La Cité du Vent Damné

Un texte signé Patryck Ficini

France - 1985 - Limat Maurice

Lorsque son fils est enlevé par le « Vent Damné », un phénomène peu naturel qui capture hommes et bêtes dans son tourbillon, Delkaar le forgeron est désemparé. L’ami de son fils et une splendide amazone partent à sa recherche. Ils vont bientôt rencontrer les savants terriens à l’origine du Vent Damné et des catastrophes produites dans son sillage.
Maurice Limat fut longtemps moqué par les adorateurs fanatiques d’une science-fiction élitiste, dite de qualité. Du moins d’une qualité supposée et opposée aux délires aventureux de Limat et de nombre de ses confères du Fleuve Noir Anticipation.
L’ENTREPRISE DU REVE (à L’Oeil du Sphinx) a depuis remis les pendules à l’heure pour faire redécouvrir le charme de cet incroyable romancier pop qui commença sa carrière en 1935 chez Ferenzci.
Le bougre signa tout de même une bonne centaine d’ouvrages de SF au Fleuve Noir et bien une trentaine d’ANGOISSE (du bout des lèvres, certains critiques lui concèdent au moins d’avoir marqué quelques points dans l’épouvante à l’ancienne).
Il faut bien le dire : malgré un style indéniablement suranné (les méchantes langues le qualifieront volontiers de « vieillot » !), Limat savait écrire. Il écrivait en 1985 comme en 1935 peut-être, mais il savait pondre un roman qui se tenait de A à Z.
LA CITE DU VENT DAMNE, auquel on reprochera parfois un côté un peu trop contemplatif, est ainsi un bon roman de science-fantasy. Mélanger les genres, inclure de la science dans un univers médiéval, était bien dans la manière de Limat.
Pour lui, la SF était avant tout « la poésie du vingtième siècle », comme il le confie dans L’ENTREPRISE DU REVE. Effectivement, LA CITE DU VENT DAMNE est parsemé de moments très poétiques, esthétiques, qui ne peuvent laisser indifférent. Même si, c’était le risque couru, cela pourra faire sourire certains qui tiennent à voir en lui une sorte de Ed Wood de la SF littéraire française. Un Ed Wood avec des moyens alors (la littérature, pour qui sait écrire, ne connaît guère de limites), un Ed Wood avec un style bien réel aussi.
On pense parfois au beau LITAN de Jean-Pierre Mocky avec ces oiseaux de feu et ces poissons étincelants qui abritent les âmes de ceux qui ont été aspirés par le Vent Damné (les « Fluides »).
Maurice Limat parle tranquillement, sans provoquer, d’amitié entre hommes, de naturisme et de sexe à trois (l’Amazone et ses deux compagnons, l’un après l’autre, on n’est quand même pas dans un plan «double pénétration» non plus !). Reflet d’une autre époque où un écrivain pouvait encore défendre ces valeurs particulières dans un roman grand public.
Le cocktail science-fantasy prend bien, les belles scènes se succèdent (celle des oiseaux de feu dans la caverne est mémorable et d’une grande sensualité) … On peut juste reprocher à la CITE DU VENT DAMNE un rythme parfois un peu languissant, très « Limat » au fond.
Définitivement, voilà un bon Fleuve Noir !

« Un oiseau de feu… Dix oiseaux de feu.
Ils tournaient au-dessus de la belle dormeuse et de ses deux admirateurs. Ils offraient l’incomparable pureté de leur plumage que les étincelles sertissaient inlassablement de gemmes écarlates.(P. 71)

Après, c’est nettement plus chaud, sans jamais être porno, tant les volatiles excitent nos amis de leurs «ondes charnelles».


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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