Le Livre De La Jungle

Un texte signé Vincent TRAJAN

Quand on parle du LIVRE DE LA JUNGLE, difficile de ne pas penser au long métrage de Disney avant même le classique de Rudyard Kipling. Pourtant, on a tendance à oublier qu’avant le célèbre dessin animé des 60’s, il y a eu en 1942, une première adaptation du recueil de nouvelles de Kipling, – bien évidemment – intitulée LE LIVRE DE LA JUNGLE.
Sorti au début des 40’s sous la houlette de la compagnie de production Alexander Korda Films (LE ELEPHANT BOY, VOLEUR DE BAGDAD…) très en vogue à ce moment-là, LE LIVRE DE LA JUNGLE se place très vite comme une grosse co-production audacieuse entre le Royaume-Uni et les Etats-Unis puisqu’en plus d’être réalisé en Technicolor, c’est en Afrique et en Inde que le tournage doit s’effectuer et ce, dans un contexte international très difficile (nous sommes alors au beau milieu de la seconde guerre mondiale).
Malgré tout, le tournage du LIVRE DE LA JUNGLE se passe plutôt bien (même si des scènes initialement prévues en Inde seront filmées en studio) grâce au professionnalisme de Zoltan Korda (le frère du producteur Alexander Korda) qui connaît un succès fulgurant depuis son ALERTE AUX INDES de 1938 et LE VOLEUR DE BAGDAD en 1940.
il faut dire aussi que le réalisateur en est à sa quatrième collaboration avec l’acteur “exotique” Indien Sabu (Mowgli) qu’il connaît bien (il l’a dirigé sur ELEPHANT BOY, ALERTE AUX INDES, LE VOLEUR DE BAGDAD et LE NARCISSE NOIR) et qu’il a l’habitude de travailler vite et bien. Du coup, LE LIVRE DE LA JUNGLE qui se voulait à la base comme une adaptation fidèle du livre de Kipling, va garder cette ligne directrice jusqu’au bout et prendre ainsi la forme d’un film d’aventure respectueux du matériau d’origine.
Et comme toute super production digne de ce nom, le long métrage de Zoltan Korda est structurellement impeccable et visuellement superbe grâce à la photographie du tandem Lee Garmes / W. Howard Greene et aux décors d’un certain… Vincent Korda, qui n’est autre que le troisième larron de la famille Korda engagé dans ce film !
Et même si le scénario Laurence Stallings (d’après Rudyard Kipling, bien sûr) reste parfois assez naïf, la famille Korda réussit le tour de force dans un final apocalyptique d’insuffler au film un message fort en pointant du doigt le nihilisme et les travers de la civilisation du genre humain qui forceront le jeune Mowgli à préférer la jungle.
Mais qu’on ne s’y trompe pas : LE LIVRE DE LA JUNGLE n’est pas un pamphlet moralisateur et philosophique ! Il se veut tout d’abord comme un long métrage d’aventure et familial qui en met plein la vue. A ce titre, même si les animaux ne sont pas toujours au premier plan, les apparitions de Shere Khan, Bagheera, Baloo, Hathi et Kaa sont visuellement excellentes, même si certains sont clairement en carton-pâte (c’est assez flagrant pour le crocodile).
De même, les décors de la cité perdue amène au long métrage un aspect majestueux en forme d’invitation au voyage qui, pas loin de soixante-quinze ans après, laisse encore rêveur.
Voilà un grand classique à (re)découvrir !