retrospective

Gamera le monstre géant

Au Japon, les monstres géants forment une institution et, derrière l’immense succès jamais démenti de Godzilla, les suiveurs se bousculent au portillon, affublés de patronymes exotiques comme Barugon, Varan, Rodan, etc. Toutes ces créatures, épigones du roi des monstres, connurent pour la plupart une existence éphémère et ne parvinrent point à s’imposer dans le cœur des zélateurs du Kaiju Eiga.
Pourtant, décidé à contrecarrer la suprématie de la Toho, qui règne sans partage sur le genre depuis GODZILLA en 1954, le studio rival Daiei lance, au milieu des années ’60, la première aventure de la tortue géante Gamera. Ce nouveau monstre gagne rapidement des adeptes, au point que six suites seront produites en autant d’années. Un film de montage fut également présenté en 1980 sous le titre GAMERAK (sic !). Après une longue éclipse, la bestiole revint sur les écrans pour une trilogie de haute volée, entamée avec GAMERA GARDIEN DE L’UNIVERS, sous la direction de Shūsuke Kaneko. Quelques années plus tard, un ultime long-métrage, destiné à un public juvénile, apparu sur les écrans : GAMERA THE BRAVE.
Revenir aux sources de cette populaire franchise s’apparente malheureusement à une déception tant la première aventure de la monstrueuse tortue souffre de la comparaison avec GODZILLA, en tout point supérieur.
L’écrasement d’un avion de chasse au cœur de l’Arctique cause une gigantesque explosion nucléaire qui réveille de son sommeil séculaire une tortue gigantesque. Les indigènes y reconnaissent la légendaire Gamera, venue tout droit de l’Atlantide engloutie. Apparemment invulnérable, Gamera peut absorber les flammes et les recracher sous forme de rayons dévastateurs. Son unique point faible réside dans son incapacité à supporter de très basses températures. Tandis que les militaires essaient de stopper Gamera, un gamin, Yoshio, tente, pour sa part, de la sauver.
Dernier Kaiju tourné en noir et blanc, GAMERA LE MONSTRE GEANT souffre terriblement de ses contraintes budgétaires et de son manque d’ambition. Le scénario, tout d’abord, se contente de singer GODZILLA dont il reprend toutes les péripéties : créature légendaire tirée de son sommeil par une explosion atomique, opposition des scientifiques et des militaires sur la manière de gérer le problème, destructions en série,…A cela s’ajoute des caractéristiques communes aux deux monstres: feu ravageur, cri strident, invulnérabilité, etc. Toutefois, si Gamera est envisagée comme une force destructrice, elle n’est pas, pour autant, considérée comme strictement maléfique mais s’apparente plutôt à une catastrophe naturelle. Le monstre s’attire même la sympathie d’un insupportable bambin, véritable plaie du Kaiju tenté par une juvénilisation effrénée afin de s’attirer les faveurs d’un public avide de monstre en peluche et grand consommateur de produits dérivés.
Au niveau des moyens investis, GAMERA LE MONSTRE GEANT s’apparente, hélas, à un parent pauvre du dinosaure atomique de la Toho : les effets spéciaux sont rarement convaincants, le costume de la créature ne fait guère illusion et les maquettes manquent de finition. Les passages de destructions massives sont par contre efficaces mais, hélas, peu nombreux. Heureusement, le rythme est enlevé en dépit des habituels babillages sans intérêt (Gamera surgit des glaces après quelques minutes et reste présente à l’écran une bonne partie du métrage, lequel ne dure d’ailleurs qu’environ une heure vingt, ce qui semble bien suffisant).
Le climax, au cours duquel la tortue est prise au piège d’une fusée puis envoyée vers la planète Mars, constitue cependant une bonne idée adroitement mise en images.
Dans l’ensemble, GAMERA se regarde sans déplaisir. Aujourd’hui terriblement daté, le long-métrage s’est paré d’un charme nostalgique agréable qui évite tout ennui même si le film ne soutient jamais la comparaison avec ses modèles. A voir par curiosité.

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