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Der Samouraï

Jakob est policier dans une petite ville campagnarde allemande où la vie est rythmée par les soirées au bar et les matchs de foot de la petite équipe locale. Sa principale occupation, jusqu’à présent, a été de chasser les loups s’approchant de trop près des habitations. L’arrivée d’un étrange travesti armé d’un sabre va bouleverser sa morne existence.

Grand gagnant du sympathique et trop méconnu festival Mauvais Genre, cuvée 2014, DER SAMOURAÏ a bénéficié d’une sortie tardive en DVD en France alors qu’il a été rapidement distribué aux Etats-Unis et en Allemagne. Bénéficiant d’un budget modique, DER SAMOURAÏ, premier film de Till Kleinert, fait preuve d’une subtile mise en scène et d’une relative sobriété qui sont tout à son honneur. Epuré, le film repose grandement sur l’univers et l’atmosphère fantastique que parvint à distiller essentiellement l’incroyable Pit Bukowski.

Ce dernier incarne l’énigmatique samouraï travesti. Ce jeune acteur allemand a une véritable gueule, et attire immédiatement le regard par le charisme qui se dégage de lui.

La dualité féminin – masculin qui se dégage de son personnage traverse tout le film et nous interroge sur la bestialité de ce personnage aussi inédit qu’impressionnant.

Till Kleinert sait d’ailleurs tirer le meilleur de son binôme d’acteurs, construisant son film comme un véritable duel entre les deux personnages, mais incluant également un étrange jeu de séduction, répulsion.

La lumière est un élément important également : de nombreuses scènes sont éclairées par de vives lumières transperçant l’obscurité, nous faisant quitter le clair-obscur pour une brutale lumière au milieu de la nuit.

L’image du loup hante également la bobine du début à la fin. Nous sommes amenés à nous demander si c’est un véritable loup-garou qui est à l’œuvre. Qui est alors ce lycanthrope ? L’étrange travesti samouraï ou peut-être le policier ? Parfois, nous devinons la métaphore comme dans COLLATERAL DER SAMOURAÏ tire sa force de là. D’invoquer tout à la fois l’imagerie du film d’horreur, avec son lot de tuerie, de sang étalé sur le bitume et de têtes coupées, que de l’atmosphère fantastique qu’il distille. Il y a un vrai mélange des genres, DER SAMOURAÎ invoquant le fantastique par le mythe du loup-garou, le western par le duel qui les oppose, et le film d’horreur par la violence de ses images.

Un mélange des genres qu’on retrouvait également dans THE HITCHER (l’original de 1986), un film où un jeune conducteur était pourchassé par un mystérieux et étrange autostoppeur incarné par l’impressionnant Rutger Hauer. Cette inspiration a d’ailleurs été évoquée par le jeune réalisateur, Till Kleinert. Et l’on comprend mieux le choix de Pit Bukowski au visage anguleux, tout en relief, à la lèvre couturée dans le rôle du charismatique et inquiétant samouraï dont le personnage semble faire écho à celui campé par Rutger Hauer en 86.

Le réalisateur allemand manifeste nombre de références dans son film mais échappe à la tentation de les éparpiller au sein de son récit. Il préfère raconter son histoire pour le moins troublante. C’est un très bon film qui mêle l’inquiétant fantastique du conte de fée au thriller urbain qu’il déplace avec adresse dans la campagne allemande. On retrouve d’ailleurs l’atmosphère de la série belge LA TRÈVE avec des habitants peu sympathiques qui paraissent aussi effroyables que ce samouraï psychopathe. C’est sa complexité qui donne toute sa saveur à ce petit film qui joue aux grands.

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