House of 1000 Dolls

Un texte signé Philippe Chouvel

Espagne, Allemagne, USA, Italie - 1967 - Jeremy Summers
Titres alternatifs : La casa de las mil muñecas, House of a Thousand Pleasures
Interprètes : George Nader, Ann Smyrner, Vincent Price, Martha Hyer, Maria Rohm, Yelena Samarina, Herbert Fux

Le docteur Stephen Armstrong et son épouse Marie, en villégiature à Tanger, rencontrent par hasard un ami dont la compagne Diana a disparu récemment. L’ami en question, Paul, finit par la retrouver dans un club privé appelé « la maison aux mille poupées » qui n’est rien d’autre qu’un bordel de luxe.
Démasqué, Paul est tué par les hommes de main de Felix Manderville, un illusionniste qui, avec l’aide de sa partenaire mentaliste Rebecca, dirige un réseau de traite des blanches. En couverture, Manderville et Rebecca sont en représentation chaque soir dans un night-club de la ville. C’est par ce biais que le couple repère les proies potentielles, des femmes dont le profil, jeunes, jolies et seules, permet de les kidnapper en toute impunité. Mais c’était sans compter sur la ténacité de Stephen Armstrong qui, après avoir appris le décès de Paul, va mener sa propre enquête…
Inédit en France, HOUSE OF THE 1000 DOLLS a été réalisé par un cinéaste ayant surtout œuvré pour la télévision, Jeremy Summers. En 1967, il est engagé par le producteur Harry Alan Towers en trois occasions pour des films d’aventures exotiques : LA VENGEANCE DE FU MANCHU, FIVE GOLDEN DRAGONS et donc HOUSE OF THE 1000 DOLLS.
Harry Alan Towers a bâti sa réputation en tant que producteur de films indépendants, avec une bonne partie de films d’exploitation. Il fit jouer sa femme, la très belle Maria Rohm, dans la plupart des films qu’il finançait, notamment dans quelques classiques de Jesus Franco comme L’AMOUR DANS LES PRISONS DE FEMMES, VENUS IN FURS, LE TRONE DE FEU et LES INASSOUVIES.
Harry Alan Towers s’offre ici l’immense Vincent Price dans le rôle du méchant. Malheureusement, l’acteur n’a dans ce film qu’un rôle secondaire (la vedette étant George Nader dans le rôle de Stephen Armstrong). Il faut savoir aussi que Vincent Price déclarera plus tard avoir été dupé par la production quant à la teneur du film. Selon lui, des scènes à caractère érotique furent rajoutées à son insu, et donc le scénario fut remanié sans son accord. Avec le temps, on se rend compte toutefois que les scènes dont il est question (une captive fouettée en sous-vêtements et un combat de catch féminin dans la boue, notamment) paraissent bien innocentes. Cela n’empêcha pas Vincent Price de renier HOUSE OF THE 1000 DOLLS.
George Nader est donc la « star » du film, un médecin se transformant en investigateur, sorte d’espion animé par un esprit de vengeance. L’espionnage lui sied d’ailleurs très bien, dans la mesure où cet acteur plutôt élégant fut la vedette de la série des JERRY COTTON produite en Allemagne durant les sixties (au total, huit films tournés entre 1965 et 1969, l’un des plus connus étant L’HOMME A LA JAGUAR ROUGE). Nader joua également les agents secrets dans THE MILLION EYES OF SUMURU de Lindsay Shonteff (autre production Harry Alan Towers), qui présente la particularité d’avoir été distribué dans les salles américaines à sa sortie en double-programme avec HOUSE OF THE 1000 DOLLS.
Celle qui joue Mme Armstrong dans le film, Ann Smyrner, fut remarquée dans quelques œuvres fantastiques de série B comme REPTILICUS et JOURNEY TO THE SEVENTH PLANET. Pour compléter le tableau féminin, Yelena Samarina compose avec force conviction la matonne sadique malmenant les infortunées prisonnières du réseau de traite des blanches. D’origine soviétique, cette actrice joua dans LA FURIE DES VAMPIRES au côté de Paul Naschy mais aussi dans quelques Jess Franco. Martha Hyer, la partenaire maléfique de Vincent Price, possède quant à elle une filmographie imposante, elle a tourné entre autres pour Robert Wise, Richard Fleischer, Billy Wilder (SABRINA), Vincente Minelli, Henry Hathaway ou encore Arthur Penn (LA POURSUITE IMPITOYABLE).
Enfin, l’amateur de bis aura peut-être reconnu, parmi les nombreuses et jolies « poupées » séquestrées, Kitty Swan, dont le moment de gloire fut son interprétation de GUNGALA, une sorte de Tarzanne, en deux occasions.
A la vision de HOUSE OF THE 1000 DOLLS, on se rend compte que le film hésite entre la série B ambitieuse et l’œuvre d’exploitation assumée. Au final, les deux styles se télescopent avec plus ou moins de réussite, aboutissant à une œuvre hybride alternant des scènes efficaces (comme la scène d’ouverture avec le cercueil ainsi que le spectacle d’illusionniste de Manderville et Rebecca) et d’autres en partie ratées (l’interrogatoire du photographe, au lit avec une prostituée, et son propos comique tombant à l’eau). L’action est souvent au rendez-vous, mais parfois de manière trop répétitive, avec une série de combats à mains nues et de poursuites impliquant Armstrong et les « gorilles » de Manderville de façon systématique.
On regrette que Vincent Price soit finalement relégué au second plan et que son talent soit si peu exploité. Quand on voit ce que l’acteur a pu accomplir dans des chefs-d’œuvre comme L’ABOMINABLE DOCTEUR PHIBES ou THEATRE DE SANG, sans oublier ses interprétations magistrales dans les adaptations d’Edgar Poe par Roger Corman, on se dit qu’un Vincent Price de ce niveau là aurait presque pu porter HOUSE OF THE 1000 DOLLS au rang d’une série B de haute facture. Mais le film ne brille que par moments, en mode alternatif, le reléguant au sein des nombreuses productions estimables mais pas remarquables de cette époque. Cela étant, avoir l’occasion d’admirer Vincent Price, même dans un second rôle, reste toujours un énorme plaisir.


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- Article rédigé par : Philippe Chouvel

- Ses films préférés : Femina Ridens, Les Démons, Danger Diabolik, L’Abominable Docteur Phibes, La Dame Rouge Tua 7 Fois

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