retrospective

Le Virginien Saison 6 volume 1

Et voici une nouvelle livraison en 10 épisodes format long-métrage (74 minutes) de l’increvable série western des sixties.

Bronson, âgé de 45 ans, joue à nouveau les guest star pour « The Reckoning / L’homme qui nous a donné». Il campe Harge Talbot, le chef d’une bande de bandits réfugiés au Mexique qui désirent se venger du Virginien. Ce-dernier aurait « donné » les hors la loi sept ans plus tôt après un hold-up ayant mal tourné. Après avoir enlevé Elizabeth Grainger, Talbot attire le Virginien dans un piège. Alors que son épouse s’apprête à accoucher, Talbot oblige Elizabeth à l’assister et décide de tuer le Virginien, lequel tente de le persuader de son innocence. Un épisode réussi, dominé par l’interprétation d’un Bronson pas aussi méchant qu’il ne le parait de prime abord. Décidé à changer de vie à la naissance de son enfant, il reste prisonnier de son existence de hors la loi tandis que le Virginien, très en retrait, passe la majeure partie de l’épisode prisonnier dans une étable et tente de démasquer le véritable coupable. Ce-dernier finit par se trahir, permettant à Talbot et au Virginien de se réconcilier pour un final optimiste. Très sympathique.

« La liste » donne la vedette à Trampas. Celui-ci reçoit une liste de nom. L’un d’eux est barré et assorti de la mention « RIP. Pour Billy ». Trampas ne s’inquiète guère avant de recevoir une deuxième puis une troisième lettre. Apprenant que ceux dont le nom est rayé sont décédés de morts violentes, Trampas, dont le patronyme se trouve bien sûr sur la fameuse liste, mène l’enquête afin de retrouver tous ceux ayant été impliqué, bien des années auparavant, dans un événement tragique. Un western en forme de whodunit quelque peu linéaire et prévisible mais cependant intéressant et rondement mené jusqu’à la conclusion attendue mais efficace où le coupable se dévoile. Pas un classique de la série mais un plaisant divertissement.

Les deux épisodes suivants sont curieusement assez proches puisqu’ils traitent tous deux de rédemption et du souhait de recommencer sa vie à Shiloh. Et, dans les deux cas, une vieille connaissance (à croire que les Etats-Unis ne sont pas plus grands qu’un village) vient remettre en question ces bonnes résolutions.
Dans « Lady from Wichita » le propriétaire d’un ranch décède en laissant tous ses biens à une jeune propriétaire de saloon, Lorna (Joan Collins), qui débarque à Medecine Bow en compagnie d’une de ses amies, Belle (Rose Marie). Au départ décidée à vendre la propriété, Lorna se ravise et préfère reste afin de refaire sa vie loin de son passé peu « respectable ». Sensibles à ses charmes, Trampas aide la jeune femme à s’installer et à acquérir une certaine respectabilité mais Lorna craint toujours que l’on découvre ses origines modestes. Or un type peu fréquentable, Roy Kane, surgit à Medecine Bow et exerce un chantage à l’encontre de la pauvre demoiselle.
Classique mais plaisant, cet épisode dose adéquatement le drame et la comédie, notamment par les efforts entrepris par Belle pour devenir une « lady » acceptée de la communauté en dépit de ses mauvaises manières. Si le sujet n’est pas neuf (il a d’ailleurs déjà été abordé dans la série), l’épisode s’avère divertissant et offre une conclusion humoristique et optimiste : en dépit de la révélation de leur passé les deux jeunes femmes demeureront à Medecine Bow…quoiqu’aucun épisode ultérieur n’en fera mention.

La construction de « Star Crossed » se montre similaire en dépit d’un ton nettement plus sérieux. Le shérif adjoint Ryker reconnait un de ses vieux amis, Cliff Darrow, dissimulé sous l’identité d’un certain Andrew Miller. Ce-dernier, en fuite après quelques délits mineurs, a refait sa vie en compagnie de son épouse Judith et de son beau-fils, Brian. Convaincu de la bonne foi de son ami, Ryker accepte de fermer les yeux sur ses frasques d’antan. Malheureusement, Tony Barnes reconnait également Darrow, recherché pour un meurtre qu’il n’a pas commis, et entame un chantage à l’encontre du fugitif. Acculé et désespéré, Darrow tue son maitre-chanteur. Ne pouvant rester passif, Ryker se lance à la poursuite de son ancien ami…
Un épisode prévisible mais une intrigue bien racontée et suffisamment rythmée pour ne jamais ennuyer le spectateur. Ryker, dont la personnalité est bien cernée, en particulier en ce qui concerne ses hésitations à poursuivre un de ses amis, mène le récit jusqu’à son terme. A l’issue du jugement condamnant son compère, l’adjoint mettra d’ailleurs tout en œuvre pour le sauver et réconcilier le père avec son fils adoptif. Plaisant sans être révolutionnaire.

