Un texte signé Philippe Mertens

Hong Kong - 2006 - Pou-Soi Cheang
Titres alternatifs : Gau ngao gau
Interprètes : Edison Chen, Sam Lee, Lam Suet, Cheung Yiu Fai, Lam Kar Wah

asian-scans

Dog Bite Dog

Un homme (Edison Chen) effectue une traversée dans les soutes d’un cargo. Il débarque à HongKong, se rend immédiatement dans un restaurant, s’assied à une table et tente de déchiffrer le menu. Au hasard, sans comprendre un mot de ce qu’il a sous les yeux, il commande quantité de plats sur lesquels il se jette goulûment. Un couple âgé entre dans la salle. L’homme engouffre quelques bouchées de plus, se lève et abat sauvagement la femme de plusieurs balles avant de sortir, sous les yeux du mari. La police débarque rapidement sur les lieux et entame son enquête. Le tueur est repéré dans les environs par un flic dénommé Wai (Sam Lee). Plusieurs hommes se lancent dans une poursuite qui tourne rapidement au carnage. Un otage est abattu en pleine rue et un policier est égorgé sous les yeux d’un Wai impuissant.
Au moment de son arrestation, l’homme prononce quelques mots, incompréhensibles pour les enquêteurs. Il est emmené dans un véhicule de police mais parvient à s’échapper non sans avoir causé un violent accident. Le voilà blessé et errant dans une ville qui lui est inconnue. Il échoue dans une décharge publique et mate un homme qui viole une femme dans une sordide cabane au milieu des immondices. Il tue rapidement le malfaisant et prend la victime (Weiying Pei) en otage. Le syndrome de Stockholm va rapidement frapper celle-ci. Elle s’amourache de l’homme qui l’a débarrassée de son bourreau.
Une histoire parallèle se mêle à cette fuite. Le père de Wai est un flic tombé dans le coma des suites d’une rixe violente au cours de laquelle il a été blessé. Il est soupçonné d’être un ripou par la police des polices qui enquête sur toute sa famille. Wai est quant à lui un policier insoumis qui mène l’enquête à sa guise, sans égards pour sa hiérarchie. Sa confrontation avec le tueur l’emmènera jusqu’au Cambodge, pour le retrouver et se confronter à lui.
Les premières minutes du film se déroulent sans un mot. Tout d’abord, on découvre un homme dans la calle d’un bateau. On lui apporte à manger comme on nourrirait un pitbull enragé. L’atmosphère est pesante et angoissante, proche d’un pur film d’horreur (Pou-Soi Cheang a d’ailleurs réalisé en 2002 un opus dans ce genre : NEW BLOOD) loin de ce à quoi l’on s’attend de la part d’un polar Hongkongais. Autre élément intéressant, l’image est d’une grande qualité, sombre mais travaillée, parfaitement maîtrisée.
Dans la seconde scène, l’homme monte dans une voiture. L’ambiance reste lourde et les dialogues toujours absents. Cela continue dans le restaurant, jusqu’au meurtre. Le tueur se défoule, il est bestial dans ses actes. La chasse dans la ville est haletante, avec son exécution finale où l’un des poursuivants est tué gratuitement, après une courte prise d’otage dans une cafétéria. Les policiers sont confrontés à un défoulement de violence qui les déconcerte et qui va leur échapper. Après l’accident de voiture, c’est l’évasion de l’homme sans nom et son arrivée dans la décharge, avec ses personnages hauts en couleurs : un père et sa fille qui vivent dans l’inceste. Jusqu’alors, il était un chien fou et enragé. La femme va s’immiscer dans sa vie, s’imposer à lui et le transformer. Ils vont plonger ensemble dans la fuite. La violence continue mais notre tueur n’est plus le même.
L’autre « histoire » est plus classique, avec ses bons et ses mauvais flics, ses difficiles relations entre un père et un fils qui exercent le même métier. La rupture progressive de Wai d’avec sa hiérarchie et son acharnement à poursuivre l’homme vont de pair avec sa transformation en justicier sans frontières. Le scénario ne s’attarde guère sur les raisons de la mutation de Wai, d’abord épris de justice au point de devoir faire des choix très difficiles, puis émule de Charles Bronson dans UN JUSTICIER DANS LA VILLE. Il est certes confronté à une violence hors du commun, mais cela doit-il en faire à son tour une bête sans foi ni loi ?
L’autre protagoniste fait le chemin exactement inverse. Dès sa plus tendre enfance, dans les camps Cambodgiens, il est formaté pour tuer. Mais il va s’éprendre en moins de deux d’une femme, l’embarquer dans sa fuite, l’emmener au pays et lui faire un enfant.
Bien sûr, les personnages ont le droit d’évoluer, mais les ficelles sont peut être un peu usées pour réellement fonctionner : l’amour qui rend aveugle et le flic justicier…
Soit.
Ne jetons pas le film pour quelques « sentimentaleries » déplacées dans cet univers de brutes. Mais reconnaissons quand même que ces mutations un peu forcées des deux personnages principaux constituent le maillon faible du scénario.
Reste que ce DOG BITE DOG constitue une très bonne surprise, tant par le rythme soutenu de l’action que par le soin apporté à l’image. Ou encore par des scènes de combats d’une rare violence. Le final met lui un point d’orgue à ce polar noir et violent à souhait qui, malgré quelques petites bévues, demeure une belle réussite.


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