Men behind the sun 4 – Black Sun

Un texte signé André Quintaine

Hong Kong - 1995 - T.F. Mous

Les troupes japonaises envahissent Nanking, la capitale chinoise. La détresse des habitants est palpable, certains résistent et n’hésitent pas à se sacrifier avec leur famille dans l’espoir de tuer, ne serait-ce qu’un soldat. Un concours est organisé parmi les officiers. Celui qui empalera le plus de Chinois avec son sabre sera l’idole de la meute. Le tournage de film de propagande a déjà commencé ; il faut que les rues de Nanking ne soient vite plus qu’aux couleurs japonaises. On annonce la visite prochaine du grand chef des armées nippones. Il veut goûter au triomphe sur place. Les massacres redoublent alors d’intensité – il n’y a plus aucun Chinois dans les rues.
Les plus chanceux seront prisonniers, mais ils sont déjà presque tous morts. Une famille prend le risque de survivre cachée dans les décombres en feu. Un homme cultivé choisit de sauver sa vie et celle de son fils. Il va au-devant des officiers japonais, leur sert d’interprète et de guide…
T.F. Mous (CAMP 731) a encore réussi à décrocher un gros budget pour parler des atrocités commises par les Japonais envers les Chinois. Le film nous montre les différentes étapes du massacre de la population chinoise, en prenant soin de nous faire goûter à la logique implacable des chefs d’armée japonais dont la préoccupation n’est bientôt plus que de savoir quoi faire de tous ces corps qui encombrent la ville.
Les scènes de violence graphique (éventration à la baïonnette, décapitation…, rien ne nous est épargné) sont entrecoupées des discussions sereines des superviseurs des opérations qui expliquent leurs motivations. Ainsi, on a droit à tous les débats sur la définition d’une guerre sainte pour les héritiers des samouraïs, le possible asservissement d’une population par imposition de sa culture, l’utilité des viols… Ces dialogues sont en fait les adaptations des justifications que les officiers japonais ont formulé lors de leur procès. On peut se demander si de telles discussions ont véritablement eu lieu pendant les événements ? Mais le but du réalisateur est visiblement d’assommer le spectateur avec une accumulation d’informations.
Il choisit de ne pas nous laisser un instant de répit pour exprimer le désarroi des Chinois face à un raz-de-marée japonais. Un des éléments les plus efficaces du film est le matraquage systématique fourni par les images d’archives datées. Elles viennent nous prouver qu’aucune des atrocités présentées n’est inventée. Le sentiment de voyeurisme laisse systématique place à la consternation et à l’horreur, comme lors de la présentation de cette plage entièrement recouverte de cadavres imbibés d’essence, auxquels on met le feu…
Le film réserve aussi des moments plus intenses et recèle de drames dans le drame : le père chinois dit à son fils de ne pas s’approcher par-ce que papa “ s’amuse avec les Japonais ”, ou cette grand-mère qui se sacrifie devant les yeux de ses petits-enfants pour ne pas laisser un crime impuni…
La fin du film n’est que le défilement écrit du bilan de l’aventure : le nombre de morts et les méthodes employées, les peines ridicules infligées aux responsables, le rappel que la prise de Nanking n’était pas un acte de guerre comme les autres. Ne reste plus au spectateur qu’à chercher la façon dont tout cela aurait pu être empêché, ou au moins atténué… Il y a ce moment terrible où deux gardes
Japonais se demandent pourquoi le millier de Chinois qu’ils surveillent reste simplement assis, au lieu de se révolter… Il y avait cette présence ridicule de la poignée d’observateurs étrangers, essayant d’organiser des camps de réfugiés, ou de sauver quelques vies. Un Chinois sera sauvé par un étranger se faisant passer pour un nazi aux yeux des Japonais ; mais seulement parce que son uniforme les a fait rire. Le message de T.F. Mous est une fois de plus suffisamment clair pour contenter les Chinois qui réclament aujourd’hui encore des compensations à leurs agresseurs d’alors.


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- Article rédigé par : André Quintaine

- Ses films préférés : Frayeurs, Les Griffes de la Nuit, Made in Britain, Massacre à la Tronçonneuse, Freaks

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