Le suivant, « Johnny Moon » est un excellent épisode qui aborde des thématiques environnementalistes assez surprenantes et novatrices pour l’époque, assorties d’une réflexion sur la légalité de différentes actions. Le personnage principal met en balance le « droit » et le « juste », brouillant les pistes pour un Virginien peu à peu convaincu qu’un acte juridiquement tout à fait légal peut être profondément injuste, inique et moralement discutable.
L’intrigue débute un guet-apens dans lequel un homme, Johnny Moon, est abattu par quatre chasseurs. Le Virginien ramène le blessé à Shiloh où il peut se reposer et guérir de ses nombreuses blessures. D’origine anglaise, Moon travaille pour la police montée canadienne mais a récemment déserté afin de poursuivre une mission personnelle. En effet, Moon traque un chasseur de loups, Joe Hogan, qui extermine ces bêtes de la plus cruelle des manières. Quoiqu’il n’ait enfreint aucune loi, Hogan s’est attiré la haine de Moon et ce-dernier estime de son devoir de l’arrêter. Le louvetier aurait, en outre, tué deux Indiens amis de Moon sans que cela puisse être prouvé. Poursuivi par un détective privé, Lawson, décidé à le ramener au Canada pour qu’il soit jugé pour désertion, Moon entraine le Virginien dans une expédition vengeresse afin de neutraliser définitivement Hogan.
Cette belle réussite à l’originalité indéniable se termine dans des paysages enneigés inhabituels avec un Moon en tunique écarlate (comme aurait dit Cecil B. DeMille) qui lutte aux côtés du Virginien contre de cruels louvetiers prêts à tout. Sans nul doute un classique de la série et, à tout le moins, le meilleur épisode de cette fournée.

Après ce récit dramatique, la série verse dans la pure comédie avec un « The Masquerade » au scénario éculé. George Foster, un modeste mais respecté employé de banque, a toujours affirmé à son père, ancien homme de loi à la réputation légendaire, qu’il était le shérif de Medecine Bow. Or, papa s’apprête à lui rendre une petite visite, un simple arrêt de deux heures lors d’un voyage en train. Ryker et le Virginien acceptent de jouer le jeu et transforment le petit fonctionnaire peureux en shérif dont chacun se rappelle les exploits. Malheureusement un accident ferroviaire oblige le paternel à rester trois jours dans la ville.
Pas déplaisant cet épisode reste toutefois très attendu : le banquier s’étrange en buvant son whisky, participe à un concours de tir (le Virginien, dissimulé, se charge de tirer à sa place et fait mouche à chaque coup), évalue d’un œil « expert » de nouvelles armes alors qu’il peine à tenir correctement un révolver, retrouve un enfant fugueur et, bien sûr, prouve au final sa valeur en traquant des bandits dans les montagnes. Rien de honteux pour cette « Masquerade » divertissante et agréable mais, également, fort convenue.

Peu d’action mais beaucoup de « politique » et quelques beaux numéros d’acteurs au programme de « Ah Sing Vs Wyoming ». Comme souvent la série présente un nouveau personnage dont nous n’avions, jusqu’ici, jamais entendu parler : Ah Sing, cuisinier des Grainger de son état. Celui-ci part s’installer à Medicine Bow et ouvre un restaurant pour montrer à sa future épouse ses capacités de gestionnaire. Malheureusement, le juge de paix refuse de lui accorder l’autorisation nécessaire, une affaire complexifiée par différentes magouilles liées à des problèmes entre éleveurs. Ah Sing brave l’interdit et, sitôt son établissement ouvert, se voit arrêter et emprisonné par Ryker. Grainger, outragé de cette décision, en fait une affaire de principes et, aidé d’un avocat porté sur la bouteille, entame un long procès contre l’Etat du Wyoming.
Cette intrigue intéressante ne lésine pas sur le pathos (quelques scènes forcent le trait du larmoyant) mais s’intéresse aux discriminations, rarement traitées, envers les Chinois. L’essentiel de l’épisode concerne les différents procès menés par Jim Grainger et son homme de loi alcoolique qui finiront par porter l’affaire devant la Cour Suprême. Charles Bickford livre une excellente performance en patriarche intransigeant décidé, par principe plus que par réelle conviction, à permettre à son ancien cuisinier d’obtenir l’autorisation nécessaire à l’ouverture de son restaurant. Malheureusement ce fut la dernière apparition du comédien puisqu’il fut emporté par la maladie deux semaines plus tard. Un joli chant du cygne.

