Ecrit sur le vent

Un texte signé Frédéric Pizzoferrato

Mélodrame typique du style de Sirk, ECRIT SUR LE VENT accumule les conventions du soap qui seront, par la suite, déclinées à l’infini dans des séries télévisées fleuve comme « Dallas ». La différence principale ne réside pas dans l’intrigue mais bien dans la mise en scène exubérante déployée par Sirk. Jadis moqué, le style emphatique du cinéaste (qui n’hésite pas à jouer la carte de l’excès dans la mise en scène, la gamme de couleur choisie) s’appuie sur le jeu des acteurs (de grandes stars hollywoodiennes de l’époque) qui déclament des répliques à la fois sérieuses, ironiques et prêtes à verser dans le comique involontaire.

Considéré jadis comme l’équivalent cinématographique d’une romance de gare, le cinéma de Sirk s’est vu depuis réhabilité par la critique quoique ECRIT SUR LE VENT ait déjà permit, à l’époque, à Dorothy Malone de remporter son unique Oscar. Il est par ailleurs amusant de constater qu’elle connut ensuite la célébrité avec l’un des premiers soap-opéras interminables de la télévision américaine, « Peyton Place » dont les ressorts narratifs empruntent beaucoup aux intrigues à tiroir de Sirk qui aime scruter les destinées entremêlées de ses protagonistes.

Mitch Wayne (Rock Hudson) a été élevé avec Kyle Hadley (Robert Stack), le fils d’un millionnaire du pétrole dans un ranch texan. La sœur de Kyle, Marylee (Dorothy Malone), est amoureuse de lui depuis toujours mais ses sentiments n’étant pas partagé elle passe son temps à boire et à draguer dans les bars. Kyle, lui aussi, est alcoolique et soumis à des sautes d’humeur. Il s’intéresse à une jeune femme, Lucy (Lauren Bacall), tout comme Mitch. C’est cependant le riche Kyle que Lucy finit par épouser après avoir été couverte de cadeaux. Mais la situation se dégrade : Kyle, qui se croit stérile, prend très mal la grossesse de Lucy et se persuade, après de perfides insinuation de Marylee, que l’enfant est de Mitch.

Ce scénario empli de pathos adapte un roman (de Robert Wilder) lui-même tiré d’une histoire vraie. Pourtant le réalisme n’est guère recherché par un cinéaste davantage intéressé par la théâtralité d’un récit qui se veut à la fois une critique sociale et une œuvre quasi psychanalytique empreinte de symbolisme. Celui-ci est parfois éhonté comme la fascination de la jeune nymphomane pour une représentation d’un derrick phallique ou ce tableau du pater familias tenant dans sa main ce même derrick écrasant toute la maisonnée de sa présence. Mais Sirk ne se soucie guère que certaines scènes soient manifestement irréelles (tournage en studio et transparences visibles inclus) et se concentre davantage sur ses personnages dont les destinées vont être magnifiée par une éclatante photographie et un flamboyant technicolor.

Du mélodrame à l’ancienne à déconseiller aux trop cyniques et à redécouvrir pour les autres.


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- Article rédigé par : Frédéric Pizzoferrato

- Ses films préférés : Edward aux Mains d’Argent, Rocky Horror Picture Show, Le Seigneur des Anneaux, Evil Dead, The Killer

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