retrospective

Human Beasts

Un soldat de fortune (Paul Naschy) est engagé pour récupérer des pierres précieuses. Blessé par ses commanditaires, il trouve refuge dans une bâtisse habitée par une bien étrange famille… De mal en pis.
Paul Naschy réalisateur et scénariste commence EL CARNAVAL DE LAS BESTIAS comme
un film de yakuzas. Naschy interprête un mercenaire qui double l’organisation (pacifiste mais pas longtemps !) qui l’emploie pour une banale affaire de bijoux. L’anti-héros Bruno est un sale type qui n’hésite pas à trahir la femme qui l’aime et à buter son frère. Les gunfights sont honnêtement réglés (dans des ruines, notamment), ça saigne pas mal. Peut-être que Naschy exploitera plus complètement le genre gangster avec L’ULTIMO KAMIKAZE quelques années après, toujours en co-production avec le Japon. A propos, saisissant ce partenariat Espagne/Japon ! Naschy avait vraiment trouvé un bon truc pour continuer à réaliser ses films avec des budgets qui semblent très suffisants.
Comme souvent, l’auteur-acteur se réserve ici le beau rôle, en ce qui concerne ses relations avec la gent féminine. La japonaise est follement amoureuse de lui (ce qui nous vaut quelques scènes agréablement fleur bleue), les deux mignonnes de la maisonnée où il est recueilli sont prises d’une irrépréssible envie de se le taper. Quel beau métier, quand même ! Olivier Billiottet, dans l’excellent Monster-bis qu’il consacra au petit maître espagnol, s’en étonnait à juste titre, compte-tenu de son physique peu avenant (malgré ses pectoraux d’haltérophile sur le retour)… Magie du cinéma là-encore ! Son jeu a parfois aussi été remis en question. Toujours est-il qu’il s’acquitte ici encore fort bien de sa tâche. Son rôle, aussi limité soit-il, est parfaitement tenu. Techniquement, sa réalisation est tout aussi impeccable, avec quelques bons cadrages et une photo soignée du bon Alessando Ulloa, qui oeuvra notamment pour de grands noms du western comme Sergio Corbucci. Le style est beaucoup plus pro que celui du compatriote Jess Franco à la même époque. On n’a jamais l’impression que Naschy se moque du monde. La musique du générique elle-même, non signée, vaut l’écoute. Dansante et satanique ( !), elle évoque Ennio Morricone tendance HOLOCAUST 2000.
Le scénario, par son mélange des genres (polar violent puis angoisse à l’ambiance giallo pour les quelques meurtres), intéresse malgré une évidente baisse de rythme dans sa seconde partie (notamment avec l’enquête pénible de bras cassés du village, tout droit sortis d’une comédie). Bien sûr, il est naturel que le tempo du thriller d’atmosphère soit plus lent que celui du yakuza-movie, mais cela n’excuse pas que l’on se désintéresse du sort de Naschy alors que l’intrigue n’avance plus d’un poil.
La famille de dingues cannibales est bien campée. Ses rituels sont hérités d’une vie passée en Afrique. Le mal vient ici clairement d’ailleurs, sans peur de la caricature et du politiquement incorrect. Le chef de famille est assez classe (notamment déguisé en officier allemand), son jeu d’une sobriété bienvenue. Ses filles sont jolies et la domestique noire, qui l’est moins, diablement excitante quand même. Surtout quand elle se fait fouetter violemment par le bon docteur, pour son plus grand plaisir !
Quelque part, le thème du film rejoint celui de maints survivals américains à base d’anthropophages, tout en conservant un profond cachet européen (avec notamment cette épouse morte dont le souvenir hante la famille, comme dans un gothique italien). Aussi hystérique que les pires folies rednecks made in USA, par contre, l’incroyable scène où un gars se fait dévorer vivant par des porcs pendant que Naschy est au lit avec une cochonne tout aussi affamée… Peu de gore cependant sorti d’un bel égorgement final. Dommage !
Par contre la scène de repas aux convives déguisés, le « carnaval des bêtes », joue trop sur le registre du grotesque et de la pantalonnade (avec même un travesti !). Rupture de ton cette fois préjudiciable au film.
EL CARNAVAL DE LAS BESTIAS, quasi-remake par certains côtés de BLUE EYES OF A BROKEN DOLL, prouvera s’il en est besoin aux sceptiques que l’on a bien tort de cantonner Paul Naschy/Jacinto Molina à son rôle (fétiche il est vrai) de loup-garou. Le bougre est tout a fait capable d’autre chose !

Share via
Copy link