« Bitter autumn » constitue un autre épisode porté sur la tragédie : un troupeau est convoyé par les frères Jackson depuis le Texas et les cow-boys font la fête sitôt arrivé à Medicine Bow. Ryker repère le comportement inconscient d’un des frères, Willy, et tente de le raisonner sans toutefois l’arrêter. Malheureusement, un peu plus tard, un Willy quelque peu éméché, abat accidentellement une jeune mère de famille, Hattie. Son époux, Sam, attend le verdict, bien décidé à se venger de Willy si ce-dernier n’est pas suffisamment condamné. Or le jury, convaincu du caractère accidentel du crime, ne lui donne que trois mois de prison…
Après le décès de Bickford, John McIntire prend le relais dans le rôle de Clay (le frère du défunt) et débute par cet épisode mélancolique (comme l’indique son titre) dont la linéarité se voit contrebalancée par la qualité d’interprétation des différents intervenants. Une solide petite réussite.

Après « Ah Sing Vs Wyoming », le neuvième épisode, « A Bad place to die » se voit à nouveau centré sur un procès mais alors que le cuisinier asiatique risquait simplement la fermeture de son établissement, Trampas risque, lui, la pendaison. En effet, après une dispute d’éleveur, Trampas a été vu à côté du corps d’un homme assassiné. Dans l’Ouest aucune autre preuve n’est requise et le Virginien ne dispose que de six jours pour prouver son innocence. Il s’engage chez un rancher rival de Shiloh pour obtenir de nouvelles informations et soupçonne une machination orchestrée contre son ami pour couvrir un crime passionnel. De son côté Clay Granger tente d’obtenir une grâce gouvernementale mais, devant les échecs successifs de la procédure légale, Trampas s’évade en compagnie de trois autres détenus. Au cours de leur fuite un gardien est abattu et Trampas se résout à fuir vers le Canada.
Un épisode correct mais pas franchement passionnant en dépit d’un scénario assez complexe qui multiplie les intrigues : les tentatives du patriarche Granger pour obtenir un sursis, les efforts du Virginien pour résoudre le crime dont Trampas est faussement accusé et l’amitié nouée par ce-dernier avec un vieux prisonnier. Le tout se laisse regarder sans déplaisir mais ne parvient pas à convaincre pleinement. Sans doute aurait-il fallu davantage de temps et de développement pour rendre cette histoire (dont le scénario touffu aurait parfaitement convenu à un long métrage) pleinement intéressante.

« Paid in full » termine cette livraison en suivant Frank, un repris de justice libéré de prison qui revient au ranch Shiloh. Il y retrouve son père, Ezra, devenu homme à tout faire. Handicapé après avoir sauvé la vie de Trampas, Ezra trime pour se payer sa maison mais Frank accepte mal cette situation : pour lui Grainger devrait exprimer sa reconnaissance en offrant une « pension d’invalidité » à son paternel. Le ton monte entre le père et le fils qui accepte finalement de travailler à Shiloh mais se laisse influencer par deux voleurs de bétail décidés à s’emparer du troupeau de Grainger.
James Whitmore campe ce vieil homme devenu boiteux mais à la fierté intacte. Le comédien apparut à quatre reprises dans la série mais chaque fois dans un rôle différent. On peut d’ailleurs regretter que le personnage, comme tant d’autres, n’ait eu droit qu’à cette unique apparition, il eut été intéressant de retrouver Ezra et son fils quelques temps plus tard pour découvrir leur destin ultérieur. Mais sans doute n’était-ce pas une manière de fonctionner prisée par les scénaristes de l’époque qui ont toujours privilégiés les récits indépendants aux conséquences limitées sur le déroulement global de la série.

Dans l’ensemble, cette énième livraison du VIRGINIEN tient donc ses promesses, partagés entre épisodes dramatiques fort réussis (« The Reckoning », l’excellent « Johnny Moon », « Bitter autumn ») et comédies sympathiques (« The Masquerade », « Lady from Wichita ») accompagnés de quelques récits solides et plaisants (à peu près tous les autres).

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