Frissons d’outre-tombe

Un texte signé Frédéric Pizzoferrato

Grande-Bretagne - 1973 - Kevin Connor
Titres alternatifs : From Beyond The Grave
Interprètes : Peter Cushing, Donald Pleasance, David Warner, Angela Pleasance, Margaret Leighton, Jack Watson

La firme Amicus tenta, à la fin des années 60 et au début de la décennie suivante, de rivaliser avec les maîtres de l’épouvante anglaise, la Hammer. Plutôt que de revisiter les vieux classiques comme le faisait la concurrence, la Amicus se spécialisa pour sa part dans le filon “film à sketches”, genre bâtard si il en est, et livra une série d’anthologie comprenant le plus souvent quatre ou cinq histoires basées sur des nouvelles horrifiques. FRISSONS D’OUTRE TOMBE constitue leur septième long-métrage basé sur ce procédé, après quelques réussites comme LE JARDIN DES TORTURES, LE TRAIN DES EPOUVANTES, HISTOIRE D’OUTRE TOMBE et ASYLUM.
Cette fois, la firme adapte des contes de R. Chetwynd-Hayes (auteur de plus de 200 nouvelles – dont certaines seront plus tard reprises dans une autre anthologie horrifique, le moyen THE MONSTER CLUB – et d’une douzaine de romans), liant les différents récits par des intermèdes situés dans un étrange magasin d’antiquités (“Les Tentations”) tenu par Peter Cushing. Sur le modèle du personnage central du futur roman de Stephen King “Bazaar”, le vieil antiquaire semble être le Diable incarné, offrant à ses clients des objets maléfiques qu’ils sont incapables de refuser.
Le premier sketch reprend l’idée bien connue du miroir maudit abritant un être vampirique ayant besoin de sang pour revenir dans le monde des vivants. Le second récit fait intervenir une jeune fille un peu simple d’esprit et son père, prêt à aider par la magie noire un ancien soldat maltraité par son épouse. La troisième histoire se veut plus humoristique et conte les malheurs d’un couple terrorisé par un démon invisible. Une voyante viendra leur prêter main forte. Enfin, le dernier segment concerne une porte donnant sur une pièce secrète surgie du fond des âges et abritant un homme sanguinaire.
Le réalisateur de ces FRISSONS D’OUTRE TOMBE, Kevin Connor, signait là son premier long-métrage. Il devait ensuite obtenir une certaine reconnaissance critique et publique avec un trio d’oeuvrettes sympathiques inspirées par Edgar Rice Burroughs ( LE CONTINENT OUBLIE, LE SIXIEME CONTINENT, CENTRE TERRE SEPTIEME CONTINENT) auquel on ajoutera le similaire LES 7 CITES D’ATLANTIS et l’excellente parodie gore NUIT DE CAUCHEMAR. La suite de sa carrière se décline essentiellement à la télévision, même si on note encore pour le cinéma un très étonnant biopic consacré à MERE THERESA avec Geraldine Chaplin.
Bref, ce premier essai possède quelques intéressantes qualités même si les intrigues développées ne sont pas franchement originales. Un certain sentiment de déjà vu se fait donc sentir tout au long de ce métrage mais l’humour noir, bien amené, fonctionne la plupart du temps. Comme toujours avec ce type d’anthologie, les segments sont de qualité assez inégale mais, heureusement, dans le cas de ces FRISSONS D’OUTRE TOMBE, ils se situent tous au minimum dans une honnête moyenne. Le premier sketch est sans doute un peu faible et prévisible mais le second se révèle efficace et prenant tandis que le troisième, essentiellement axé sur l’humour, fonctionne agréablement. Le dernier volet possède, pour sa part, un beau travail sur les éclairages et les décors, très perceptible lors de la chute finale (au propre comme au figuré) particulièrement réussie et qui rappellera aux plus anciens le cycle de Corman consacré aux écrits d’Edgar Poe. Le casting rassemblé comprend évidemment quelques visages connus de l’épouvante et outre l’inévitable Peter Cushing, dans le rôle du maître de cérémonie, on y retrouve aussi Donald Pleasance (accompagné de sa fille Angela) et David Warner. Bref, du bon monde pour un spectacle très soigné et stylé, typique du cinéma d’épouvante anglais de cette époque, avant la déferlante plus brutale qui s’apprêtait à renouveler le genre via les beaucoup plus explicite EXORCISTE, MASSACRE A LA TRONCONNEUSE et autre LA COLLINE A DES YEUX.
Dans l’ensemble, FRISSONS D’OUTRE TOMBE constitue donc une sympathique collection de récits fantastiques qui prouvent qu’il est (était?) possible d’offrir un cinéma horrifique de qualité sans recourir à la grosse artillerie ni aux effets sanglantes à outrance.
Même si le film n’innove aucunement (y compris dans sa pirouette finale à vrai dire très attendue), il trouve naturellement sa place aux côtés des autres réussites du film à sketches de la Amicus, et en particulier des excellents HISTOIRES D’OUTRE TOMBE et ASYLUM. Définitivement recommandé pour tous les nostalgiques de cette époque révolue et pour les amateurs de films à sketches, un genre un peu négligé ces derniers temps ou, malheureusement, les réussites sont plus rares que les échecs!


Votre soif de lecture n'est pas rassasiée ?
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides


Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.

- Article rédigé par : Frédéric Pizzoferrato

- Ses films préférés : Edward aux Mains d’Argent, Rocky Horror Picture Show, Le Seigneur des Anneaux, Evil Dead, The Killer

Share via
Copy link