Les Yeux Bleus de la Mort

Un texte signé Patryck Ficini

France - 1973 - Retamosa Henri de

1944. Des S.S. commettent un massacre en Ukraine pour s’emparer d’un trésor. Pour faire parler la vieille Mamouska, ils n’hésitent pas à violer et tuer ses petits-enfants.
1970. Les trois nazis se sont embourgeoisés, avec des fortunes diverses, en profitant du magot dérobé. L’un est devenu un riche notable de Cologne, l’autre patron d’un petit hôtel (des placements malheureux ne lui ayant pas porté chance) ; le dernier a quant à lui dilapidé sa fortune bien mal acquise avec des filles de petite vertu, contractant la syphilis au passage.
Bientôt, on tue horriblement le meilleur cheval et le chien favori de l’industriel, tandis que la Mamouska refait son apparition.
A l’époque, la vieille un peu sorcière leur avait promis les pires maux en guise de représailles.
Il est temps pour sa terrible vengeance de s’abattre sur les ex-S.S. …

La Bibliothèque de l’Etrange des éditions Galliera a publié des auteurs importants comme Christine Renard (LA PLANETE DES POUPEES), Maurice Perisset (à deux reprises) ou un nom connu des plus bissophiles d’entre nous, Patrice Rhomm pour AU SERVICE DU DIABLE (le film du même titre est bien sympathique). Rhomm fut notamment réalisateur de porno fantastique avec DRAGUSE, coscénariste de BANCO A BANGKOK POUR OSS 117 et créateur littéraire de l’agent secret Marc Triomphe, entre autres.
Il n’en reste pas moins que l’auteur des YEUX BLEUS DE LA MORT, Henri de Retamosa, est pour nous un illustre inconnu. Fut-il le romancier d’un seul livre ? Signa-t-il sous un ou d’autres noms d’autres romans ? Nous aimerions bien le savoir.
Qu’en est-il en tout cas des YEUX BLEUS DE LA MORT, qui précède d’une bonne quinzaine d’années le EXTERMINATION de André ATOMOS Caroff chez Gore ?
Sur un sujet similaire ou en tout cas très voisin, malgré des points communs certains, le résultat est très différent.
Ce qui intéresse Henri de Retamosa, c’est la destruction progressive de l’existence bourgeoise des ex-nazis. Ce qui passe notamment par la décadence et la désagrégation familiale.
Les épouses de deux nazis s’envoient en l’air (hors champ pour employer un terme cinématographique) tandis que les enfants de l’un, frère et sœur, couchent ensemble avant de se suicider de honte, inspirés par la sorcière Mamouska (après le lesbianisme, l’inceste… De Retamosa ne lésine pas.) Une autre fille, qui se prostitue, est assassinée par son maquereau.
Comme nous sommes en 1970, un ex nazi voit sa fille revenir d’Amérique avec une bande de hippies dont elle a épousé les moeurs légères. Nous ne ne dévoilerons rien de leur sort final pour respecter la surprise…
Les enfants innocents paient aussi pour les horreurs commises par les parents.
Il est passionnant de de voir combien nos ex-violeurs et assassins, désormais rangés, sont choqués voire bouleversés dans leur existence confortable.
De Retamosa, au style assez plat mais plutôt efficace, fait preuve d’une relative subtilité, comme on le voit.
En revanche, pour en revenir au massacre initial de la famille ukrainienne, il est franchement horrible. Des crimes de guerre dans ce qu’ils offrent de plus affreux : viols et éventrations de jeunes filles, castration d’un enfant… Une fois encore, de Retamosa n’y va pas avec le dos de la cuillère pour montrer à quelles ordures nous avons affaire. Des salopards qui sont quand même les personnages principaux de son roman ! Adage de base une nouvelle fois vérifié d’une certaine littérature populaire depuis la seconde guerre mondiale : les nazis font les meilleurs méchants.
La Mamouska est la « gentille » du roman. Totalement impitoyable, en fait. Elle se fait discrète à travers quelques apparitions, puisqu’elle semble posséder le don d’ubiquité. La vieille sorcière tire les ficelles, sans doute, mais on ne la voit prendre directement part à sa vengeance qu’à la fin du roman. Et de quelle façon !
Les histoires de malédiction sur plusieurs générations sont légion, notamment dans l’épouvante gothique. Sur le fond, de Retamosa n’invente rien mais replace la chose dans un contexte original il faut bien le dire.
LES YEUX BLEUS DE LA MORT, qui vaut bien certains Angoisse/Fleuve Noir mineurs, est un bouquin honnête, assez émouvant sans doute par moments (les souvenirs de la Mamouska), intéressant sans être jamais emballant. Ce qui est déjà une excellente chose.


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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