renon était le photographe attitré de Rollin, Val et Castel des comédiens réguliers du cinéaste). Catherine Castel et sa sœur jumelle Marie-Pierre sont avant tout connues pour leurs rôles (ensemble) dans LA VAMPIRE NUE, voire TOUT LE MONDE IL EN A DEUX. Elles étaient aussi réunies dans PHANTASMES, le meilleur film X tourné par Jean Rollin.
Mais le metteur en scène, ici, a pour nom Jean Luret. Réalisateur d’une trentaine de films hardcore de qualité très inégale aux titres parfois « exotiques » (DONNE TA LANGUE AU CHAT, CES SALOPES DE BELLES-SOEURS, LES LECHEUSES…), Jean Luret quitta une fois l’univers du sexe pour réaliser une comédie au titre encore une fois prometteur, C’EST FACILE ET CA PEUT RAPPORTER… 20 ANS, avec Michel Galabru. Il va sans dire que l’homme ne restera pas dans les annales (si l’on peut dire) du cinéma.
Cela étant, COUPLES EN CHALEUR, sans être un grand cru du X hexagonal, possède suffisamment d’intérêt pour mériter d’être vu, pour peu que l’on soit nostalgique de l’âge d’or du cinéma porno et des acteurs qui jouaient plus pour le plaisir que pour le cachet. A noter que Richard Allan (Lemieuvre de son vrai nom), crédité au générique, ne joue en fait pas dans ce film. Enfin, la version dvd éditée en Allemagne propose une version plus longue que celle distribuée autrefois en France en VHS, d’environ sept minutes.