Étrange Festival 2012
- 2012
C’est le cœur plein d’émotions que nous fêtons cette année la majorité du festival parisien : l’Étrange Festival. Ainsi, nous nous retrouvons encore une fois au Forum des Images, dans le centre de Paris, pour cette dix-huitième édition qui s’avère des plus pimentées et des plus réjouissantes. Nous nous répétons chaque année, mais c’est encore dans d’excellentes conditions que nous avons pu suivre ce festival maintenant devenu adulte.
C’est avec l’étonnant court métrage de Stéphane Blanquet CORNEE, que l’Étrange Festival s’ouvre cette année. Petit film d’animation très pertinent pour ses tests graphiques et ses déformations plastiques. C’est aussi dans la plus grande joie que le public découvre le dernier court métrage de Quentin Dupieux : WRONG COPS. Maître de l’improbable, le réalisateur de RUBBER nous offre ici, le premier segment de ce qui s’annonce être un futur long métrage. C’est le film du norvégien Morten Tyldum HEADHUNTERS, qui a l’honneur de lancer les festivités de cette dix-huitième année. Excellent thriller bourré d’humour décalé et présentant un scénario particulièrement bien construit. Notons que le film de Morten Tyldum a déjà remporté le prix du Jury au Festival International du Film Policier de Beaune.
Ce n’est pas moins de vingt-et-un films, programmés en compétition pour le prix du nouveau genre et le tout nouveau prix du public qui sont annoncés cette année. Lors de cette dix-huitième édition, le prestigieux prix, soutenu par Canal + cinéma, est décerné à HEADHUNTERS qui remporte aussi le prix du public. Ce double prix montre une certaine proximité entre le jury et le public, et révèle la cohérence de ce beau festival.
La programmation de la compétition long métrage ne s’arrête cependant pas là. Elle nous a aussi offert la possibilité de découvrir d’autres perles telles que le remarquable CITADEL de l’irlandais Ciaran Foy, qui propose un thriller urbain intelligent dans la lignée de HEARTLESS de Philip Ridley. Nous découvrons aussi le nouveau film de Ben Wheatley TOURISTES, réalisateur découvert l’an passé. Une confirmation de la qualité indiscutable de ce réalisateur anglais qui propose un road movie macabre et décalé. Le dernier film de Alex de la Iglesia, UN JOUR DE CHANCE se révèle être, sans surprise, d’une très bonne facture. Assurant un film brillant, rythmé et ambitieux, Alex de la Iglesia confirme son titre d’immense réalisateur. Le très attendu IRON SKY de Timo Vuorensola à lui aussi conquis le public de l’Étrange Festival avec une mise en scène sans faille et un scénario totalement improbable mais particulièrement maîtrisé. INSENSIBLES, de Juan Carlos Medina était sûrement l’un des films les plus attendus. Ce métrage espagnol, de coproduction française, nous entraîne dans le passé fasciste du pays à travers la vie d’un groupe d’enfants insensibles. Une très belle réussite qui confirme la place d’avant-garde de l’Espagne dans le cinéma de genre. Notons aussi, l’arrivée du fils Cronenberg au cinéma, qui signe l’excellent ANTIVIRAL. Dans la lignée réflective de son père, Brandon Cronenberg livre un pertinant premier long métrage qui pointe du doigt la starification et le système de consommation de notre société. On se retrouve alors dans un monde où l’on revend les maladies de certaines stars à la population pour qu’elle se sente plus proche de ses idoles. Noir et acerbe, l’essai est réussi pour le fils Cronenberg. Le coup de coeur de cette sélection restera BULLET COLLECTOR du réalisateur russe Alexander Vartanov, qui nous livre un film dense accompagné d’une sublime photographie. Un mélange entre Tarkovski et Truffaut, selon les propres mots du réalisateur, BULLET COLLECTOR est un voyage dans la décadence adolescente qui rappelle que la Russie a encore beaucoup de choses à dire au cinéma.
