Fantastic’Arts 2008

Un texte signé Patrick Lang

CLOVERFIELD utilise le même procédé mais pour s’attarder sur une bande de fêtards, qui sont témoins d’un Manhattan dévasté par un monstre qui détruit tout sur son passage. Tandis que la ville est évacuée, un jeune homme va tenter de retrouver son ex-petite amie, dont l’appartement se trouve dans le quartier des dernières attaques du monstre. Mais là où CLOVERFIELD innove c’est son côté spectaculaire. La bestiole énorme rappelle en taille le GODZILLA de Roland Emmerich, et les attaques sont tout aussi bien filmées et aussi destructrices qu’une bombe nucléaire. La scène de l’évacuation par un pont est vraiment à vous couper le souffle, le monstre détruit tout de quelques coups de queue à grand renfort d’effets spéciaux numériques mais néanmoins réalistes. C’est un grand moment de film de monstre et même de film catastrophe. CLOVERFIELD n’oublie pas quelques scènes plus chargées en suspense et intimistes: les scènes dans l’obscurité d’un métro ou bien le sauvetage de l’ex-petite amie dans un grand immeuble, dont il ne reste plus grand chose et qui tient à peine debout. Un mariage réussit entre petit film réalité et blockbuster.
Terminons avec les deux bijoux incontestés et incontestables du festival. Tout d’abord L’ORPHELINAT de Juan Antonio Bayona, film espagnol en co-production avec le Mexique. Décidément, l’Espagne est très bien représentée cette année, en nombre et en qualité, elle prend doucement mais sûrement la tête du cinéma de genre Européen. L’ORPHELINAT nous raconte l’histoire de Laura (Belén Rueda, excellente de sobriété et de justesse), qui emménage avec son mari et son enfant, dans l’orphelinat désaffecté où elle à passé sa jeunesse, pour l’ouvrir à nouveau. Son jeune fils ne tardera pas à ce faire des amis imaginaires (ou pas), avant de disparaître mystérieusement. Laura sait qu’elle ne pourra retrouver son fils qu’en perçants tous les mystères qui entourent ce vieil orphelinat, qui n’a pas encore livré tout ses secrets… La mise en scène est d’une grande classe en étant pourtant très sobre, résultat d’un montage rigoureux et maîtrisé, des mouvements de caméra fluides et cadrés avec une dextérité inouïe, une musique stressante, discrète mais bien présente, des acteurs habités par leurs personnages. Tout ces éléments additionnés et bousculés dans les scènes d’authentique angoisse, font de L’ORPHELINAT un véritable joyau du film d’épouvante. Citons les magnifiques explorations dans le bâtiment, la sublime séance de spiritisme, les deux ”chasses au trésor” (une plutôt amusante avec Laura et son fils, une bien plus effrayante, la mère toute seule avec portes secrètes et squelettes à l’appui). On pourrait comparer le style espagnol à celui bien rodé des Anglais. La grande époque de la Hammer n’est jamais bien loin, le gothique flamboyant et les performances envolées des acteurs continue à faire des émules, pour notre plus grand plaisir. Le jury et le public ne se sont pas trompés, L’ORPHELINAT ayant obtenu le grand prix de l’édition Gérardmer cette année.
Enchaînons avec REC de Jaume Balaguero (LA SECTE SANS NOM, DARKNESS) et Paco Plaza (LES ENFANTS D’ABRAHAM, ROMASANTA). Il obtiendra entre autre le prix du jury de cette année (ex-aequo avec L’ORPHELINAT) et n’a pas volé son titre. Un remake américain est actuellement en post-production, ce qui montre bien l’impact positif de ce succulent métrage, qui fit bondir une salle comble à maintes reprises. Le principe est exactement le même que les précédents CANNIBAL HOLOCAUST, PROJET BLAIR WITCH, DAIRY OF THE DEAD… Nous nous situons de nouveau embarqué dans une vision à la première personne, à l’instar de ses aînés. La grande différence, et pas des moindres, c’est le choix de recentrer l’action dans un immeuble en quarantaine, en huit clos. Une journaliste et son caméraman, accompagnent une équipe de pompiers en intervention, sans savoir qu’ils seront embarqués dans un véritable cauchemar. Ils assistent à des attaques des habitants de cet immeuble, qui sont visiblement atteints d’une rage incontrôlable (comme dans le bien connu 28 JOURS PLUS TARD). Quand ils veulent s’échapper, une quarantaine est mise en place et une poignée de survivants tentera de s’en sortir. On découvrira bientôt que l’origine de ce mal inconnu se situe dans les murs de cette prison mortelle…
La descente aux enfers que nous proposent Jaume Balaguero et Paco Plaza est tellement réaliste et dure, que l’on oublierait presque qu’il s’agit d’un film. Le crescendo qui s’installe nous prend à la gorge sans relâcher jusqu’au mot ”fin” salvateur. Les menaces extérieures et intérieures ne laissent aucune issue pour un ”happy-end”. Les différentes péripéties se feront dans le sang et les échanges violents de mots, de coups de feu. La caméra est tout le temps en mouvement, cela nous rapproche de l’hystérie que doivent ressentir les personnages. Les effets spéciaux sont limités au strict minimum, sans pour autant lésiner sur des litres et des litres d’hémoglobine déversés suite aux morsures. Le final, presque entièrement filmé en vision de nuit, sera riche en révélations, mais aussi en sursauts de peur proprement mortels pour nos nerfs! On restera volontairement discret sur ce moment anthologique de terreur, pour ne rien gâcher. Ce genre de frousse est devenu rare, avec les sorties récentes qui se concentrent souvent sur le spectaculaire au détriment du suspense, de la vraie peur. REC marie parfaitement ces deux aspects, des gerbes de sang éclaboussant nos visages terrifiés.
On sort généralement satisfait de la programmation du festival Fantastic’arts de 2008, malgré des métrages assez faibles. Ce qui est sûr, c’est que l’on est en droit d’attendre avec impatience le cru 2009, quand le lac de Gérardmer perdra à nouveau son bleu parfait pour virer au rouge écarlate.


GRAND PRIX
L’ORPHELINAT (El Orfanato) de Juan Antonio Bayona (Espagne/Mexique)

PRIX DU JURY ex-aequo
REC de/by Jaume Balaguero & Paco Plaza (Espagne)
TEETH de/by Mitchell Lichtenstein (Etats-Unis)

PRIX DE LA CRITIQUE
DIARY OF THE DEAD de/by George A. Romero (Etats-Unis)

PRIX DU JURY JEUNES DE LA REGION LORRAINE
REC de/by Jaume Balaguero & Paco Plaza (Espagne)

PRIX DU PUBLIC – L’EST REPUBLICAIN & LA LIBERTE DE L’EST
REC de Jaume Balaguero & Paco Plaza (Espagne)

PRIX DU JURY SCI FI – SCI FI JURY PRIZE
L’ORPHELINAT (El Orfanato) de/by Juan Antonio Bayona (Espagne/Mexique)

GRAND PRIX DU COURT METRAGE – BEST SHORT FILM
DANS LEUR PEAU de/by Arnaud Malherbe (France)

PRIX DU MEILLEUR INEDIT VIDEO – BEST “DIRECT” TO VIDEO FILM
parrainé par Mad Movies
DETOUR MORTEL 2 de/by Joe Lynch (Etats-Unis – USA)


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- Article rédigé par : Patrick Lang

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