La Chambre du Fils

Un texte signé Frédéric Vernichon

Espagne - 2006 - Alex de la Iglesia
Titres alternatifs : La Habitacion Del Nino
Interprètes : Javier Gutierrez, Leonor Watling, Sancho Gracia…

Pour commencer, ce long métrage de Alex de la Iglesia ne doit pas être confondu avec le très beau film homonyme de Nanni Moretti, fort justement palmé à Cannes en 2001. Rien à voir.
Huitième long métrage du cinéaste espagnol, à qui l’on doit les remarquables ACTION MUTANTE, LE JOUR DE LA BETE et MES CHERS VOISINS, LA HABITACION DEL NINO fut tourné dans le cadre d’une anthologie de thrillers pour la télévision espagnole ; ce qui explique qu’il soit inédit en salles.
La trame en rappelle bien d’autres (là est le but d’une anthologie quelque part) et quiconque pourra se livrer à un inventaire de ce genre de production, d’aujourd’hui ou d’hier tant le film de maison hanté a été et restera le pivot du cinéma fantastique. Ici, un jeune couple et leur nourrisson s’installe dans une ancienne maison bourgeoise d’un beau quartier de Barcelone. Assez délabrée, la maison n’a pas retenu longtemps ses différents propriétaires. Afin de rester en contact avec leur bébé, les parents installent une petite vidéo surveillance dans sa chambre. Ce n’est pas cher et çà rassure. Dans la nuit, le père se trouve réveiller. Il constate avec angoisse qu’un homme se trouve à côté du lit de son fils. Son premier réflexe est de se rendre dans la chambre du nourrisson, armé et décidé à en découdre le cas échéant. A son arrivé, l’homme présent sur la vidéo a disparu. Nul traces de qui que ce soit dans la maison. Le couple décide d’avertir la police, laquelle ne note aucune traces d’effractions. Les nuits se succèdent au rythme des manifestations. Le père, de plus en plus investi, décide de se plonger au cœur de ce mystère. Au risque d’y laisser sa santé mentale et son mariage…
Là n’est pas de savoir si ce point de départ en rappel d’autres mais savoir ce que les auteurs ont à nous proposer.
S’ouvrant comme pourrait s’ouvrir un film de Dario Argento (des gamins jouent à cache-cache, l’un d’entre eux entre dans une vieille maison, monte à l’étage, se regarde dans un flaque d’eau et disparaît, happé par une main venu de nulle part), laissant croire que nous nous sommes installer devant un slasher bien sanglant, c’est à tout autre chose auquel nous assisterons. LA CHAMBRE DU FILS choisit une voie beaucoup plus ludique que celle du film d’horreur qui tâche. Un choix judicieux, qui évite ainsi les clichés qui tendaient les bras d’une telle ouverture. Tout comme ce père de famille, nous nous retrouvons plongés dans une expérience angoissante (quel est cet homme qui se tient à côté du lit de mon fils quand je dors ?), et avec lui nous tenterons d’en savoir plus sur ces phénomènes pour le moins inhabituels et déstabilisants. Tel un jeu, dans lequel on aime avoir peur et dans lequel on continue pourtant d’avancer, la mécanique de LA CHAMBRE DU FILS fonctionne parfaitement parce qu’elle touche au plus près nos attentes de spectateurs : voilà un film qui nous conte une histoire et qui sait le faire.
S’il s’agit d’une commande (pour la première fois, De la Iglesia n’est pas l’auteur du scénario de l’un de ses films), du film ouvertement le moins personnel de son auteur, le plus américain dans sa forme pourrait-on même écrire, de la Iglesia s’est attelé à ce film avec le même soin, voir même avec une plus grande exigence que ses précédents. Pour la première fois, avec ce scénario tenu et tendu, on peut voir s’exprimer sa mise en scène sans qu’elle ne soit influencée par les fantaisies de ses scénarios. D’une rare sobriété, De la Iglesia exécute parfaitement sa tâche. Bien sûr, et comme nous sommes chez de la Iglesia, l’humour y a sa place, mais plus retenu, surtout dans les creux de l’histoire, par le biais de son personnage principal, beaucoup moins froid que ceux de grands nombres de films américains.
L’Espagne est définitivement le nouveau territoire du cinéma fantastique.


Votre soif de lecture n'est pas rassasiée ?
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides


Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.

- Article rédigé par : Frédéric Vernichon

- Ses films préférés :

Share via
Copy link