Un texte signé André Quintaine

Hong Kong - 1982 - Yuen Woo-ping
Interprètes : Leung Kar-yan, Yasuaki Kuraka, Yuen Yat-choh, Phillip Ko Fei

retrospective

Legend of a Fighter

Le film s’ouvre avec des documents d’époque pour situer le film dans l’Histoire. Cela ne paraît pas vraiment nécessaire si ce n’est qu’elles expliquent le brin de mépris que le film affiche envers les Occidentaux lors de 2 scènes. Au tout début du 20èmesiècle, la Chine est dans une période trouble. Les partisans de la Dynastie Ming veulent chasser les Mandchous soutenus pas les Occidentaux. Une armée d’experts en arts martiaux assiège la partie de Pékin où résident les Européens et Américains. La révolte, tout comme un nombre important de maîtres de kung-fu, s’éteint rapidement au bout de 55 jours avec l’arrivée de soldats américains, anglais et français. Cette période mène la Chine vers la fin de l’ère impériale, puis, vers l’invasion de la Chine par le Japon.
Au début du film, Huo Yuan-chia fait partie d’une famille dans laquelle le kung-fu a une importance prédominante. Le père, grand maître de cette discipline, refuse de lui apprendre son art en prétextant qu’il est trop faible. Ce dernier pense en effet que l’enseignement du kung-fu doit rester réservé à une élite. Selon lui, on ne partage pas le kung-fu avec les faibles et avec les personnes extérieures à la famille. C’est cela que le personnage historique de Huo Yuan-Chia va changer. Mais, revenons au film. Le père décide donc d’en faire un intellectuel et engage un tuteur pour s’occuper de son éducation.
Chiang Ho Shan est donc recruté mais il s’avère rapidement être là pour d’autres raisons que celles d’enseigner. Il s’agit également d’un grand maître et il vient ici pour apprendre et voler, incognito, les techniques de maîtrise du kung-fu du père de Huo Yuan-chia. Tous les deux se retrouvent donc dans la même position et Chiang Ho Shan en profite également pour apprendre les bases du kung-fu à son élève. Plus tard, Chiang Ho Shan doit quitter la famille. Il laisse Huo Yuan-chia avec un livre. S’il l’étudie correctement, il pourra peut-être devenir plus fort que son propre père.

Sur les mêmes bases scénaristiques que FIST OF FURY de Lo Wei, Yuen Woo-ping met en scène un scénario dans lequel le personnage principal sauve l’honneur de la Chine. Il ne faut donc pas s’étonner de voir représenter avec autant de clichés (mais sans réel racisme) des étrangers dans ce film. C’est tout d’abord un investisseur occidental qui est mis à mal. Son argent avec lequel il a même acheté un Chinois ne lui sert à rien face au courage d’autres Chinois qui se dressent devant cet être imbu de lui-même et surtout irrespectueux. Un lutteur russe ne fait pas long feu non plus après s’être mesuré à Huo Yuan-chia, tout comme un prétentieux karateka japonais. Non, la Chine n’est pas la malade de l’Asie et le kung-fu est bien une forme de combat plus efficace que la boxe européenne et le karaté…
Tout cela pourrait sembler ronflant mais le film s’avère définitivement excellent. Il faut saluer ici la profondeur des personnages et en particulier les relations père/fils. Phillip Ko Fei interprète le père autoritaire de Huo Yuan-chia qui refuse de lui apprendre le kung-fu et c’est Yasuaki Kuraka qui incarne son père spirituel, celui qui l’entraînera sur la voie du kung-fu. La qualité du film provient énormément de la façon utilisée par Yuen Wo-ping pour approfondir la personnalité de ces deux personnages, en particulier lors des scènes où Yasuaki Kuraka apprend en cachette l’art du kung-fu à Huo Yuan-chia en l’assimilant à une discipline intellectuelle.
Dans LEGEND OF A FIGHTER, tout tourne autour de la Chine et de son kung-fu. Heureusement, il ne tombe jamais dans le pompeux, en particulier grâce aux scènes de kung-fu magistrales de Yuen Wo-ping. Rappelons que Hollywood s’est attribué ses services sur les KILL BILL et MATRIX. Les chorégraphies sont évidemment à la hauteur de sa réputation. Ici, dans LEGEND OF A FIGHTER, les combats sont magnifiques et violents. On est plus proche de combats spectaculaires dans la veine des Bruce Lee. Le choix s’est résolument porté sur le réalisme, ce qui est logique puisque le film possède des velléités de retranscription historique.

Pur chef-d’œuvre du film d’art martial, la grande qualité de LEGEND OF A FIGHTER est d’avoir su si bien concilier drame humain et combats magistraux. A un point tel qu’ils sont complètement associés. La profondeur des personnages permet vraiment de leur conférer une véritable âme, et, même si le sujet peut paraître bateau, le film s’avère terriblement touchant, autant qu’il est spectaculaire.


Votre soif de lecture n'est pas rassasiée ?
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides


Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.

- Article rédigé par : André Quintaine

- Ses films préférés : Frayeurs, Les Griffes de la Nuit, Made in Britain, Massacre à la Tronçonneuse, Freaks

Share via
Copy link