Ils

Un couple de bobos vit dans une immense demeure isolée en pleine forêt roumaine, à côté de Bucarest. Là, Clémentine enseigne dans un collège français pendant que son compagnon, Lucas, écrit son roman. Un soir, alors qu’ils sont couchés, Clémentine entend du bruit dehors… Il ne va pas leur falloir beaucoup de temps pour comprendre que ceux qui viennent d’assiéger leur maison ne leur veulent pas que du bien…
Pour démontrer les bienfaits de la civilisation, on a fait des films comme KING KONG qui glorifiait l’évolution technologique (l’animal le plus fort et effrayant du monde tombait du haut de l’Empire States Building). Puis, au moment de l’exode rural, c’est la campagne qui s’est montrée effrayante à travers les Survival. Aujourd’hui, alors que l’Europe de l’Est représente pour beaucoup de personnes un nouvel Eldorado, on tente de refreiner les envies de certains de s’exiler. Des films comme HOSTEL ou ILS tentent de nous prouver que l’on ferait mieux de rester bien sagement chez soi. De même, alors que nous sommes de plus en plus réticents à partager nos richesses avec les étrangers, on pourra aussi voir en la fin tragique des héros de ILS la juste punition infligée à ceux qui viennent voler le patrimoine des nouveaux pays en voie de développement. Une leçon infligée par les autochtones, ceux-là mêmes qui ont en charge la reconstruction de leur pays.
ILS est un peu un Survival à l’envers puisque nos héros ne sont pas perdus en pleine nature. Les deux réalisateurs préfèrent jouer sur la maison qui protége mais qui peut également se transformer en terrain miné pour ses occupants. Tel LES CHIENS DE PAILLE mais surtout ASSAUT de John Carpenter, ILS décrit la lutte pour la survie de ce couple banal et auquel chacun pourra s’identifier. On pouvait craindre au début que le métrage allait tomber dans le cliché qui court depuis ALIEN et qui veut que les femmes prennent systématiquement le pas sur l’homme. Heureusement les deux réalisateurs nous proposent des héros équilibrés qui prennent chacun à leur tour le rôle de meneur à un moment ou à un autre du film. Mine de rien, cette petite particularité permet de relancer la bobine à un moment crucial et de ne pas la laisser tomber dans le traintrain habituel du genre.
Avec à peine 80 minutes de métrage et son rythme épuisant, ILS aurait de toute façon eu bien du mal à tomber dans la morosité. Conscient que le film d’horreur est le genre par excellence pour les personnes désirant se faire remarquer dès leur premier film, David Moreau et Xavier Palud ont opté pour lui sans pour autant en être passionnés. Etonnamment, mais comme cela arrive finalement assez souvent, le résultat s’avère excellent. Cette réussite provient principalement du regard neuf que portent des gens non initiés au genre. Tout en respectant les codes de ce dernier, David Moreau et Xavier Palud parviennent à ne pas aligner les clichés les uns après les autres. Certes, nos héros ont la mauvaise manie de se séparer souvent et sont trop curieux… Mais, à chaque fois, une surprise est au rendez-vous et permet au film de ne jamais avoir un arrière-goût de déjà-vu.
Après HAUTE TENSION, ILS est une nouvelle incursion réussie du cinéma français dans l’horreur et démontre que la France peut produire de très bons films dans ce domaine, pour peu qu’elle soit capable d’oublier son douloureux héritage de films d’auteurs.