Dossier érotique d’un notaire

Un texte signé Éric Peretti

France - 1972 - Jean-Marie Pallardy
Titres alternatifs : Le Journal érotique d'un notaire, Soirées privées (remontage porno), Classé X (remontage porno)
Interprètes : Claude Sendron, Angela Hansen, Evelyne Scott, Jacques Insermini, Georges Gueret, Jean-Marie Pallardy

Après le succès inattendu de son premier film L’INSATISFAITE (1971), l’ancien mannequin Jean-Marie Pallardy décide de poursuivre son aventure dans la réalisation avec DOSSIER ÉROTIQUE D’UN NOTAIRE, projet amené par son ami Claude Sendron qui en jouera d’ailleurs le rôle principal.
Michèle habite dans un petit village de province avec sa famille. Lesbienne, elle vit une relation passionnée mais secrète avec Évelyne, une jolie bisexuelle ambitieuse. En effet, cette dernière fréquente assidûment Maître Sendron, le notaire du coin, sur qui elle espère mettre le grappin. Financièrement à l’aise et possédant une situation enviable dans la région, le bonhomme est malheureusement la cible de ragots et de rumeurs. Ayant passé la soixantaine, il est toujours célibataire et l’on raconte que ses soirées privées se transforment rapidement en partouzes. Plus grave, on lui confère une attirance pour les petits garçons. Pour faire taire ces commérages qui ternissent sa respectabilité, il décide d’épouser Évelyne, pour le grand bonheur de cette dernière. Face à cette décision qu’elle redoutait, Michèle, extrêmement jalouse, menace de se faire engrosser afin d’accuser le notaire. Pour Évelyne et Sendron, la jeune fille capricieuse devient un sérieux problème dont il va falloir se débarrasser…
Cette histoire s’inspire d’un tragique fait divers qui écœura une bonne partie de l’opinion publique au début des années 70. Une adolescente est retrouvée morte dans une petite commune du nord de la France, Bruay-en-Artois. Les soupçons se portent sur le notaire du coin et sa maîtresse qui seront rapidement mis en examen, mais au terme de plusieurs procès et d’imbroglios juridico-politiques, l’affaire sera classée sans suite et le coupable ne sera jamais confondu. Le fait que le notaire n’a presque pas été inquiété, alors qu’une famille modeste pleurait la perte d’une enfant, provoqua un fort sentiment d’impunité et d’inégalité entre les classes sociales. Bien qu’également ému par cette histoire, Pallardy n’en garde qu’une lointaine trame afin de bâtir une fiction érotique. Très loin du film réquisitoire qu’auraient réalisé Yves Boisset ou Costa-Gavras sur un tel sujet, DOSSIER ÉROTIQUE D’UN NOTAIRE connaîtra pourtant quelques déboires judiciaires en raison de la troublante ressemblance de Claude Sendron avec le juge Pascal, alors chargé de l’enquête. Sans être un acteur hors pair, Sendron, de part son physique de pervers pépère libidineux, apporte une présence malsaine et donne au notaire un air coupable des pires crimes que l’on puisse imaginer.
Hélas, le côté trop bricolé du film le rend parfois difficile à suivre, certaines coupes brutales donnent l’impression qu’il manque des passages et les dialogues, tous postsynchronisés, viennent renforcer l’aspect amateur de l’ensemble. De plus, le récit peine à trouver un rythme cohérent et l’ennui pointe souvent le bout de son nez. Quant aux scènes érotiques, elles provoquent plus le rire que l’excitation. Comme tant d’autres films de l’époque, ce DOSSIER ÉROTIQUE D’UN NOTAIRE aura le droit à son remontage pornographique, nous donnant ainsi à voir les fameuses partouzes du notaire, et circulera à nouveau sous différents titres.
Au final, il est bien difficile de défendre ce film tant sa forme brouillonne vient annihiler les bonnes intentions de son fond, à savoir peindre le portrait d’un petit village reclus sur lui-même où les commérages ont force de loi. Il ne reste à sauver que quelques plans hasardeux mais assez poétiques, le fait que le scénario aborde l’homosexualité féminine sans rentrer dans les poncifs du genre, et surtout, l’inénarrable tronche de vieux vicelard de Claude Sendron. Bref, rien de bien consistant à se mettre sous la dent pour le plus grand nombre, mais suffisamment tout de même pour occuper les amateurs de vieilleries un peu ratées car trop ambitieuses.
Notons pour en finir avec ce sujet qu’un téléfilm verra le jour chez TF1 en 2008, L’AFFAIRE DE BRUAY-EN-ARTOIS, avec Tcheky Karyo et Bernard Lecoq, qui traite du sordide crime originel, mais sans avoir le charme bordélique du film de Pallardy.


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- Article rédigé par : Éric Peretti

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