L’isola dei morti

Un texte signé Patryck Ficini

« Je n’oublierai jamais plus la puanteur de ce cadavre. C’est la même puanteur que j’ai sentie ce matin sur tes lèvres, quand tu m’as dit : C’est aujourd’hui qu’on part, mon amour. »
ALDA TEODORANI est malheureusement méconnue en France. Excessivement peu traduite, elle n’en reste pas moins une très grande nouvelliste et romancière en Italie. SUEURS FROIDES, outre des NEWS, lui a aussi consacré un dossier, à travers les nombreux court-métrages adaptés de son œuvre. Pour l’occasion, la reine de l’horreur et du noir nous avait aussi accordé une interview : http://www.sueursfroides.fr/dossier/rendez-vous-avec-alda-teodorani-appuntamenti-letali-20
ALDA TEODORANI, c’est une fascination/obsession pour le meurtre violent et la folie furieuse, mais c’est aussi une façon unique de narrer des choses terribles et douloureuses à la fois, avec une écriture bien davantage qu’efficace : belle, tout simplement. On peut citer son incroyablement violent RADICI DEL MALE, un roman qu’on ressent comme un coup de poignard. Une sorte d'”Italian Psycho”qui faillit être adapté par MICHELE SOAVI. On pourrait aussi citer nombre de ses nouvelles, pleines de tristesse et d’horreurs. ALDA TEODORANI préfère les textes courts, qui lui permettent une intensité qu’un énorme psycho-thriller à l’américaine rendrait impossible.
ALDA TEODORANI, aujourd’hui publiée par MONDADORI, aime les expériences originales autour de son œuvre. On a déjà cité les court-métrages APPUNTAMENTI LETALI (pour lesquels elle avait gracieusement prêté ses textes), on peut évoquer aussi la B.D SESSO COL COLTELLO ou les 15 DESIDERI, des nouvelles à l’érotisme sombre lues par ses soins sur un CD.
Aujourd’hui c’est carrément un beau concept-album des FORBICI DI MANITU qui adapte l’une de ses nouvelles (jointe au CD), L’ISOLA. Une musique dark et troublante qui épouse parfaitement le contenu d’un texte qui évoque le naufrage d’un amour (qui, peut-être, n’a jamais été), la souffrance des femmes abusées sexuellement, le mal que les hommes peuvent leur faire sans même y penser. Un texte hanté par l’idée de fin, de décomposition, de putréfaction.
L’ISOLA est assez représentatif de l’horreur selon ALDA TEODORANI, à travers des personnages dérangés et un visage du Mal profondément humain. Il y a de l’horreur, et plus que cela, comme chez tous les grands spécialistes du genre. De la mélancolie, une angoisse existentielle aussi, qui va bien au-delà de celle que distille habituellement un simple thriller.
Le CD est un bel objet, avec les inquiétantes illustrations de EMANULA BIANCUZZI, parfaitement dans le ton, et qui évoquent un peu les travaux des maîtres japonais du bizarre JUNJI ITO et HIDESHI HINO.
En attendant son prochain roman…
« J’ai vu un portrait de la Vierge dans sa longue tunique bleue, les pieds nus. Mais quand je me suis approchée je me suis aperçue que des centaines de vers sortaient de la tunique et que le sourire de la Vierge était en réalité un horrible ricanement malveillant. »


- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés :


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