retrospective

La Saga de los Dracula

Une jeune femme enceinte, héritière des Dracula, rejoint le château de sa famille avec son mari. Ce qu’elle ignore, c’est l’attente tout particulière de ces vampires à l’égard du petit à venir…
On aime parfois à se moquer de Léon Klimovsky, argentin qui a fait une bonne partie de sa carrière cinématographique en Espagne. Certains plaisantins, comme Jean Tulard dans son dictionnaire, se demandent même s’il n’aurait pas dû rester fidèle à sa première profession… de dentiste !
Les amateurs de bis, eux, le retiennent pour son travail dans le western européen (pas très excitant ou novateur, certes, mais correct) et surtout pour sa participation à l’aventure du fantastique espagnol. Avec, notamment, le très réussi FURIE DES VAMPIRES et ses superbes ralentis, mais aussi avec LA SAGA DE LOS DRACULA.
Produit par celle que l’on surnomme parfois la « Hammer espagnole », la Profilmes, voici un étonnant film de vampires. LA SAGA est réalisé avec soin. L’éclairage, la photo, mettent bien en valeur décors et personnages. Il est évident que techniquement, Klimovsky aurait pu oeuvrer pour la « vraie » Hammer s’il avait été anglo-saxon.
LA SAGA DE LOS DRACULA est original, avec sa famille de vampires aux sentiments profondément humains, vouée à la tristesse et à la solitude, et surtout obsédée par la transmission des caractères héréditaires de leur race. Le sang occupe une telle place dans la mythologie vampirique qu’il aurait été étonnant que les liens qu’il tisse entre ascendants et descendants, ne soient jamais exploités. La consanguinité forcée des Dracula aboutit ici à un monstre, cyclope et dégénéré, qui évoque un peu le gamin difforme de PHENOMENA. Raison de plus pour eux de renouveler leur sang. Le premier Dracula, Vlad Tepes l’empaleur, est évoqué mais c’est avant tout de ses héritiers qu’il est question ici.
ROSEMARY’S BABY a inspiré bien des films (L’ALLIANCE INVISIBLE de Sergio Martino et sa messe noire démentielle, L’OSCENO DESIDERIO avec Marisa Mell s’il vous plait, etc). L’idée de génie est ici d’appliquer le concept (l’angoisse d’une future mère, l’attente de la naissance d’un enfant prédestiné par un groupe occulte) à un tout autre genre que le film démoniaque.
Malgré un rythme un peu languissant parfois (tout le début passe lentement), LA SAGA DE LOS DRACULA captive par la grâce d’un très bon scénario et d’une interprètation hors pair, à commencer par le patriarche Narciso Ibanez Menta et la sexy Helga Liné, bien connue des amateurs de l’euro-spy des sixties. Diable, quelle James Bond girl elle aurait fait !
Mais surtout on retiendra la véritable performance de la jeune héroïne du film. Tina Sainz est littéralement transfigurée à la fin de sa grossesse, pâle, maladive (vampirisée de l’intérieur par son bébé !), enlaidie. Il faut la voir aussi, à demi folle, massacrer les membres de sa famille à coups de hache après avoir déjà poignardé son mari quelques mois auparavant.
Les toutes dernières images de LA SAGA DE LOS DRACULA choqueront certains par leur crudité. C’est là que l’on apprend si la malédiction génétique s’est ou non transmise au nouveau né, et c’est stupéfiant.

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