La Reine de la Magie Noire

Un texte signé Philippe Chouvel

Indonésie - 1979 - Liliek Sudjio
Titres alternatifs : Ratu ilmu hitam, Queen of Black Magic
Interprètes : Suzzanna, W.D. Mochtar, Sofia Waldi, Him Damsyik, Dorman Borisman

Murni est une jolie jeune femme habitant dans un petit village perdu au cœur de la forêt, dans une île d’Indonésie. Tandis que la population célèbre le mariage de Kohar avec Beida, Murni reste en retrait. En effet, elle était éprise de Kohar, et ce dernier prétendait l’aimer. Mais après s’être donnée à lui, Murni a appris que Kohar allait s’unir avec la fille la plus riche du village, d’où sa tristesse teintée de colère. Les festivités sont cependant interrompues lorsque Beida, victime d’hallucinations, perd la raison. Cet événement pour le moins inattendu est bientôt suivi d’autres phénomènes étranges : un homme se met à léviter, une tempête se lève, etc…
Un exorciste est appelé à la rescousse, mais un sortilège lui est fatal. Avant de mourir, il a le temps de dire aux villageois où se situe géographiquement la source du mal, sans évidemment rentrer dans les détails. Kohar use sournoisement de son influence pour désigner Murni comme étant la responsable de ces actes maléfiques. La foule conditionnée fait irruption dans sa maison et y met le feu. La mère de Murni périt dans les flammes, et la jeune femme est jetée dans un précipice, où elle est laissée pour morte. Murni a cependant survécu. Elle est recueillie par un ermite qui va la soigner et lui enseigner l’art de la magie noire, afin qu’elle puisse assouvir sa vengeance.
LA REINE DE LA MAGIE NOIRE appartient à un cinéma indonésien qui resta trop longtemps en retrait, d’abord pour des raisons politiques (le pays a souffert d’une double colonisation, par les Pays-Bas, et ensuite par le Japon), et aussi à cause de sa très faible production de films, comparée à la Chine, le Japon, l’Inde, voire les Philippines. Mais durant deux décennies (1970/80), l’Indonésie se distingua en proposant une flopée d’œuvres incroyables mêlant horreur, arts martiaux et religion. Un cinéma-bis haut en couleurs, excessif dans le gore, dont les histoires proprement hallucinantes repoussaient à chaque fois les limites de l’imagination. LA REINE DE LA MAGIE NOIRE ne fait pas exception à la règle, offrant au spectateur quelques scènes-choc : les veines d’un homme se mettent à gonfler avant d’exploser, l’héroïne s’enfonce dans le sol en tournant comme une toupie, un villageois s’arrache la tête et celle-ci s’envole pour mordre d’autres personnes…
La reine en question nous a quittés récemment (le 16 octobre 2008). Connue sous le simple prénom de Suzzanna, l’actrice était surnommée « la Reine des films d’horreur », genre dans lequel elle excella pendant une quinzaine d’années, comme dans THE SNAKE QUEEN, par exemple, où elle partageait la vedette avec l’autre star du cinéma indonésien : Barry Prima. Le public français a pu la voir dans SAMSON & DELILAH (1987), distribué en son temps en VHS, et plus récemment en DVD, sous le titre LA REVANCHE DE SAMSON.
En dehors de Suzzanna, on retrouve dans LA REINE DE LA MAGIE NOIRE un acteur familier du cinéma de genre indonésien : W. D. Mochtar. Il a joué en maintes occasions avec Barry Prima, notamment dans la série des JAKA SEMBUNG (tirée d’une bande dessinée), connue chez nous sous l’appellation LE GUERRIER. Liliek Sudjio, le réalisateur, est par contre beaucoup moins connu, et n’a pas la même aura, ni le talent, d’un Sisworo Gautama Putra ou d’un Tjut Djalil, par exemple. Moins délirant que LE JUSTICIER CONTRE LA REINE DES CROCODILES, LE GUERRIER ou VIRGINS FROM HELL, le film de Sudjio n’en est pas moins agréable et représentatif du cinéma-bis indonésien de l’époque. En dehors de ses passages gore outranciers, notons une très jolie scène lorsque Murni s’entraîne à la nuit tombée, et que l’on voit sa silhouette se découper en ombre chinoise sous la pleine lune. Enfin, les publivores reconnaîtront, au détour d’une scène, la musique de la pub OBAO des années 80.


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- Article rédigé par : Philippe Chouvel

- Ses films préférés : Femina Ridens, Les Démons, Danger Diabolik, L’Abominable Docteur Phibes, La Dame Rouge Tua 7 Fois

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