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Les Momies de Mexico

1980. Un complot, mêlant militaires et mafia, vise à s’emparer du contrôle des gisements de pétrole mexicains. Le Commander et la Mama sont chargés par le sénateur Holden d’enquêter. Kovask interroge une famille mafieuse américaine, chantage à l’appui, tandis que la Mama se rend sur place, au Mexique.
Les romans d’espionnage sont souvent violents, parfois gore (S.A.S., par exemple), mais ils suivent rarement la voie de l’horreur et du macabre à proprement parler. La violence est juste un élément plus ou moins réaliste qui sert à pimenter une intrigue qui pourrait autrement n’être qu’une simple enquête policière d’un type un peu particulier.
Parfois, cependant, les vampires, vrais ou faux, sont de sortie (L’AFFAIRE DU VAMPIRE, COUP DE SANG POUR LECOMTE) quand on n‘a pas affaire à une invasion de rats pré-James Herbert (L’ARTISTE FRAPPE LES TROIS COUPS).

C’est un peu le cas avec ces MOMIES DE MEXICO (beau titre, couverture photographique affreuse comme on le pratiquait à l’époque au Fleuve Noir). Pour la célèbre maison d’édition, G.-J. Arnaud s’était déjà montré intéressé par l’horreur avec ses 4 Angoisse (dont le très bon et cannibale DOSSIER ATREE). Quelques années plus tard, il rédigera 2 Gore tout aussi excellents. Dans cette nouvelle aventure du Commander, son héros d’Espionnage, il choisit la voie du bizarre avec une histoire de fausses momies (tendance cadavres desséchés, mexicaines et non égyptiennes à bandelettes) qui dissimulent en fait les (vrais) corps des victimes des comploteurs. La découverte de la maison du méchant, une sorte de nécrophile platonique, est épouvantable. On se croirait dans un PSYCHOSE puissance 10. Cela nous vaut quelques pages d’un glauque admirable.

A part cet élément horrifique, Arnaud nous fait découvrir le petit monde d’une boîte à travestis. Ceux-ci endossent sur scène le look de personnages célèbres, comme Marylin Monroe ou Liz taylor (attachante figure, d’ailleurs, que cet artiste fidèle en amitié qui incarne la star au cabaret). Un officier de l’armée plutôt sadique utilise leurs services pour faire pression sur des collègues en filmant leurs frasques. Un chantage sexuel assez classique dans le monde de l’espionnage.
Les Héros des MOMIES DE MEXICO, éternels champions de la démocratie et de la justice, sont donc le Commander Kovask, un peu insipide mais capable de belles phrases (« Je maintiens un certain équilibre entre mon indignation et mon désenchantement », P. 63) et, surtout, la Mama.
La Mama est un agent très spécial, c’est le moins que l’on puisse dire. Une dame d’un certain âge mal fagotée et excentrique qui paraît tout à fait inoffensive. Alors que son sac à mains contient un vaporisateur de vitriol et qu’elle manie fort honorablement le pistolet à silencieux ! G.-J. Arnaud a eu un coup de génie en créant ce personnage très original. Davantage que Kovask, c’’est elle le vrai héros du roman. C’est elle, courageuse petite bonne femme, qui détient les traditionnels gadgets de l’espion et qui se mouille au Mexique pendant que le Commander prend l’apéro chez des mafieux !
Des mafieux qui investissent aujourd’hui dans le pétrole, comme dans l’alcool autrefois, à en croire l’auteur. Nous découvrons toute une famille qui se fait rapidement massacrer. Un carnage dont on ne verra rien, on n’est tout de même pas dans un épisode de L’EXECUTEUR. D’ailleurs, il ne faut pas s’attendre à beaucoup d’action dans ce roman qui est davantage une longue enquête, un peu trop confuse et embrouillée pour être honnête. LES MOMIES DE MEXICO valent avant tout pour l’atmosphère inédite (les travestis, les momies, les mariachis assassins – les amateurs de Robert Rodriguez applaudiront …). On peut très bien s’intéresser à un roman pour des détails, quelques idées fortes, davantage que pour son intrigue. C’est assurément le cas ici.

La mafia est présentée par Arnaud comme une dynastie d’hommes d’affaires hors normes, high tech, richissimes et surpuissants, qui possède même un satellite. Rien d’impossible en effet. Ce qui fait dire à un policier dépassé, P. 130 :
« … on n’est sûr de rien avec des gens qui utilisent des lance-flammes, des hélicoptères et jusqu’à un satellite de communication. Pourquoi pas une bombe atomique ? »
Kovask n’en doute pas. Le moment viendra. Ce qui fait froid dans le dos.

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