Dossierretrospective

Gamera contre Gyaos

Initiée en 1965 avec le liminaire GAMERA, la saga « kaiju » de la Daei Picture, lancée dans l’objectif avoué de concurrencer les GODZILLA de la Toho perdit rapidement ses éléments angoissants initiaux pour devenir un spectacle familial totalement inoffensif. Troisième volet de la série (qui en compte 8 réalisés durant l’ère Showa, soit entre 1965 et 1980, puis encore trois produits au milieu des années ’90 et un ultime chapitre, GAMERA THE BRAVE, daté de 2006), GAMERA CONTRE GYAOS témoigne, déjà, de l’infantilisation galopante de la franchise.

Largement inspiré par Rodan, le nouvel adversaire de Gamera s’appelle Gayos (en référence à son cri perçant) et ressemble à un ptérodactyle géant mâtiné de chauve-souris issu d’un volcan et capable de cracher des rayons laser destructeur. La créature apparaît tandis qu’un conflit oppose les paysans nippons à une société capitaliste décidée à exploiter leurs terres, sous-texte sérieux guère exploité mais propice à un message réconciliateur attendu peu avant le climax. Un jeune garçon prénommé Eiichi, attaqué par Gayos, est heureusement sauvé par l’intervention providentielle de la torture géante Gamera. Hélas, le combat tourne au désavantage de cette dernière dont une des pates est pratiquement sectionnée par son adversaire déchainé. Tandis que la tortue panse ses plaies, les humains imaginent, aidés par Eiichi, un plan désespéré pour vaincre le terrible Gayos.

Noriaki Yuasa (1933 – 2004) reprend son poste de metteur en scène, qu’il occupait déjà sur le premier GAMERA. Ayant cédé sa place à Shigeo Tanaka pour le second épisode, GAMERA CONTRE BARUGON, il revient sur ce troisième volet, tout comme d’ailleurs sur tous les suivants jusqu’au dernier, GAMERAK [sic !] (ou GAMEKA [re-sic !]), produit en 1980 et constitué essentiellement de stock-shots des précédents. Noriaki Yuasa se déclara d’ailleurs complètement satisfait de l’orientation infantile prise par la saga, n’ayant que peu d’appétence pour les « films de monstres » sérieux.

Ne disposant pas des moyens pécuniaires de la concurrence, la Daei limite les scènes de destructions massives et consacre un temps conséquents aux palabres des humains, menées par un insupportable gamin de six ans qui semble refléter le public visé par le long-métrage. Les effets spéciaux, pas très crédibles, restent cependant corrects pour un kaiju eiga de seconde division daté de 1967. L’ensemble se termine classiquement par la bataille attendue entre les deux créatures caoutchouteuse, suivie par une chanson atrocement kitsch dédiée au brave Gamera, protecteur des enfants.

Un demi-siècle s’étant écoulé, il faut aujourd’hui une bonne dose d’indulgence et de second degré pour apprécier un spectacle aussi outrageusement ringard mais, pour les nostalgiques des combats de catch entre figurants costumés, GAMERA CONTRE GYAOS reste dans l’ensemble divertissant à condition de laisser tout sens critique au vestiaire. Néanmoins, la plupart risque d’y rester totalement hermétique et de ne trouver leur salut que dans la touche « accéléré » de leur télécommande.

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