L’Étrange Festival nous fait cette année le plaisir d’insérer dans sa programmation une belle sélection de documentaires. On retrouve ainsi, trois documentaires musicaux. PRACTICAL ELECTRONICA de Ian Helliwell, consacré à Fred Judd ; BLANCK CITY de Céline Danhier qui nous propose un éclairage approfondi sur la No Wave et enfin, ROAD DOGS de Shane Aquino qui va suivre une tournée de trois groupes de Néo Métal aux États-Unis. Nous découvrons aussi, dans cette sélection de documentaires, ROOM 237 de Rodney Ascher, un film délirant qui propose un déchiffrage particulier de SHINING. MARINA ABRAMOVIC THE ARTIST IS PRESENT, de Matthew Akers et Jeff Dupre, est un documentaire consacré au travail de l’artiste serbe éponyme. Enfin, HOW TO START YOUR OWN COUNTRY, de Jody Shapiro, est un sublime documentaire sur le concept de micro-état.
Si, cette sélection de quelques documentaires à la programmation de cette dernière édition montre un certain désir futur de créer une rubrique plus dense au sein de l’Etrange Festival, nous ne pouvons que nous en réjouir et saluer cette belle initiative.
En cette année de fin du monde, le festival a sorti l’artillerie lourde, pourrait-on dire, en terme d’invité. C’est, en effet, l’immense réalisateur américain Kenneth Anger qui nous fait l’honneur de sa présence. C’est avec une superbe carte blanche que celui-ci nous fait le plus beau des cadeaux. Au programme, LE BANNI de Howard Hughes, LA GARCE de King Vidor, FREAKS, LA MONSTRUEUSE PARADE de Tod Browning et enfin, LE VOYEUR de Michael Powell. Le réalisateur français Jan Kounen était lui aussi présent pour une admirable carte blanche. On y retrouve programmés, LES 3 SUPERMEN TURCS AUX JEUX OLYMPIQUES, de Yavuz Yalinkiliç, le très culte BLOOD FREAK de Steve Hawkes et Brad F.Grinter, MORT SUR LE GRILL de l’incontournable Sam Raimi, le chef d’oeuvre de Dziga Vertov L’HOMME A LA CAMERA, et enfin l’inqualifiable monument cinématographique qu’est KOYAANISQATSI de Godfrey Reggio. En somme, deux selections très intéressantes qui ont permis de revoir des classiques et de découvrir des petites merveilles oubliées.
On notera aussi, le magnifique focus consacré au réalisateur et chef opérateur Ron Fricke. On a eu, ainsi, la possibilité de s’immerger dans l’univers de ce grand cinéaste dans les excellentes conditions du Forum des Images. Au programme le très bon BARAKA mais aussi SAMSARA, dernier long métrage du réalisateur que le public a pu découvrir en avant-première.
Le festival se clôture avec le remake de JUDGE DREDD tout simplement intitulé DREDD, réalisé par Pete Travis. Film proposé en avant-première, il remporte l’adhésion enthousiaste du public. Le long métrage de Travis s’attarde plus sur l’ambiance violente et décalée que le film original de Danny Cannon, et adopte une narration et une trame très simple, sensiblement identique à celle de THE RAID. Dans le fond, cette adaptation de JUDGE DREDD est bien plus proche du comics, ce qui est plutôt une bonne surprise.
C’est donc, encore une fois, une sublime année que l’Étrange Festival nous propose, avec une programmation extrêmement fournie et d’excellente qualité. En somme, si la fin du monde est bien cette année, nous aurons au moins eu un très beau festival. Il semble important de conclure par le titre de l’édito de cette dix-huitième année de l’Étrange Festival : NEVER SURRENDER !
Nous remercions bien chaleureusement, cette année encore, Xavier Fayet et toute l’équipe organisatrice, pour son accueil et pour ce festival qui nous ravi à chaque fois et leur souhaitons une bonne continuation. A l’année prochaine.
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides
Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.
- Article rédigé par : Quentin Mazel
- Ses films préférés :