retrospective

Mon Nom est Shangai Joe

Un Chinois découvre les Etats-Unis, peuplés de racistes et de tueurs. Il se met vite à dos une bande de trafiquants qui importent des travailleurs du Mexique pour en faire des esclaves modernes. La tête de Shangaï Joe est bientôt mise à prix par le chef des bandits…
Mario Caiano signe là l’une des oeuvres les plus cultes du western italien. Pensez un peu : ce film est tout à la fois l’un des westerns les plus violents et le meilleur des karaté-westerns. Il possède en sus l’une des plus belles brochettes de méchants du genre !
Depuis déjà quelques années, les Européens plaçaient des personnages d’asiatiques dans leurs films, payant ainsi tribut à leurs inspirateurs japonais. Citons seulement 5 HOMMES ARMES ou SOLEIL ROUGE, avec leurs samouraïs. Evidemment, ils furent bien placés pour réagir très vite à la déferlante des films de kung-fu qui secouèrent bientôt l’Occident. Le karaté-western était né !
Certains esprits chagrins pourront regretter la simplicité du scénario, basé sur la découverte d’un pays et sur une suite de combats, mais quelle importance ? Si sa structure est effectivement simpliste, style road-movie, tout son intérêt vient justement des rencontres que fait Shangaï Joe au long de sa route. Ce film se base sur la même thématique que la sympathique mais un peu molle série KUNG-FU, avec David Carradine, mais il s’avère quant à lui une réussite totale ! Les idées abondent et les combats sont vraiment formidables. Certains pourront les trouver vieillis… Ils sont en tout cas incroyablement efficaces. Pour un film occidental, la chorégraphie des scènes de kung-fu est vraiment exceptionnelle ! Très violents, jusqu’au gore total, elles voient notre héros faire des bonds impressionnants et voler littéralement dans les airs.
Les scènes où Shangaï est victime du racisme et des préjugés des yankees sont toutes très réussies. Moins naïf qu’il n’y paraît, le Chinois saura vite détromper les moqueurs sur son compte. Il sait tout faire et même mieux que tout le monde ! L’antiracisme est parfaitement intégré à l’histoire.
La réalisation de Mario Caïano est impeccable, totalement au service des exploits de Shangaï Joe. Tout converge à en faire un héros mythique et l’un des personnages les plus originaux du genre. La musique de Bruno Nicolaï est évidemment parfaite. Et il n’est pas étonnant qu’on ait cru à une époque qu’Ennio Morricone se cachait derrière ce nom tant ce collaborateur excelle lui aussi !
Chen Lee est vraiment brillant, sa présence est évidente et le voir à l’oeuvre est un régal. Parmi les incroyables méchants lancés à sa poursuite, une sacrée distribution : Piero Lulli, toujours excellent ; Robert Hundar, impressionnant en cannibale mais qui voit hélas son rôle sacrifié ; le géant Gordon Mitchell en fossoyeur chantonnant qui finira empalé dans la fosse à pieux qu’il a creusée ; Giacomo Rossi Stuart en joueur rusé, et enfin le grand Klaus Kinski dans le rôle d’un… collectionneur de scalps à demi fou ! Gardons le meilleur pour la fin avec le sabreur Katsutoshi Mikuriya qui affronte Shangaï Joe dans un prodigieux duel final. Duel dans lequel il a le bras tranché avant de finir la poitrine défoncée à mains nues !
Dans le genre gore, la mort de Rossi Stuart est la plus spectaculaire. En effet, ses yeux sont arrachés en gros plan !!!
Le plus fort du film est que ce déferlement de violence n’empêche nullement l’émotion. On se passionne pour les aventures de ce Chinois épris de justice et on est de tout coeur avec lui, tant il est rendu attachant. C’est un exclu au milieu d’un monde de salopards sans pitié. Et ce n‘est qu’au milieu d’autres exclus, les pauvres Mexicains, qu’il trouvera des amis.
A la croisée de deux genres, SHANGAI JOE est un film incroyable, comme seul le cinéma populaire italien pouvait en produire.

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