Les courts métrages de fiction en compétition

Un texte signé Sophie Schweitzer

France - 2016 - Mónica Mateo, Erin Li, Hugues-Willy Krebs, Pascale Brischouxn, Bernardo Lopes, Inês Malveiro, Zach Lasry, Park Joong-ha, Álvaro González

Les courts-métrages de fiction en compétition proposent une sélection internationale où les styles et les genres se mélangent. On retrouve néanmoins une majorité de films de SF ou de fantasy. Le numérique permettant des choses qui auparavant auraient été impossibles ou très difficiles à réaliser, mais n’est pas toujours garant d’une esthétique léchée. En effet, le numérique peut tout aussi vite paraître cheapos que le latex d’avant.

ADAM PEIPER de Mónica Mateo, court métrage espagnol, propose un univers très proche de Brazil, un poil trop. On y voit un préposé au courrier qui, rendu fou par son travail, tente de se rebeller contre le système. Hélas, ce dernier l’avale, littéralement. Les effets numériques ne sont malheureusement pas toujours très réussis, l’image est trop sombre, et les personnages mal définis. Il y a des idées intéressantes, mais l’ensemble reste trop proche du film de Terry Gilliam pour vraiment marquer le spectateur.

KEPLER X-47 de Erin Li, court métrage américain, nous plonge dans un musée où des humains sont exposés. L’idée est plutôt originale, mais pas forcément bien exploitée. En effet, la mise en scène est hésitante et le scénario pas vraiment abouti. Jamais le court ne cherche à expliquer son univers ni à le rendre crédible en essayant de justifier ses choix. Ce qui est dommage, car l’idée sur le papier avait de quoi faire rêver. De surcroît, les effets numériques donnent au court un aspect cheapos ce qui est dommage.

LA PUNITION de Hugues-Willy Krebs, court français, s’inspire du destin tragique des Pussy Riot. Ainsi, nous voyons une jeune femme en prison, battue par ses codétenues, qui se retrouve obligée par un fonctionnaire à signer un papier. Si le propos est intéressant, le film manque d’une véritable mise en scène, et surtout de profondeur. Bien trop court pour développer un véritable propos politique, finalement, il ne fait qu’énoncer une vérité sans la détailler.

LES GARÇONS CLIGNOTANTS de Pascale Brischoux, court métrage belge nous propose une histoire tragi-comique au texte écrit par une dramaturge. Et en effet, les paroles ont quelque chose de poétique, la mise en scène allant aussi dans ce sens, avec un petit côté magique qui n’est pas sans rappeler la mise en scène de Valérie Donzelli. Son atmosphère de sombre forêt féérique évoque quant à elle le clip de Bat for Lashes pour la chanson What’s a girl to do. La forme est très originale, et inspirée, mais le fond manque de profondeur et surtout, de sens.

LUX de Bernardo Lopes et Inês Malveiro, court métrage portugais raconte les déboires d’un écrivain en mal d’inspiration. Doté d’un humour absurde, ce court-métrage fait sourire sans pour autant faire réellement mouche. Il faut dire que la métaphore de l’ampoule pour l’inspiration n’est pas vraiment concrétisée, et si l’idée est amusante, la fin tombe un peu à l’eau. Trop anecdotique, Lux a l’un des défauts caractéristiques de beaucoup de courts métrages, à savoir reposer sur une idée bien trop anecdotique.

SETH de Zach Lasry est sans nul doute le court-métrage le plus drôle et ubuesque de la sélection. Complètement déjanté, le court américain nous plonge dans le petit monde de Seth qui, à la trentaine bien sonnée, vit encore chez son papa qu’il tente coûte que coûte d’impressionner, parle à ses peluches et a même une relation compliquée avec l’une d’elles. Très drôle, ce court a brillé au milieu de la sélection comme un ovni dans un ciel sombre. Mise en scène originale, personnage brossé à contre-sens, univers assumé et décalé, avec une véritable construction narrative, bref une merveille !

SWEET FAMILY de Park Joong-ha est un court-métrage coréen. Indéniablement, une vraie réussite qui est très finement écrite, avec une mise en scène soignée et un jeu d’acteur assez troublant. Totalement dans l’esprit jusqu’au-boutiste du cinéma coréen, ce court ne vous laissera certainement pas de marbre d’autant qu’il a un propos original et intéressant. Une vraie petite perle ! Un cinéaste à suivre.

TITAN de Álvaro González nous vient d’Espagne. En dépit d’un manque de moyens évident, ce court-métrage de science fiction développe une thématique très intéressante. Dans la veine d’INCEPTION, il mêle quête impossible, science fiction, grands espaces arides et drame intime. S’il a sans conteste de gros défauts, il n’en demeure pas moins qu’il a un vrai propos, et un cœur battant. En bref, réalisateur qu’on a envie de suivre !

VARDOGER de Ludovic de Gaillande est un court-métrage « de fin d’étude » français. Pour un film d’étudiant, il est plutôt bien filmé, intéressant, avec en guest Niels Dubost toujours aussi bon. Le film a des thématiques intéressantes, et une fin qui soulève quelques questions, mais est par trop maladroit et ne parvenant à se détacher de ses inspirations pour être une vraie réussite.

YUN-HO de Hermann Swaiss est un court-métrage espagnol de guerre. Malheureusement, l’image de mauvaise facture rend ce court assez illisible et incompréhensible. L’absence de paroles, une caméra de mauvaise qualité et trop mouvante, rendent l’action totalement cryptique. Résultat, on ne sait pas tellement ce qu’on a vu, encore moins ce qu’on a voulu nous dire…


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- Article rédigé par : Sophie Schweitzer

- Ses films préférés : Le bon, La brute et le Truand, Suspiria, Mulholland Drive, Les yeux sans visage, L'au-delà

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