Night Feeders

Un texte signé André Cote

USA - 2006 - Jet Eller
Interprètes : Donnie Evans, Brett Gentile, Mike Monzitta, Michael Ruff, Kate Leahey....

Une météorite s’écrase dans une forêt américaine. Dans ce même lieu, une bande de copains part pour un week-end en camping. Sans avoir eu connaissance de la météorite, ils ne tardent toutefois pas à découvrir ce que cachait celle-ci : une vie extraterrestre.
Un tel postulat aurait pu donner naissance à un nouveau survival dans la droite lignée des MASSACRE A LA TRONCONNEUSE et L’ARMEE DES MORTS. On y voit l’irruption d’un élément inconnu (un psychopathe dans MASSACRE, les zombies dans L’ARMEE DES MORTS et les extraterrestres dans NIGHT FEEDERS) qui déstabilise les acquis sociaux et moraux des protagonistes, remet en perspective leurs certitudes et leur révéle une sauvagerie et une humanité qu’ils ignoraient. Toutefois, il ne semblerait pas judicieux de comparer NIGHT FEEDERS à ses autres métrages. En effet, l’ambition du réalisateur est clairement de ne pas de rivaliser avec eux. Le film prend plutôt des allures de série Z tournée entre potes l’espace d’un week-end (le séjour en camping de la bande serait-il le reflet de l’ambiance du tournage ?). Cette impression nous est donnée par la lourdeur de la mise en scène qui aurait gagné à acquérir plus de rythme et par la qualité de l’interprétation.
Les scènes semblent avoir été filmées sans avoir été préalablement répétées, ce qui donne lieu à un jeu d’acteurs rempli d’approximation. Il faut avouer le plaisir coupable que l’on prend à la vision de ces personnages de ploucs sympathiques confrontés à des événements qui les dépassent ; cette virée devant être l’occasion pour eux de s’évader de leur quotidien trop pesant. L’une des premières scènes du film montre l’un d’eux se faire enguirlander par sa femme devant ses potes. Il s’agit d’une belle entrée en matière pour les montrer oppressés dans leur quotidien, du moins sur le papier. A l’écran, c’est une autre affaire, le jeu si sommaire des acteurs faisant sombrer le film dans la caricature.
Jouant avec les ombres des décors, la photographie s’avère soignée. Il semble que l’équipe s’inspirait de série telle que X-FILES pour installer une atmosphère puisque même les plans se déroulant en pleine lumière contiennent une touche de sombre. Le seul écueuil à cet effort étant que les artifices pour éclairer les acteurs lors des scènes de nuit n’en deviennent que plus flagrants : deux ou trois plans trahissent l’utilisation de projecteurs sans que, néanmoins, la présence de ces derniers soit flagrante. En effet, on ne voit pas de source lumineuse dans le champ de la caméra. Toutefois, vu l’éclairage des visages et les sources lumineuses présentes, l’utilisation de tels moyens techniques ne fait aucun doute.
De plus, on souligne de réels efforts dans les effets spéciaux. Passons les images de synthèse qui semblent avoir été faites à la dernière minute tant les incrustations se révèlent trop visibles. Au choix, cela dénote soit un délai de post-production trop court soit un manque de budget pour terminer les finitions de ce type d’effet. Les effets mécaniques et maquillages sont, quant à eux, nettement plus soignés et on devine le travail réalisé en amont. D’ailleurs, les plans sur eux sont nettement trop longs, preuves de la fierté de l’équipe du film à leur encontre, ce qui produit une perte d’efficacité de leur effet.
On remarque aussi qu’à la moitié du métrage, le scénariste (qui est aussi le réalisateur du film) lorgne du côté de LA NUIT DES MORTS-VIVANTS. On retrouve les personnages qui se barricadent dans la première maison isolée venue et celle-ci se retrouve très vite assiégée par les extraterrestres. Là encore, ce n’est qu’une influence au même titre que PREDATOR (des humains qui affrontent un extraterrestre dans une forêt) comme si le réalisateur était à cours d’idées pour meubler le film et piochait ici et là. Il ne faut pas s’attendre à une quelconque critique de la société américaine dans l’esprit de l’oeuvre de Romero. Ici, il est seulement question d’apporter un second souffle au métrage, afin de ne pas rester cloitré dans une forêt, du point de vue scénaristique, cela s’entend.
Du coup, le seul élément à conserver réside dans le découpage technique, le montage. Il faut dire qu’à cet égard le film est bel et bien compréhensible. On a donc l’impression que le film a été tourné dans l’urgence la plus totale. Nous avons ainsi droit à des plans d’ensemble lors des moments d’action, des scènes que l’on devine les plus rapides à tourner puisqu’on ne voit aucun plan sur de menus détails tels que « la main qui prend le fusil » ou « un regard d’inquiétude », ceux-ci s’avèrent limités dans ce type de scène. Ainsi, ce sont les moments plus intimes, de calme donc, qui bénéfécient d’un traitement de mise en scène plus dévelloppé, aux moments dits « d’action ».
Toutefois, on peut remercier le scénariste de ne pas sombrer dans un conformismie bien pensant et de verser avec jubilation dans un territoire réactionnaire certes, mais plus jouissif au second degré, ce qui semble être également l’ambition du réalisateur. Le film prend des allures de pensum à la gloire de la vengeance la plus vindicative, des armes à feu et des milices qui se forment en période de guerre. C’est peu, soit, mais un plaisir coupable, aussi petit soit-il, ne se refuse pas.
Une série Z qui peine à démarrer et qui a même du mal à conserver son rythme, mais qui acquiert un capital de sympathie in extremis.


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- Article rédigé par : André Cote

- Ses films préférés : Dark City, Le Sixième Sens, Le Crime Farpait, Spider-Man 3, Ed Wood

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