retrospective

Le Créateur De Monstres

Au début des années 40, la PRC est un petit studio en vogue, spécialisé dans les séries B, qui compte à son actif pas mal de films respectables comme THE DEVIL BAT avec Bela Lugosi ou bien JUNGLE MAN avec Buster Crabbe et ce, malgré un nombre très restreint de stars sous son étendard, à l’image d’un Ralph Morgan en fin de carrière.
Devant la concurrence accrue des autres petits studios ainsi que des géants comme la RKO, la structure s’est vue racheter dès 1943 par un magnat de l’industrie afin de se remettre à flot.
C’est à cette période-là que sort THE MONSTER MAKER, un thriller horrifique qui a la lourde charge de relancer la PRC dans la course.

Le Dr. Markoff (J. Carrol Naish) vient de mettre au point une formule chimique pour maîtriser l’acromégalie, une maladie qui provoque une affreuse distorsion faciale. Sans aucune once de morale, le scientifique n’hésite pas à l’inoculer au pianiste Anthony Lawrence (Ralph Morgan) afin que ce dernier oblige sa fille Patricia (Wanda McKay) à se marier avec le terrible Docteur, en échange d’un antidote…

Visiblement conscient de son budget plus que serré et d’un scénario peu épais, le réalisateur San Newfield articule son récit autour de la psyché du Dr. Markoff brillamment interprétée par J. Carrol Naish (il a été nominé pour un award l’année précédente pour SAHARA) et du face à face entre ce scientifique fou et sa victime interprétée avec brio par Ralph Morgan. Le film s’articule donc autour de l’interprétation de ces deux acteurs, grâce à des rôles taillés sur mesure pour eux.
De fait, le scénario met en lumière les très nombreuses facettes sombres des protagonistes, notamment celles du Dr Markoff qui devient tour à tour tortionnaire machiavélique et victime d’un amour impossible suite au décès de son épouse…

Certes, ce parti pris artistique ne permet pas à THE MONSTER MAKER de gagner en sensationnalisme comme son titre peut l’indiquer, mais Sam Newfield contrebalance aisément ce petit “défaut”, en jouant sur des effets spéciaux plutôt bons, comme le visage défiguré du malheureux Anthony Lawrence, ou au travers des ambiances macabres plutôt réussies.
A côté de ça, le metteur en scène tente, comme il le peut, de respecter son cahier des charges horrifique, en mettant notamment en avant un gorille particulièrement agressif, résultat des expériences de Markoff. Evidemment, la ficelle scénaristique de l’apparition du singe reste assez grosse (ça ne fait pas avancer l’histoire…), mais elle a au moins a le mérite d’être parfaitement assumée en amenant de l’action.

De même, la production se paye le luxe d’avoir dans son casting une autre star aux côtés de Ralph Morgan et J. Carrol Naish en la personne de… Ace The Wonder Dog ! Un berger allemand qui a fait les beaux jours de la RKO quelques années auparavant pour contrer le succès de RINTINTIN chez Warner… Ici aussi, Sam Newfield joue à fond la carte de l’entertainment en faisant un face à face chien / gorille très convenu, mais hautement énergique. Une manière habile de ne pas focaliser la totalité du film sur le personnage du Dr Markoff et de ne pas faire tomber le spectateur dans une profonde léthargie…
Malgré ces petits remplissages scénaristiques, THE MONSTER MAKER possède un petit charme désuet franchement attractif et une étonnante énergie, ce qui était inespéré compte tenu de la faiblesse de son budget et de sa maigre trame narrative. Le réalisateur a réussi tant bien que mal à tenir la barre de ce projet au travers d’un film plus que correct, à défaut d’être passionnant.

En définitive, THE MONSTER MAKER s’avère donc être une petite série B sympathique mais qui ne se démarque malheureusement pas tellement des productions passées issues de la PRC. Le métrage se suit avec plaisir, mais il ne marque pas les esprits comme l’escomptaient les nouveaux cadres du studio en cette année 1944. La PRC mettra d’ailleurs la clé sous la porte trois petites années plus tard…

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