NH10

Un texte signé Philippe Delvaux

Meera et son compagnon Arjun s’en vont en week-end loin de la ville. Dans une station-service campagnarde, ils assistent à l’enlèvement d’une jeune femme et de son amant par la famille de la première. Voulant intervenir, Arjun est rossé. Peu de temps plus tard, ils recroisent la voiture des ravisseurs. Armé d’un révolver, Arjun, n’écoutant que son orgueil blessé, décide d’aller délivrer les jeunes gens. Sauf qu’en plein crime d’honneur, les paysans ne vont pas vouloir laisser de témoins, et qu’Arjun a surestimé ses capacités et son courage. Meera et lui devront maintenant fuir pour leur vie, coursés par une famille prête à tout pour les éliminer.

D’Inde, nous sommes habitués aux longues mièvreries romantiques parsemées de chants et de danses. Mais hors du Bollywood classique et lissé, se développe de plus en plus un cinéma de genre plus conforme aux codes occidentaux – entendez avec des personnages moins stéréotypés et dénués de chorégraphies. Ainsi de ce NH10 qui ressort au survival avec la longue traque de nos deux tourtereaux, et surtout de Meera, qui devra révéler toute sa force et sa ruse pour survivre.

NH10 n’obère en outre pas la violence inhérente au genre précité et les morts violentes se succèdent de manière assez graphique. On le rapprochera donc plus du cinéma d’un Anurag Kashyap (GANGS OF WASSEYPUR, UGLY), pour ne citer qu’un réalisateur indien s’éloignant des conventions locales du cinéma.
Les fragrances indiennes se révèlent par les thématiques abordées, en phase avec la réalité sociale locale : le tabou la honte ou l’interdit des mariages entre castes, le décalage entre ville et ruralité, la corruption de la police ou des chefs de village, les crimes d’honneur. Tout cet ensemble justifie les actes des protagonistes d’un scénario bien écrit et rondement mené.

En outre, le personnage fort est ici clairement la femme. Les protagonistes masculins sont soit son compagnon qui se révèle plus un poids qu’une aide, soit ses assaillants. Il n’est pas innocent de relever cette mise en évidence féminine, car un autre film indien projeté à cette même édition de l’Etrange festival – le blockbuster BAAHUBALI – se montrera, lui, beaucoup plus machiste en reléguant rapidement au seul rôle de demoiselles en détresse des femmes qui auraient pourtant pu obtenir un rôle plus participatif.

A défaut de le croiser en salle, ses chances de sortie dans nos contrées restent faibles, NH10 mérite sa sélection en festival et notamment à l’Etrange 2015 qui, cette année, faisait d’ailleurs une place assez remarquable aux cinémas indiens (LUDO, BAAHUBALI, SUNRISE).


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- Article rédigé par : Philippe Delvaux

- Ses films préférés : Marquis, C’est Arrivé Près De Chez Vous, Princesse Mononoke, Sacré Graal, Conan le Barbare

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