retrospective

Darktown Strutters

Si William Witney est une légende pour beaucoup de cinéphiles, c’est en grande partie du aux nombreux serials qu’il a réalisé pour la Republic, l’une des firmes spécialistes du genre. Dick Tracy, Zorro, Captain Marvel et Fu-Manchu peuplent ses mises en scène débridées. Aujourd’hui encore on ne peut qu’admirer la belle maîtrise de Witney en matière d’action, c’est l’un des tout premiers qui utilisent des chorégraphies lors des combats. Après la seconde guerre mondiale, cet ancien coursier de studio se spécialise dans les longs métrages de série B, on lui doit, entre autre petit bijou, THE BONNIE PARKER STORY (1958). Dès les années 60, il se dirige vers la télévision (LES MYSTERES DE L’OUEST, LAREDO, BONANZA et plein d’autres feuilletons à succès), puis, alors qu’on ne l’attendait plus au cinéma, il signe, en 1975, un avant dernier film singulier produit par Gene Corman : DARKTOWN STRUTTERS.
Syreena et trois de ses copines toutes carrossées comme des Miss Black America (une petite dédicace à Curtis Mayfield ne peut jamais faire de mal) chevauchent les USA aux guidons de leurs dragsters. De retour chez elle, dans le ghetto de Watts, Syreena découvre que sa mère, Cendrillon, a disparu. Elle part avec ses copines, son frangin et une bande p’tits gars mous du bulbe à la recherche de sa « môman ». La fine équipe va devoir affronter, au son d’une bande son disco composée par le label Stax (le label d’Isaac Hayes et Otis Redding, excusez du peu), le Ku Klux Klan, des hommes cochons, des flics racistes et un foldingue Mister Cross.
A la lecture du pitch, le spectateur devine aisément qu’il va assister à une pelloche originale… cela est confirmé dès la première scène. Nos quatre canons à la peau d’ébène affrontent une bande de marines machos dans une scène cartoonesque. Elles sont ensuite poursuivies par une patrouille de policiers idiots dont la voiture est dotée d’une sirène immense. Tout ceci n’est donc pas très sérieux, d’autant plus que le métrage est monté à certains moments en accéléré. Ce qui est drôle cinq minutes devient vite lassant et le cinéphile a parfois l’impression d’assister à un show de BENNY HILL, en tout cas, il ne retrouve pas le style incisif de William Witney. La faute à un scénario bancal signé George Armitage, plus heureux lorsqu’il passe derrière la caméra (voir son sympathique HITMAN en 1972 avec Pam Grier au top de ses formes). Même la bande son chantée (et oui, c’est en partie une comédie musicale) par des interprètes de l’écurie Stax est plutôt inégale, l’intérêt du film est ailleurs, et plus particulièrement dans son casting.
L’éphémère star noire Trina Parks campe Syreena. Elle cabotine tellement qu’on la préférait quasi muette en James Bond Girl (LES DIAMANTS SONT ETERNELS de Guy Hamilton-1971), si elle demeure supportable c’est uniquement pour sa plastique irréprochable. Edna Richardson est Carmen, on avait pu apercevoir sa jolie frimousse l’année précédente dans l’excellent TRUCK TURNER & CIE avec Isaac Hayes. Bettye Sweet, dont la filmographie se résume à cette bobine, est Miranda. La dernière complice, Theda, est jouée par Shirley Washington, une actrice qui tourna dans nombre de métrages dont une perle de la blaxploitation : TNT JACKSON (Cirio H. Santiago-1974) et sa scène culte (et cul) de baston à poil dans la pénombre, ça c’est du Bis ! Au casting masculin, on retrouve un habitué de l’écurie Corman, le légendaire Dick Miller (près de 200 films dont tout les Joe Dante-qui le vénère), ainsi que Roger Mosley, un gros bras qui connut la gloire en interprétant TC dans la série MAGNUM.
Cette joyeuse troupe tente de tordre le cou à tous les préjugés racistes alors en vogue et aussi, ce qui est plus courageux, défend l’avortement (car Cendrillon bosse au planning familial). Ces prises de positions progressistes contribuent à rendre cette entreprise sympathique, néanmoins, on est loin des grandes réussites de la blaxploitation.

Share via
Copy link