Mystic Killer

Un texte signé Nassim Ben Allal

Angleterre - 1974 - Freddie Francis
Interprètes : Jack Palance, David Warbeck, Trevor Howard, Suzy Kendall

Lorsque Freddie Francis entame le tournage de MYSTIC KILLER en 1974, il est alors à l’apogée de sa carrière de cinéaste. Chef opérateur émérite, il est à cette époque en pleine « pause réalisation » depuis 1964 et ne reviendra à au poste de directeur de la photographie qu’en 1980 pour composer l’une des plus belle lumière du cinéma avec son travail sur ELEPHANT MAN de David Lynch. Avant de retrouver Peter Cushing l’année suivante pour LEGEND OF THE WEREWOLF, Francis met ici en scène une autre légende du cinéma, l’immense (dans tous les sens du terme) Jack Palance. Entouré par quelques comédiens coutumier du genre (David-L’AU DELA-Warbeck, Suzy-L’OISEAU AU PLUMAGE DE CRISTAL-Kendall), Palance livre une composition hallucinée, toute en folie furieuse et séduction feutrée.
Neal Mottram, respectable antiquaire américain installé dans une petite bourgade anglaise, cache dans sa cave la statue d’une divinité africaine, le dieu Chuku. A la tête d’un petit groupe qui vénère cette idole, Mottram va petit à petit sombrer dans la folie meurtrière, persuadé que chaque sacrifice humain offert à Chuku va lui apporter richesse et puissance…
Produit par Herman Cohen, le pape du cinéma d’exploitation américain des années 1950, MYSTIC KILLER est adapté d’un roman anglais à succès de Henry Seymour. Fort d’une intrigue ancrée dans la réalité calme et bucolique d’un petite ville typiquement anglaise, Freddie Francis distille le malaise dés les premières images où l’on découvre l’idole et ses adorateurs. Sous l’influence de Chuku, Jack Palance apparaît totalement possédé et, sans avoir recours à des mimiques surjouées, affirme là toute l’étendue de son talent de comédien : il ne joue pas le rôle d’une antiquaire fou, il est un antiquaire fou. Porté par les larges épaules de l’acteur, le film ne s’avère malheureusement pas à la hauteur de son talent. Si le réalisateur sait tranquillement (trop tranquillement ?) dérouler les fils de son récit, il le ponctue d’effets qui le date immédiatement et le transforme en un produit de consommation pour spectateur des années 1970 mais empêche alors son œuvre de s’installer dans la durée. Les zooms approximatifs et plans au fish-eye apportent une touche désagréable, tout comme les costumes criards et l’esthétique générale qui souffre de la patine du temps. Ainsi, le cadre, toujours très rempli, trop rempli, étouffe le spectateur et par conséquent une histoire pourtant très simple et efficace. Reste un érotisme bon teint et ce sang rouge versé avec parcimonie et pourtant si agréable à voir couler, carmin tirant vers la gouache à peine diluée. Au-delà de son aspect DERRICK avec sa photo grisaille aux couleurs caca d’oie, au-delà de ses quelques erreurs techniques (l’ombre de la caméra et de son opérateur sur Jack Palance lors d’un plan de nuit), MYSTIC KILLER apparaît aujourd’hui comme une curiosité et démontre qu’une addition de talents ne livrent pas forcément un film parfait. Si Palance s’avère inquiétant, il est également inquiétant de se demander comment un chef opérateur aussi talentueux que l’était Freddie Francis (et qui n’a jamais éclairé aucune de ses réalisations) a-t-il pu se satisfaire d’une photographie aussi laide.


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- Article rédigé par : Nassim Ben Allal

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