Les Nuits de Dracula

Un texte signé Nassim Ben Allal

Espagne, Allemagne, Italie, Lichtenstein - 1970 - Jesus Franco
Titres alternatifs : Count Dracula
Interprètes : Christopher Lee, Klaus Kinski, Herbert Lom, Soledad Miranda

En 1970, pour son trente-troisième film (calcul approximatif en raison du nombre de pseudonymes utilisés), Jesus Franco s’attaque au mythe crée par Bram Stoker en offrant le rôle titre à son meilleur et plus connu interprète, l’immense (dans tous les sens du terme) Christopher Lee.
Exemple type de l’adaptation la plus fidèle qui soit en vu des moyens employés (quasiment aucun si l’on en juge le générique et les décors), le film à de quoi interpeller, surtout si l’on connaît bien la filmographie du sieur Franco. Composé d’un casting on ne peut plus séduisant qui comporte, outre Lee, Klaus Kinski et Herbert Lom, LES NUITS DE DRACULA est précédé d’une assez flatteuse réputation auprès des inconditionnels du suceur de sang.
Johnatan Harker, jeune clair de notaire anglais, débarque en Transylvanie dans le sinistre château de son client, le comte Dracula, afin de régler les derniers détails de son acquisition, une nouvelle demeure. Auprès des villageois locaux, le comte semble traîner une lourde réputation. Mais qu’importe, Harker n’en a cure, surtout qu’il est accueilli par le comte lui-même, un charmant vieillard vivant seul. Cependant, en pleine nuit, Harker se rend compte que le compte le retient prisonnier et que les quelques ragots qui circulent sur son compte se vérifient. Parvenant à s’échapper, Harker retourne en Angleterre auprès de Mina, sa jeune et douce promise. Mais le comte semble lui aussi avoir fait le voyage, ainsi que l’affirme Reinfield, un patient interné du Dr Van Helsing, beau-père de Harker…
Si le titre français augure de quelques plans de nudité chatoyante, ami voyeur passez votre chemin, nous ne sommes pas là pour rigoler…du moins volontairement !
En effet, le film cumule ce qui peut se faire de pire en terme de scène d’horreur fauchées comme en témoigne la séquence de l’attaque des animaux empaillés, montage de zooms sur de vrais animaux empaillés immobiles et de contre-champs sur les comédiens aux faux airs terrifiés.
Des séquences aussi bis, le film en compte un certain nombre, comme cette chauve-souris en plastique agitée devant la fenêtre de ce pauvre Harker ou encore la triste fin de Dracula (qui ne sera pas décrite ici car il ne faut jamais vendre la chute d’une histoire drôle avant de l’avoir racontée). Les scènes techniquement ratées sont légion, la palme revenant à celle où un Klaus Kinski en roue libre joue ( ?) le fou dans sa cellule capitonnée sur les murs de laquelle les ombres du cadreur, de la caméra, de la perche et de l’ingénieur du son sont visibles en continu.
Mais trêve de critique. Nous ne sommes pas ici devant un film, mais devant un film de Jess Franco, ce qui n’est pas la même chose. Savant mélange de cadrages pertinents, d’aberrations scénaristiques, d’acteurs non dirigés et de lumières irréprochables, LES NUITS DE DRACULA est une synthèse de l’art de Franco, c’est-à-dire foncer droit dans le caniveau du bis le plus fauché et en sortir à de rares, mais salvatrices occasions. C’est d’ailleurs ce qui rend sa filmographie si attachante, ce mélange de ratage complet et d’envolées incroyablement réussies.
LES NUITS DE DRACULA n’échappe à la règle et comporte son lot d’atmosphères gothiques et humides qui n’augurent rien de bon, soulignées par une superbe séquence se déroulant en plein brouillard. Les atmosphères, Franco les maîtrise et tous les moments se déroulant dans les châteaux le prouvent : malgré une économie de moyen et un dépouillement total du cadre, une vrai inquiétude s’installe, le malaise est distillé, amenant un suspens renforcé par la présence de Christopher Lee.
En effet, si celui-ci n’assure que le minimum syndical, sa prestation permet au film de décoller et, avouons-le franchement, d’être regardable jusqu’au bout.
Au final, Franco synthétise l’œuvre de Stocker en une heure trente de film sans jamais la trahir mais en ne gardant que le stricte minimum, perdant ainsi la majesté du récit.


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- Article rédigé par : Nassim Ben Allal

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