DossierFEFFS 2012review

Jack & Diane

Mettre en scène avec subtilité et sensibilité une relation amoureuse entre deux adolescentes est souvent une gageure. Bradley Rust Gray y parvient plutôt bien dans JACK & DIANE, signant une œuvre fraîche, toute en nuances.

Diane, jeune adolescente diaphane, presque éthérée, est perdue dans les rue de New York. Elle finit par rechercher de l’aide dans une boutique où elle rencontre Jack, sorte de garçon manqué. Dès le départ, Jack se sent physiquement attiré par la frêle Diane. Elle va la prendre sous son aile, lui faire découvrir la vie nocturne de la Big Apple. Au court de cette nuit, les deux jeunes filles se rapprochent, finissent par s’embrasser passionnément: l’amour naît.
Plus tard, Jack découvre que Diane est sur le point de déménager à Paris et, blessée, la repousse. Et Diane ne parvient pas à faire face à cette passion qui se fait dévorante. Maladroitement, les deux filles vont se battre pour faire de ce premier amour une histoire durable.

L’américain Bradley Rust Gray dont c’est le troisième long-métrage (il est le réalisateur de SALT production américo-islandaise sortie en 2003 à ne pas confondre le film bien plus célèbre de Phillip Noyce et de THE EXPLODING GIRL) a choisi comme actrices principales, Juno Temple et Riley Keough. La première est en plein ascension après avoir joué dans THE DARK KNIGHT RISES et le tout récent KILLER JOE de William Friedkin. La seconde, après avoir débuté une carrière de top model, participe ici à son premier film. Le duo fonctionne parfaitement, créant entre les deux personnages une alchimie subtile et réaliste.

On notera également l’apparition, quelque peu surprenant, de Kylie Minogue en lesbienne tatoueuse et tatouée.

Diane (Juno Temple) se présente comme une jeune fille calme et innocente, un peu étrange, animée d’une fougueuse passion intérieure. Sous des abords rudes, Jack cache un cœur fragile et meurtri. L’attirance et le heurt de leurs deux personnalités va enclencher le moteur de l’intrigue.

Découvrant sa passion pour Jack, un premier amour avec toute la violence et la désorientation que cela implique, Diane désespère de savoir si elle est aimée en retour. Désorientée, ne parvenant pas à exprimer ses sentiments par des mots, l’adolescente libère alors une créature dangereuse et sanglante. Liberté est laissée au spectateur de considérer les apparitions de ce monstre ensanglanté comme un rêve… ou une matérialisation des sentiments de la jeune femme. L’amour fou qu’elle éprouve la pousse à vouloir s’approprier son objet comme dans l’expression assez commune: «Je t’aime tant que je pourrais te manger».

D’autres séquences d’animations s’avèrent plus sibyllines. Réalisées par les studios Brothers Quay, elles sont, selon les dires du réalisateur et aussi scénariste, censées «dévoiler l’intérieur du corps de Diane, un monde de sang, des cheveux et des dents amenés à la vie par l’épanouissement de sa sexualité». Mais, intervenant ici et là dans le film, sans explications d’aucune sorte, elles peuvent toutefois laisser le spectateur quelque peu sceptique et dérouté.

L’érotisme des premiers émois, distillé avec mesure dans les scènes d’amour ou de masturbation, est plus esquissé que montré. Il laisse libre cours à l’imagination et à la sensibilité du spectateur sans lui jamais lui imposer une vision crue ou détaillée.

Plus qu’un énième film sur l’éveil à l’amour lesbien, Bradley Rust Gray réalise avec cet opus présenté au Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg, une ode poétique et sensible, une romance déclinée en touches délicates.

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