Mondwest

Un texte signé Nassim Ben Allal

Etats-Unis - 1973 - Michael Crichton
Interprètes : Yul Brynner, Richard Benjamin, James Brolin, Victoria Shaw

La relation entretenue par Michael Crichton avec les parcs de loisirs et surtout leurs principales attractions ne date pas de l’écriture de JURASSIC PARK au début des années 1990. Plusieurs histoires circulent sur la manière dont l’auteur a eu l’idée originale de MONDWEST. Pour certains, la légende raconte que lors d’une visite à Disneyland, épaté par les personnages animatroniques présent dans plusieurs attraction au premier rang desquelles la célébrissime Pirate des Caraïbes, Michael Crichton ait eu l’idée d’un roman se déroulant dans un parc peuplé uniquement de ces humanoïdes (mais bien plus évolués que ceux de la réalité) et qui constitueraient eux-mêmes l’attraction principale. Pour d’autres, l’idée vint à Crichton lors d’une visite au Kennedy Space Center où il remarqua que les astronautes, ultra-entrainés, agissaient de fait mécaniquement…comme des robots. Il imagina alors une situation dans laquelle les habituelles distinctions entre un humain et un robot deviendraient floues…
Où que ce situe la vérité, Michael Crichton trouve là un concept révolutionnaire au sein duquel science, humanité et divertissement sont intimement liés, principe qui trouvera son point d’orgue avec JURASSIC PARK.
Dans un futur proche (1983, soit dix ans après la sortie du film), le parc d’attraction Delos permet à des visiteurs capables de débourser 1000 dollars par jour de visiter trois époques historiques de leur choix : romaine, moyenâgeuse et celle de la conquête de l’ouest. Là, tout est possible et les visiteurs, exclusivement adultes, peuvent laisser libre cours à toutes leurs pulsions puisqu’ils n’ont en face d’eux que des créatures mécaniques d’apparence humaines, certes évoluées, mais néanmoins totalement factices. Deux hommes d’affaires décident ainsi de passer quelques jours dans le Far West, pour jouer les cow-boys, comme deux gamins. Et comme deux chenapans, ils n’hésitent pas à faire régner leur propre ordre et abattent comme bon leur semble des robots hors-la-loi. Mais l’un d’eux, particulièrement coriace, semble s’éveiller à une certaine forme de conscience et rejette son statut de victime pour mieux prendre ses bourreaux en chasse. Et alors qu’une poursuite potentiellement mortelle se met en place, les ingénieurs du centre technique du parc perdent peu à peu le contrôle sur les machines et les robots vont alors se montrer sans pitié envers la race humaine.
Tandis qu’il sort tout juste de sa première expérience en tant que réalisateur (le téléfilm catastrophe PURSUIT avec Ben Gazzara et Martin Sheen), Crichton décide de transformer son idée de livre en scénario pour le tourner ensuite lui-même. Frileuse face à ce jeune cinéaste plus connu pour son travail de romancier, la MGM accepte de financer le projet pour un assez faible budget. Crichton est partant et, pour ne pas perdre de temps, décide de ne tourner uniquement les plans dont il aura besoin au montage, ni plus ni moins (ce qui explique un découpage très lent composé de longs plans tendant à ralentir le rythme), tout en demandant des efforts d’ingéniosité à l’équipe chargée des nombreux effets spéciaux du film.
Revoir un tel classique de la science-fiction presque quarante ans après sa sortie est une expérience à double tranchant car le film ne peut qu’avoir vieilli et ce qui séduisait il y a encore dix ans peut s’avérer aujourd’hui d’un ridicule mortifère. Et pourtant. Alors oui, MONDWEST présente des traces de passage du temps, dès ses premières images, lors d’une transparence pas vraiment criante de vérité, mais qu’importe. Très vite, via l’efficacité de son écriture sans temps mort mais qui n’en oublie pas pour autant de poser ses enjeux et de caractériser ses personnages, le spectateur embarque pour l’aventure, en même temps que les principaux protagonistes. Dans le rôle des citadins en goguette, James Brolin et Richard Benjamin forment une sympathique paire de quadra en quête de détente, mais c’est surtout Yul Brynner en machine à tuer mutique qui emporte les suffrages. Dans un rôle totalement muet de robot sans aucune personnalité, le comédien insuffle une sensation de conscience et d’âme à son personnage, rappelant de manière encore plus inquiétante son rôle dans LES SEPT MERCENAIRES.
i le thème de la machine qui se rebelle contre l’homme est devenu un archétype de récits de science-fiction notamment depuis le premier TERMINATOR (le classique de James Cameron et l’interprétation monolithique de Schwarzenegger doivent beaucoup à MONDWEST), c’est ici une des premières fois qu’il est traité. Avec un sérieux indéniable et documenté, Michael Crichton fait même référence pour la première fois dans un long-métrage à un « virus informatique ». Sérieux et jusqu’au-boutiste, MONDWEST l’est assurément, se transformant au fur et à mesure en un survival tragique où l’homme est menacé par sa création, création qui n’a retenu que les mauvais côtés de son inventeur. A la fois pur film de genre(s) et parabole philosophique sur l’importance prise par la technologie dans notre civilisation (et nous ne sommes qu’en 1973 !!!), MONDWEST fut prolongé thématiquement par son auteur via RUNAWAY-L’EVADE DU FUTUR en 1984. De leur côté, les producteurs n’attendirent pas et face au succès inattendu du film, lancèrent une suite, LES RESCAPES DU FUTUR en 1976 et une série télévisée, BEYOND WESTWORLD.


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- Article rédigé par : Nassim Ben Allal

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