chroniques-infernalesDossier

Dangereux élevage

Le deuxième opus de la saga des Sanglornis Prima se passe deux cents ans après les évènements du premier tome qui ont vu la menace des sanglornis servir de catalyseur à l’éclatement de la société humaine.
Issus d’une expérience génétique mélangeant l’ornithorynque et le sanglier, le sanglornis s’avère une terrible menace pour les hommes et un redoutable adversaire. Face aux massacres perpétrés par les animaux et à l’insécurité grandissante, le monde sombre dans le chaos. Deux siècles plus tard, la société telle que nous la connaissons aujourd’hui a disparu car les bêtes ont tellement mis les hommes en danger que toutes les structures étatiques ont disparu. Dans ce futur, nous sommes revenus à une sorte d’ère post-industrielle probable. Les hommes utilisent encore les vestiges de la technologie du XXe siècle mais les rouages des machines, toutes les sciences, la médecine, tout cela s’évanouie devant le nécessaire repli sur des petites structures claniques. Pour survivre, les hommes se sont en effet regroupés dans des villages et des fermes fortifiées. Et si la science recule, voire même est en passe de disparaître complètement, le religieux, quant à lui, fait un retour en force.
Dans Dangereux Elevage, l’action suit une famille d’éleveurs de chevaux. Pour résister aux attaques des slangornis et pouvoir disposer d’une monture plus rapide et résistante, gage de meilleures chances de survie dans ce monde rude, le père, scientifique dans l’âme, met au point dans un laboratoire de fortune une nouvelle espèce de chevaux : les chemaux. Mélange du cheval et du chameau, ce nouvel animal est rapide, endurant et comme les sanglornis développe une sorte d’intelligence qu’il met, fort heureusement au service de ses maîtres auxquels il s’attache de manière bien peu conventionnelle. Nous suivons donc la naissance de ces animaux, leur dressage, leur évolution.
A l’instar du premier tome, les personnages sont ici très bien décrits. Relativement stéréotypés, ils n’offrent rien de bien surprenant mais présentent ainsi l’avantage d’être rapidement cernés et acceptés par le lecteur.
La famille Soters manipule donc les gènes des chevaux en les améliorant. Elle attire l’attention du pouvoir impérial qui se met en place et qui est fortement intéressé par sa découverte. En revanche, l’église, qui se place comme de bien entendu en tant que bras armé de l’empire, ne voit pas ces nouveaux animaux d’un bel œil. L’œuvre du malin transgénique n’est pas loin !
Ainsi, l’intrigue, les rebondissements et les nœuds dramatiques ne surprendront personne. L’empire s’impose et régente tout, l’église poursuit les hérétiques de sa vindicte, les traîtres sont aux aguets et les gentils sont très gentils. On pourrait regretter un peu une histoire aussi convenue. Heureusement, les personnages campés se révèlent attachants et l’écriture est précise, agréable et les actions s’enchaînent de manière fluide. Le lecteur se prend en outre d’intérêt par les chemaux, une fois la première surprise passée et la couleuvre de leur naissance avalée. Ce qu’on fait d’ailleurs facilement dans la mesure où il apparaît clairement que Didier Quesne ne cherche pas franchement la vraisemblance. C’est un conteur, alors laissons-le conter.
Dans ce livre-ci, les sanglornis sont plutôt cantonnés à un rôle de bêtes sauvages extrêmement dangereuses et hantant les bois (surtout ne laissons pas sortir les enfants… ni les femmes… ni les hommes, en fait). Elles sont ainsi un peu éloignées de l’espèce de croque-mitaine tout puissant du premier livre qui faisait frémir le lecteur. On est ici loin des fortes scènes de violence sanglante du début. La présence des sanglornis se résume à une sorte d’épée de Damoclès pour qui sort hors des fortifications et c’est à peu près tout. Les chemaux et l’intérêt qu’on leur porte remplacent quelque peu l’attente du lecteur mais on ne se départit pas de l’impression que l’auteur va s’éloigner des terribles scènes du premier livre puisqu’à la fin de celui-ci, la direction donnée est bien différente et s’attache aux hommes et à leur avenir de plus en plus fantastique dans ce monde s’apparentant à un nouveau Moyen Age. On quitterait le genre horreur pour l’héroïc Fantasy apparemment.

Share via
Copy link