La Meute à mes Trousses

Un texte signé Patryck Ficini

France - 1963 - Morris-Dumoulin G.
Titres alternatifs : Les Surhommes Chimiques

« Nous avions passé, les agents russes et moi-même, le plus clair de notre nuit à nous disputer un cadavre, comme de vulgaires charognards, pour la seule raison qu’il transportait dans ses tripes un tube contenant échantillon et formule d’une drogue nouvelle aux propriétés encore mal connues. » (P. 106)

G. Morris-Dumoulin est l’un des rares auteurs Fleuve Noir de la grande époque à connaître aujourd’hui des rééditions, comme récemment chez L’Arganier, quelques Peter Warren mêlés d’inédits. Peter Warren, le privé, un des héros récurrents créés par ce grand auteur de polars (et traducteur : Spillane, entre autres), avec Vic St-Val et Johnny Sanders, dont nous allons parler aujourd’hui avec LA MEUTE A MES TROUSSES, première aventure de l’agent-secret au Fleuve Noir et troisième après ses débuts aux Presses de la Cité.
En couverture, Sanders a la tête de Lino Ventura – le Gorille dans tous les esprits à l’époque, même si déjà remplacé par Roger Hanin, “notre” James Bond à nous dans les années 60 !
Comme souvent chez Morris-Dumoulin, l’usage de la première personne permet une identification aisée du lecteur au héros – un procédé très américain, pas si utilisé que ça au Fleuve, les San-Antonio à part, bien sûr. Sanders est un espion bien sympathique, pas porté sur le meurtre de sang-froid et assez humain comparé à nombre de ses confrères plus durs. Ce qui ne l’empêche pas d’assurer en cas de pépin.
La lutte qui l’oppose ici aux Russes, à Belgrade, tourne autour d’une fiole de drogue mystèrieuse avalée par un savant en même temps que son bulletin de naissance. Evidemment tout cela n’est qu’un prétexte à la bagarre.
D’où des rebondissements incessants et passionnants pour un véritable roman d’action, parfois macabre, qui évoque les premiers San-Antonio (avec une écriture différente) ou les meilleurs Yves Dermèze/Francis Richard à la SEG (comme DES BOSSES ET DES PLAIES).
L’humour, sans envahir, est toujours présent, comme lorsque Sanders tombe dans les bras d’une jeune nympho de 18 ans nue sous la douche avec lui alors que des flics yougoslaves à la gâchette facile débarquent !
Le final n’en est pas moins plus sérieux avec une vigoureuse dénonciation de l’usage des drogues par le monde de l’espionnage. Sanders est transformé en larve suite à une injection de sérum de vérité (scène saisissante), puis en superman insensible et assassin après l’absorbtion de la fameuse drogue secrète, un produit dopant qui augmente les réflexes et les capacités.

« C’était ça, la drogue superman de Sarbek : cette accélération de processus mentaux à partir de sensations également plus rapides, et combien plus intenses… » (P. 208)

Les dernières pages évoquent un homme futur, cyberpunk avant la lettre, ce qui fait songer que G.Morris fut aussi un brillant auteur de science-fiction avec ses nombreuses trilogies du Fleuve Noir.

« Nos regards se croisèrent et la tête de ma compagne s’inclina, lentement, jusqu’à mon épaule.
(…) je ne croyais pas me tromper en songeant que le proche avenir nous réservait encore des douceurs purement humaines, que n’apprécieraient plus, peut-être, les organismes cybernétisés de demain. » (P. 220)


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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