L’Adolescente

Un texte signé Philippe Chouvel

Italie - 1976 - Alfonso Brescia
Titres alternatifs : La gioventù è bella, Sweet Teen
Interprètes : Tuccio Musumeci, Daniela Giordano, Sonia Viviani, Raffaele Sparanero, Dagmar Lassander, Malisa Longo, Aldo Giuffrè

Vito Gnaula, la quarantaine, quitte le Nord de l’Italie pour s’installer en Sicile. Il tombe rapidement amoureux de la pharmacienne d’une petite ville. Mais la belle Grazia s’avère être la fille de l’homme le plus riche de la région, Salvatore Serritella. Elle n’héritera de son père que si elle reste vierge jusqu’à son mariage, ou du moins si elle arrive à lui faire croire. Car en vérité, Grazia est volage, elle a d’ailleurs une liaison fougueuse avec un certain Antonio, un homme marié à une mégère. Grazia décide d’épouser Vito par intérêt. La chance lui sourit d’autant plus qu’à la suite d’une dispute entre Vito et Salvatore, ce dernier meurt d’un infarctus. Grazia se retrouve à la tête d’un empire financier constitué notamment d’une entreprise florissante d’import/export, qu’elle partage avec son mari, promu directeur. Mais ce partage reste dans un cadre professionnel, car au niveau du privé, Grazia se refuse à Vito. Prétextant des troubles psychologiques, elle interdit fermement à son mari de lui faire l’amour. Le pauvre Vito est contraint de se réfugier dans les bras de sa secrétaire Katia, une rousse incendiaire originaire d’Union Soviétique, à son siège central de Rome. Jusqu’au jour où la nièce de Grazia, Serenella, débarque dans la propriété du couple et s’y installe. La jeune fille ne tarde pas à séduire son oncle. Comment celui-ci va réagir ?
La sexy-comédie est née en Italie, et le pays en a produit un grand nombre, essentiellement dans les années 70. Une marque de fabrique due au savoir faire de quelques réalisateurs comme Mariano Laurenti, Nando Cicero et Michele Massimo Tarantini. Mais bien d’autres cinéastes transalpins se sont essayés au genre, parmi lesquels Alfonso Brescia. Cet artisan du cinéma bis a réalisé une cinquantaine de longs métrages durant sa carrière, entre 1964 et 1995. On lui doit pas mal de westerns et de polars, ainsi que des péplums (GOLDOCRACK A LA CONQUETE DE L’ATLANTIDE), des films d’aventures (LES AMAZONES FONT L’AMOUR ET LA GUERRE, SUPERMEN CONTRE AMAZONES) et de science-fiction (LA BATAILLE DES ETOILES, LA BESTIA NELLO SPAZIO), sans oublier des gialli (UN JOLI CORPS QU’IL FAUT TUER, LE MANOIR AUX FILLES). Avant de terminer sa carrière avec quelques œuvres érotiques de troisième zone, le cinéaste n’aura pas manqué de passer par la case (quasi-obligatoire) de la sexy-comédie. Il en réalise trois en 1975 et 1976, les trois mettant en vedette la toute jeune Sonia Viviani qui, après des débuts prometteurs dans le très sérieux LUCIA ET LES GOUAPES, bifurquera vers la sexy-comédie, avant de tourner avec d’autres réalisateurs comme Bruno Mattei, Umberto Lenzi (L’AVION DE L’APOCALYPSE) ou Luigi Cozzi (LES AVENTURES D’HERCULE).
Sonia Viviani est donc la très séduisante « adolescente » de ce film (bien qu’elle fût majeure au moment du tournage). Elle est entourée d’autres femmes plus mûres et tout aussi ravissantes, des figures incontournables du cinéma de genre de cette époque, avec en tête Daniela Giordano dans le rôle de Grazia. Authentique sicilienne, cette superbe brune qui fut Miss Italie en 1966 tournera ensuite pour Dino Risi et Mario Bava, entre autres. Dans des seconds rôles, on retrouve avec grand plaisir Dagmar Lassander et Malisa Longo (trop brièvement, hélas, pour la seconde).
Comme souvent dans la sexy-comédie, les femmes sont très belles, et les hommes assez laids. L’ADOLESCENTE ne fait pas exception à cette règle, puisque l’infortuné Vito Gnaula est campé par l’insipide Tuccio Musumeci, un petit moustachu s’évertuant à grimacer tout au long du film. A noter, cependant, l’apparition vers la fin du film d’Aldo Giuffrè, dans le rôle d’un policier, lors d’une scène à mi-chemin entre le vaudeville et le surréalisme. Aldo Giuffrè, décédé en 2010, eût une carrière longue de cinq décennies. Il tourna pour Mario Monicelli, Steno, Roberto Rossellini ou encore Vittorio De Sica dans les années 50, et croisa le comique Toto en plusieurs occasions durant cette même période. Plus tard, on le verra notamment dans « Le bon, la brute et le truand ».
Si L’ADOLESCENTE donne l’occasion d’admirer les plastiques impeccables de Daniela Giordano, Sonia Viviani et Dagmar Lassander, et si Alfonso Brescia ne manque pas l’occasion de s’attarder en gros plans sur les petites culottes de Sonia Viviani, L’ADOLESCENTE n’est pas pour autant une sexy-comédie de haute volée. L’érotisme reste léger, et l’humour ne vole pas très haut. Bien sûr, ce genre de comédies ne fut pas réputé pour sa subtilité, mais Alfonso Brescia paraît assez emprunté, livrant un long métrage plutôt décousu, et alignant une suite de séquences de qualité inégale. Dans la dernière partie, le réalisateur force le trait de la comédie à outrance, le film basculant dans la farce grossière, à la limite du théâtre de boulevard.
Il est cependant intéressant de constater qu’à une époque pas si éloignée de la notre, on pouvait réaliser des films tournant autour de l’inceste sans choquer le moins du monde, sur le mode de la dérision, alors que cela paraîtrait impossible aujourd’hui. En cela, L’ADOLESCENTE témoigne d’une époque complètement révolue, d’un temps où la censure n’interdisait pas tout ou presque, et où le « politiquement correct » n’était pas de mise.


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- Article rédigé par : Philippe Chouvel

- Ses films préférés : Femina Ridens, Les Démons, Danger Diabolik, L’Abominable Docteur Phibes, La Dame Rouge Tua 7 Fois

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