Mafia Connection

Un texte signé Patryck Ficini

Italie - 1970 - Camillo Bazzoni
Titres alternatifs : C'est la loi des siciliens - Black Lemons - E venne il giorno dei limoni neri
Interprètes : Antonio Sabato, Peter Carsten, Silvano Tranquilli, Pier Paolo Capponi, Didi Perego, Lee Burton...

Après les travaux forcés, Antonio Sabato retourne au pays. Son épouse a été tuée, son entreprise est sur le point d’être accaparée par ses ex amis de la mafia. Il devra mener son enquête pour découvrir les responsables de la mort de sa femme.
Antonio Sabato est une sorte de Erik Estrada sicilien, un musclé aux dents blanches qui fut la vedette de westerns (l’intéressant DEUX FOIS TRAITRE) puis de polars violents (l’excellent LA VIOLENCE APPELLE LA VIOLENCE, avec Henry Silva), preuve qu’il trouvait les faveurs du public italien, faute d’égaler Anthony Steffen ou même Maurizio Merli dans le coeur des bisseux.
Force est de reconnaître, qu’on l’aime ou pas, qu’il s’acquitte une nouvelle fois fort bien de sa tâche dans ce film de Camillo Bazzoni (plus connu pour son EVADE DE YUMA, avec Steve Reeves), au titre original d’une rare poésie.
MAFIA CONNECTION est un titre américain qui rend fort peu justice à cet excellent film de mafia, incitant à penser, à tort, à un sous FRENCH CONNECTION. C’EST LA LOI DES SICILIENS évoque bien sûr plutôt le titre du grand polar de Henri Verneuil tourné un an plus tôt.
Outre quelques têtes bien connues des amateurs, signalons la présence (c’est le cas de le dire) de la très classe Florinda Bolkan, qu’on apprécia chez Fulci. Elle fut notamment la sorcière lynchée de LA LONGUE NUIT DE L’EXORCISME, dans l’une des scènes les plus fortes, graphiquement et émotionnellement, jamais réalisées par le Maître. Impossible aussi d’oublier son rôle de femme forte dans le glauque TERREUR/LA SETTIMA DONNA.
La mafia, popularisée au cinéma par LE PARRAIN (qui donna aussi lieu à des répliques italiennes), est un sujet à l’impact mondial, puisqu’il s’agit d’une véritable internationale du crime, qui déploie ses tentacules dans tous les pays. On la surnomme aussi « la piovra », la pieuvre, en Italie – et c’est d’ailleurs le titre original de la série TV à succès LA MAFIA de Damiano Damiani, spécialiste du genre depuis LA MAFIA FAIT LA LOI, en1968.
La mafia fascine (la lecture de quelques Exécuteur est édifiante sur ce point), avec ses rites (comme au début du Bazzoni, quasi satanique), ses codes et son sens de l’honneur si particulier. L’intérêt pour les différentes mafias italiennes ne s’est jamais démenti depuis, comme le prouve encore le succès récent de l’ultra documenté GOMORRAH. Plus largement on pourrait ausssi évoquer le traitement cinématographiques des autres réseaux mafieux, russes ou yakuzas.
C’EST LA LOI DES SICILIENS traite le sujet avec un sérieux qui l’honore, sans servir la soupe aux mafieux mais sans non plus jouer la carte de la démystification à tous prix, comme ont pu le faire, sur le versant oriental, Takeshi Kitano ou Kinji Fukazaku. Bazzoni les montre, peut-être, tout simplement, sous leur vrai jour.
Ce qui est intéressant dans un scénario comme celui de C’EST LA LOI DES SICILIENS, c’est qu’il se fonde sur une enquête policière qui n’est pas menée par des flics. On s’aperçoit que l’enquête, classique du genre depuis ses origines littéraires, reste au centre de nombreux polars, même s’ils n’illustrent pas les exploits de policiers ou de détectives.Les méthodes de Sabato sont parfois franchement condamnables, avec notamment le long passage à tabac, sous ses yeux, d’une fille par un complice sadique. C’est intéressant puisque, loin d’en faire un petit saint, cela montre le
«héros» sous son vrai jour. C’est ainsi qu’il kidnappe le fils de son ennemi pour le mettre à sa botte. Un mafieux reste un mafieux. Bien sûr, difficile de s’identifier ou de s’attacher à un type de cet acabit.
En fait, C’EST LA LOI DES SICILIENS est certainement plus intéressant que nombre de polars violents des années 70 à base de faits-divers sanglants et de super flics à la Dirty Harry. Peut-être parce que, contrairement à nombre d’entre-eux (d’excellents Lenzi, notament), il possède une vraie histoire, bien structurée, avec un début, une fin et un développement.
Sans la déflorer, remarquons que la fin, digne du western spaghetti dans sa dimension la plus tragique, est superbe, typiquement italienne puisqu’on y constate que nul n’est à l’abris des balles. Avec cette idée terriblement réaliste : qui lutte contre la mafia finit impitoyablement broyé.


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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