Joshua Grannell

Un texte signé Éric Peretti

- 2011

Alors que Peaches Christ s’est occupée de la soirée d’ouverture du LUFF en réalisant un show très réussi en guise d’introduction au film ALL ABOUT EVIL, c’est son réalisateur Joshua Grannell qui a reçu Sueurs Froides pour répondre à quelques questions.

Sueurs Froides : C’est ta seconde participation au Festival du Film Underground de Lausanne puisque tu étais déjà là en 2006. C’est d’ailleurs ici que tu as débuté l’écriture du scénario de ton long métrage.

Joshua Grannell : J’étais au LUFF il y a cinq ans avec un programme de quatre courts métrages. Trois d’entre eux formaient une sorte de trilogie parodique et horrifique où Peaches Christ et ses amis revivaient des films d’horreur mais dans leur propre univers de San Francisco. C’était un mélange de HALLOWEEN, MOMMIE DEAREST, LES GRIFFES DE LA NUIT et QU’EST IL ARRIVÉ À BABY JANE ? C’était des très petits budgets, je bossais dur pour financer les films moi-même. Le quatrième film est devenu ALL ABOUT EVIL. J’avais mon ordinateur portable et comme j’étais ici tout seul, j’avais beaucoup de temps pour écrire. Maintenant que je suis de retour à Lausanne, je me rappelle des scènes que j’ai écrites ici. J’ai ensuite continué en rentrant et le scénario complet m’a demandé deux ans de travail.

Sueurs Froides : Peux-tu nous parler un peu plus de ton show ?

Joshua Grannell : J’ai commencé les shows en live lorsque j’ai emménagé à San Francisco en 1996. Et j’ai créer le spectacle de la série Midnight Mass Movie en tant que Peaches Christ en 1998. J’ai grandi dans le Maryland, qui est l’état ou vit John Waters qui est l’une de mes idoles avec Frank N. Further du ROCKY HORROR PICTURE SHOW. Lorsque j’ai déménagé à San Francisco j’ai entendu parlé de ce groupe, les Cockettes., composé du drag queens psychédéliques, qui faisait leurs performances dans les cinémas. Ça m’a intrigué. J’ai donc créé un show où j’invitais le public à participer en venant déguisé. Je bossais pour Landmark Theatres qui est la plus importante compagnie de distribution de films indépendants aux États-Unis. La compagnie possédait cinq cinémas à San Francisco, et je dirigeais l’un d’eux. Lorsque je leur ai proposé l’idée du show live avant la projection d’un film, ils étaient nerveux à cause du nom Peaches Christ. Ils ont eu des lettres d’associations catholiques qui menaçaient de manifester et de boycotter le cinéma. Mais la compagnie, qui s’est bâtie sur les projections de minuit avec des films comme ERASERHEAD et PINK FLAMINGOS, m’a donné ma chance et un peu d’argent. Je pense qu’ils ne se doutaient pas que cela allait marcher. Leur première réponse était « le phénomène ROCKY HORROR PICTURE SHOW a quitté le centre ville, ça marche en banlieue pour les gosses qui ne savent pas quoi faire le week-end. Ici c’est San Francisco, les gens n’iront pas au cinéma à minuit le samedi. » Mais ça a marché, et chaque année il y a donc eu un peu plus d’argent et j’ai pu inviter mes idoles. C’est ainsi que j’ai fait venir Tura Satana, qui est devenu une bonne amie, Mink Stole, Elvira et John Waters. Au départ tout ce que j’avais c’était une perruque et un rêve… Au début c’était toutes les semaines durant l’été, soit 12 semaines avec un show différent chaque semaine. J’ai fait ça durant 12 ans. Faire un show différent à chaque fois, sachant que ça prenait de plus en plus d’ampleur me tuait. Maintenant on a ralenti et on fait un grand show environ une fois par mois.

Sueurs Froides : Quels sont les films que tu passes ?

Joshua Grannell : FASTER PUSSYCAT KILL ! KILL ! a été le premier film présenté au Midnight Mass. On avait organisé un concours de sosie de Tura Satana. On a aussi passé LE GRAND FRISSON en invitant l’actrice Cloris Leachman. À la Saint Valentin, on a fait venir Jennifer Tilly pour accompagner LE FILS DE CHUCKY. Pour la fête des mères, avec ma propre mère que nous avons travestie en Madame Christ, on a passé MOMMIE DEAREST. Apollonia Kotero est venue pour PURPLE RAIN… On a aussi énormément contribué à ce que SHOWGIRLS devienne un film culte, bien que personne ne nous crédite pour ça (rires).

Sueurs Froides : Pour en revenir à ALL ABOUT EVIL, c’était facile d’avoir Cassandra Peterson alias Elvira et Mink Stole au casting ?

Joshua Grannell : C’était facile de travailler avec Cassandra. Mais lui faire faire le film n’a pas été facile. Elle aime raconter que je l’ai harcelé jusqu’à ce qu’elle accepte, ce qui est en partie vrai. Elle n’aime pas le gore, elle aime les films effrayants, ou ceux qui font peur et rigoler en même temps. En lisant le script elle a détesté la scène des seins coupés et m’a demandé de la supprimer. J’ai refusé et on en a discuté, je lui ai dit que la scène passerait bien avec tout l’humour qui est autour. Lorsqu’elle a vu le film elle a été d’accord. Mink Stole a dit oui avant de lire le script car on était de bons amis. Et quand elle l’a lu, elle m’a dit « c’est quoi ce truc, vous voulez me faire courir et me coudre la bouche ! » Elle a la soixantaine maintenant mais elle s’est donnée à fond pour le film. John Waters n’est pas dans le film, mais il m’a donné de précieux conseils. Sa plus grande leçon a été lorsqu’il m’a dit que le script était trop long de dix pages et qu’il m’a conseillé de le revoir avant le tournage pour économiser de l’argent. Il m’a aussi dit ce qui ne marcherait pas.

Sueurs Froides : Bien qu’il s’agisse d’une petite production, le film est très soigné. Il a été tourné en vidéo ?

Joshua Grannell : Oui, mais on a beaucoup travaillé avec Tom Richmond, le directeur de la photo, pour que ça ressemble à un vrai film. Tom a fait beaucoup de tests et il a choisi une camera HD qui n’était pas de dernière génération car les couleurs étaient plus saturées. On voulait un look presque Technicolor, comme pour PHANTOM OF THE PARADISE par exemple. On a aussi beaucoup travaillé les films dans le film pour que ça soit le plus proche du 16mm.

Sueurs Froides : Outre de nombreuses références qui ne viennent nullement gâcher ton film qui existe par lui-même, j’ai souvent pensé à CECIL B. DEMENTED en le regardant.

Joshua Grannell : Beaucoup de gens font la connexion avec ce film, mais en l’écrivant je pensais plus à FEMALE TROUBLE. ALL ABOUT EVIL est aussi l’histoire d’une fille qui devient une psychopathe en se laissant guider par un égo démesuré. Et il y a un côté SERIAL MOTHER avec son intolérance envers certaines attitudes…

Lien vers le site de Peaches Christ
Merci à Joshua Grannell pour l’interview.
Merci à Patrick Suhner pour l’organisation de l’interview.
Merci à Luc pour ses photos.
Lire la critique de ALL ABOUT EVIL


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- Article rédigé par : Éric Peretti

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