Dard Divorce

Un texte signé Frédéric Pizzoferrato

Allemagne - 2007 - Olaf Ittenbach
Interprètes : Martina Ittenbach, Daryl Jackson, Jaymes Butler, Barrett Jones.

Olaf Ittenbach est un de ces cinéastes allemands (aux côtés d’Andreas Schnass, Timo Rose et Andreas Bethmann) qui œuvre essentiellement dans le cinéma gore le plus outrancier. Né en 1969, Ittenbach débute sa carrière en 1989 avec un long-métrage tourné pour le marché de la vidéo intitulé BLACK PAST. Trois ans plus tard, Ittenbach récidive avec un film à sketches, THE BURNING MOON, qui sera carrément banni en Allemagne pour « glorification de la violence ». Le cinéaste poursuivra ensuite avec PREMUTOS, CHAIN REACTION, LEGION OF THE DEAD ou le bien nommé BEYOND THE LIMITS. Parallèlement à sa carrière de metteur en scène, Ittenbach s’impose comme un des meilleurs spécialistes des effets de maquillages sanglants, confectionnant des prodiges pour ses confrères comme Timo Rose ou encore le fameux Uwe Boll.
DARD DIVORCE s’inscrit dans la lignée des précédentes œuvres d’Ittenbach mais adopte un scénario de thriller et une construction en flashbacks à la RASHOMON (oui, évidemment il faut le dire vite) tout en distillant un humour acerbe à la Quentin Tarantino (le talent en moins). L’essentiel demeure cependant les hectolitres de sang versés et, à ce niveau, Ittenbach ne déçoit pas ses fans en plongeant joyeusement dans la tripaille la plus outrancière. Dommage que tout le reste soit si médiocre…
L’intrigue nous présente une jeune femme, Nathalie Stein, avocate allemande émigrée aux Etats-Unis en plein divorce avec son mari Tim. En dépit d’une tendance à l’alcoolisme, Nathalie tente d’élever du mieux possible ses deux enfants. Mais un jour son chien disparaît et son époux, mortellement blessé, l’informe que sa progéniture a été kidnappée. Lorsque la police arrive, le corps de Tim a disparu et la situation échappe rapidement à tout contrôle. Des gangsters, sur les traces d’un million de dollars et d’une valise de cocaïne, débarquent alors… le carnage peut commencer !
Si les quinze premières minutes de DARD DIVORCE laissent espérer un long métrage intriguant et intéressant, Ittenbach retombe malheureusement très vite dans les pires travers du gore de série Z, sacrifiant absolument tout à un déferlement de sang rapidement lassant.
Premier problème : le métrage se repose en grande partie sur les épaules de Martina Ittenbach, la jeune épouse du cinéaste, laquelle, malheureusement, ne possède pas des qualités d’actrices suffisantes pour donner une quelconque crédibilité à son personnage. L’identification devient donc problématique et toutes les tortures endurées par l’héroïne échouent à susciter une véritable empathie. Le reste de la distribution n’est pas d’un meilleur niveau, loin de là, et les acteurs peinent à prononcer leurs répliques, toutes extrêmement pauvres et inintéressantes d’ailleurs.
Deuxième problème : la gratuité de certaines séquences risque de paraître particulièrement épuisante, y compris pour les amateurs d’horreur sanglante. Une scène montre ainsi un homme se déshabiller intégralement avant de longuement – très longuement – éviscérer et désosser un cadavre. Cinq minutes de boucherie pure extrêmement ennuyeuse.
Troisième problème : les passages impliquant les mafieux sombrent dans une violence cartoonesque probablement inspirée par RESERVOIR DOGS ou PULP FICTION. Mais cela s’accorde mal avec la cruauté brute du reste du métrage et Ittenbach semble coincer le cul entre deux chaises, quelque part entre la violence extrême du torture porn et le gore plus distancié dont témoignait par exemple son précédent LEGION OF THE DEAD.
Quatrième problème : DARD DIVORCE souffre d’un montage hasardeux et d’une musique insipide, le mixage sonore horrible et assourdissant rendant en outre une partie des dialogues presque inaudibles.
Cinquième problème : Ittenbach n’hésite pas, en plus, à verser dans les effets « jump scare » les plus éculés comme cette main s’abattant sur l’épaule de l’héroïne sans autre raison que de tenter d’effrayer le spectateur. Peu d’originalité à attendre donc d’un métrage qui recycle sans beaucoup d’inspiration les pires lieux communs de l’horreur extrême.
Enfin, dernier problème, et non des moindres, en ne durant qu’une petite heure et vingt minutes, le métrage de Mr Ittenbach parait tout simplement interminable, le scénario n’offrant absolument aucun intérêt, excepté l’excuse de balancer à intervalles réguliers des litres de sang.
Au niveau de la mise en scène, Ittenbach se défend toutefois et parvient à proposer un produit relativement soigné. Evidemment il ne faut pas en attendre la moindre fulgurance mais, dans la masse des gore bâclés aux limites de l’amateurisme en provenance d’Allemagne, DARD DIVORCE reste d’un honnête niveau technique. Les effets de maquillage, pour leur part, sont d’une efficacité extraordinaire et sont même franchement excellents, d’autant qu’on devine les contraintes d’un budget réduit. Mais le gore, aussi généreux et réussi qu’il soit, peut il vraiment sauver un film ? Non, sans doute…
Olaf Ittenbach a jadis livré quelques splatters divertissants comme PREMUTOS ou LEGION OF THE DEAD mais cet essai lorgnant vers le torture porn en vogue à la fin des années 2000 ne parvient que rarement à susciter autre chose qu’un intérêt poli. A réservé aux inconditionnels du gore pur et dur qui, peut-être, trouveront leur compte dans la boucherie ininterrompue proposée par le cinéaste.


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- Article rédigé par : Frédéric Pizzoferrato

- Ses films préférés : Edward aux Mains d’Argent, Rocky Horror Picture Show, Le Seigneur des Anneaux, Evil Dead, The Killer


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