Un texte signé Alexandre Thevenot

Etats-Unis - 1958 - Byron Haskin
Titres alternatifs : From the Earth to the Moon
Interprètes : Joseph Cotten, George Sanders, Debra Paget...

review

De la terre à la lune

Fin du XIXème siècle. Etats-Unis. Deux éminents scientifiques s’affrontent en créant chacun de son côté une matière capable d’anéantir ou de contrer celle de l’autre. Victor Barbicane invente une arme surpuissante grâce à une énergie qu’il apprend à maîtriser « la puissance X » et dont la force permettrait de raser une ville en un clin d’œil. Stuyvesant Nicholl, son rival, met au point un métal si résistant qu’il serait capable de subir « la puissance X » sans s’altérer. Après un essai qui montre l’efficacité de l’arme de Barbicane, les états et la population commencent à s’inquiéter de sa puissance et des dérives qu’elle pourrait entraîner. D’autant plus que son inventeur voudrait propulser cette substance X sur la lune afin de la faire exploser, et prouver ainsi que cette nouvelle énergie serait capable plus tard d’envoyer des hommes dans l’espace. Le président des Etats-Unis en personne le ramène à la raison en lui rappelant qu’une telle charge, s’il advenait une erreur de pilotage, pourrait retomber sur la terre entraînant une apocalypse. Dissuadé, Barbicane décide d’embarquer lui-même dans la fusée avec une toute petite charge de « puissance X » pour prouver qu’il est possible d’aller sur la lune et d’en revenir. Il emmène avec lui son rival dont les connaissances précieuses lui seront bien utile.

Adapté de Jules Vernes, ce long-métrage qui est le dernier produit par la RKO, semble rebondir sur des thématiques à la mode dans les années 50. Le film d’aventure inspiré des œuvres merveilleuses de Jules Vernes a du succès avec notamment 20 000 LIEUES SOUS LES MERS de Richard Fleischer (1954). Un an après DE LA TERRE A LA LUNE, il sera question du célèbre VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE d’Henry Levin. Il n’est donc pas anodin de voir cet univers fantastique de nouveau investi. Cependant, l’aventure en elle-même sera avant tout une aventure spatiale, faisant ainsi lorgner le film sur de la science-fiction basique (conquête spatiale et danger des armements nucléaires). Cette interpénétration des genres fait que l’histoire ne s’installe pas dans une période contemporaine de la réalisation du film mais dans une seconde moitié de XIXème siècle à la Jules Vernes. Les costumes, la décoration des intérieurs, les villages marqués par la mythologie du Far West, tout est là pour donner un parfum presque exotique.

Mais du voyage tant pointé du doigt par le titre, nous ne verrons pas grand chose. Cette intrigue principale commence à se dérouler vers la quarantième minute du film, réduisant les scènes précédentes à des discussions anecdotiques qui alourdissent l’œuvre. Elles sont néanmoins intéressantes dans la mesure où elles disent beaucoup sur l’état de psychose qui devait régner aux Etats-Unis. L’intérêt pour le progrès, l’incapacité de l’homme à maîtriser ses inventions, l’appât du gain sont autant de thématiques traversées par les lignes de dialogue.

Après un décollage un peu kitsch, le voyage n’apporte pas grand chose de nouveau au genre. Les rivalités se réveillent entre les différents membres de l’équipage. Au niveau visuel, à l’exception de deux salles des machines d’aspect original, nous n’avons droit qu’à de nouveaux intérieurs confortables semblables à ceux précédemment vus sur terre. Il n’y a pas, ou peu, de vision de la fusée dans l’espace. Seules restent les discussions qui au final auront constitué l’essentiel du film. A ce titre, DE LA TERRE A LA LUNE est très bavard et s’arrête au moment où cela aurait pu devenir intéressant : à l’atterrissage sur la lune, faute de budget, rien n’est montré : pas de vues exotiques de notre cher satellite, ni de vision du vaisseau qui a aluni. Byron Haskin nous avait habitués à mieux en terme de spectacle. Il suffit simplement de penser à son film le plus connu, LA GUERRE DES MONDES !

DE LA TERRE A LA LUNE n’est pas pour autant mal réalisé. Si les acteurs surjouent un peu, si le film dans son ensemble est un peu théâtral, Byron Haskin filme bien et la photographie donne à l’œuvre un charme légèrement désuet qui amplifie sa dimension historique.
Bref, cette adaptation du texte de Jules Vernes, pas très convaincante mais pas non plus rédhibitoire, laisse un bel arrière-goût d’inachevé.


- Article rédigé par : Alexandre Thevenot

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