Le voleur de cadavres

Un texte signé André Quintaine

USA - 1942 - Wallace Fox
Titres alternatifs : The Corpse Vanishes
Interprètes : Bela Lugosi, Luana Walters, Tristram Coffin, Elizabeth Russell, Minerva Urecal

Le sujet du film Le Voleur de cadavres, n’est pas très éloigné de la légende de la comtesse Bathory qui se baignait dans du sang de jeunes vierges afin de préserver la jeunesse de son corps. Cependant, le film de Wallace Fox ne s’aventure pas vraiment sur le chemin du fantastique, préférant privilégier l’enquête policière au détriment des chauves-souris chers à Bela Lugosi. Ce thriller est même plus proche de la science-fiction puisque l’acteur d’origine hongroise est affligé de tous les symptômes du scientifique dément…

Une succession de décès mystérieux provoque la panique dans la société. Les victimes sont toutes des femmes qui s’effondrent pendant leur cérémonie de mariage, devant l’autel. Derrière cette épidémie se cache le Dr Lorenz. Le scientifique fou utilise un poison qui, véhiculé par des orchidées, a la particularité de mettre les victimes dans un état proche de la mort. Dès lors, le médecin n’a plus qu’à confisquer les cadavres et siphonner les liquides corporels afin de conférer jeunesse et beauté à sa propre épouse. Heureusement, une journaliste téméraire (Luana Walters) et un médecin curieux (Tristram Coffin) soupçonnent le dinosaure sous le caillou et décident de mener leur propre enquête.

Avec Le Voleur de Cadavres, on retrouve Bela Lugosi dans ce qu’il sait le mieux faire : cabotiner. Dans ce domaine, il excelle, en particulier lorsqu’il doit jouer sur deux tableaux. Il incarne un médecin sadique, certes, mais il est aussi le grand-père débonnaire que l’on a aimé dans notre jeunesse : poli, courtois et affable. Il est un peu comme Albert Einstein à qui l’on donnerait le Bon Dieu sans confession s’il n’avait pas touché à la conception de la bombe nucléaire.

Au générique, signalons également la présence de la jolie Joan Barclay en épouse victime de l’aveuglement de Bela Lugosi, acteur qu’elle côtoie la même année dans Black Dragons, le premier titre de la Scare-ific collection de Sin’Art. Après une carrière principalement dédiée à la série B, Joan Barcaly quittera l’industrie cinématographique quelques années plus tard, accaparée par un riche homme d’affaires qui en fera sa femme…

De manière classique, les enquêtes policières teintées de fantastique sont matinées d’humour délivré par le comique de service. Ce dernier brille ici par son absence. On peut le regretter car ses passages enrichissent de répliques, parfois malicieuses, des séries B souvent bavardes. Un certain humour noir n’est pas pour autant absent avec ce docteur qui utilise les épouses des autres pour préserver la jeunesse de la sienne.

En revanche, le film brille par la présence des clichés habituels du cinéma de l’époque utilisés ici à profusion… Ainsi, les seules personnes que le scénariste juge utiles de faire mourir sont deux malheureux qu’il a, sous sa plume, particulièrement accablés. Toby le majordome (Angelo Rossitto : Daughter of Horror et Brain of Blood) est un nain vicieux. Son frère Angel, (Frank Moran vu dans Ghosts on the Loose), est stupide et peut-être aussi nécrophile (il s’intéresse beaucoup aux victimes de son employeur une fois qu’elles ont été mises dans un état catatonique…) N’oublions pas la génitrice, Fagah (Minerva Urecal, vue dans The Ape Man et dans Le Cirque du docteur Lao) qui n’est qu’une vulgaire bonne à tout faire. Même le couple Lorenz bénéficie de plus de sympathie. Alors qu’ils dorment dans des cercueils, kidnappent, torturent et tuent sans pitié des jeunes femmes, ils sont présentés de manière presque sympathique. La gent féminine doit également souffrir de sexisme primaire ; elles défaillent pour un rien…

Composé d’acteurs connus de la série B, solidement mené par des pointures de la Poverty Row (Sam Katzman produit, Wallace Fox réalise et Harvey Gates scénarise), Le Voleur de cadavres vaut surtout pour son scénario outrancier et absurde. La maison du Dr Lorentz est ainsi remplie de fous pervers, de créatures difformes et de déficients mentaux aux mœurs condamnables, les bases pour ravir les spectateurs avides d’un spectacle trash.


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- Article rédigé par : André Quintaine

- Ses films préférés : Frayeurs, Les Griffes de la Nuit, Made in Britain, Massacre à la Tronçonneuse, Freaks

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