Hitokiri

Un texte signé Michaël Guarné

Japon - 1969 - Hideo Gosha
Titres alternatifs : Tenchu
Interprètes : Tatsuya Nakadai, Shintaro Katsu, Yujiro Ishihara, Yukio Mishima

Sorti la même année que GOYOKIN, un grand classique de Hideo Gosha, HITOKIRI fait figure de pièce maîtresse du jidaigeki, autrement dit du film historique dont l’intrigue se déroule dans le Japon féodal. Il réunit une belle brochette d’acteurs : Shintaro Katsu (l’incarnation de ZATOICHI), Tatsuya Nakadai (SWORD OF DOOM…) et Yujiro Ishihara, sorte de Elvis Presley nippon (son mémorial sur l’île de Hokkaidô accueille chaque année plus d’un million de visiteurs).
HITOKIRI narre la destinée de Izo (Shintaro Katsu), un guerrier paysan croulant sous les dettes qui croise la route de Takechi (Tatsuya Nakadai), un important samouraï du fief de Tosa. Bien conscient des fortes aptitudes physiques d’Izo, Takechi ne tarde pas à l’embaucher en tant que mercenaire. Sa mission : assassiner les opposants aux ambitions politiques de Takechi afin que son fief bascule du côté des loyalistes. Izo, devenu un ‘coupeur d’hommes’, rêve néanmoins de voler de ses propres ailes plus tard, ce qui inquiète de plus en plus Takechi…
HITOKIRI fait partie de ces films tellement ancrés dans l’histoire de leur pays qu’il faut avoir un minimum de connaissance sur le sujet afin de profiter pleinement du visionnage. En l’occurrence, des points de repères sur ces mouvements anti-shogounaux seraient les bienvenus avant de se lancer dans cette œuvre de Gosha. Les dialogues y sont très importants et leur abondance aura vite fait de perdre le non-initié à cette fin de période féodale.
Le réalisateur de GOYOKIN nous présente des personnages aux destins tragiques, Izo en tête. Le mot ‘tenchu’, soit ‘la punition divine’, qu’il prononce avant chaque meurtre est d’ailleurs lourd de sens. Il met en exergue la bêtise de toute guerre, quand la réalité équivaut au sacrifice de n’importe quel homme au profit d’une fictive et abstraite notion de victoire. Car Izo se bat, certes, mais ne fait qu’avant tout obéir. Il n’est que l’esclave d’une bataille qui n’est pas vraiment la sienne. On ressent réellement ce sentiment d’impuissance à l’écran, grâce au jeu passionné de Shintaro Katsu.
Comme Okamoto dans certains de ses films, Gosha fait voler en éclats les codes d’honneur et autres valeurs morales propres à la caste des samouraïs. Izo ne tue pas par principe et respect d’un soi-disant code, il n’est qu’un instrument de mort. Bien naïf, il pense accéder au rang de samouraï de par ses actions, sans se rendre compte que celles-ci sont mécaniques et vides de sens.
L’influence de HITOKIRI sur la production actuelle se fait encore sentir. Il suffit de voir le très barré IZO de Miike pour s’en rendre compte. Un film directement inspiré de celui de Gosha, qui reprend même certaines séquences comme la mort d’un personnage par crucifixion.
Avec HITOKIRI, Hideo Gosha livre à n’en pas douter l’un de ses films les plus aboutis et passionnants. Jouissant d’une belle photographie, brillamment interprété et doté d’un scénario complexe, ce jidaigeki reste une valeur sûre du genre.


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- Article rédigé par : Michaël Guarné

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